Chapitre 4

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Mélodie Hagues

Je dormais profondément quand le chant des oiseaux vint doucement me tirer du sommeil. Lentement, j’ouvris les yeux, laissant la lumière du matin se glisser à travers mes paupières. Un mince rayon de soleil perçait entre les rideaux de la fenêtre, illuminant la pièce d'une clarté douce et apaisante. Je me tournai, remarquant que Billie n'était plus là. Elle avait dû se lever tôt, déjà partie pour ses propres activités, sans un bruit.

Je sortis du lit, m'étirant avant de me diriger vers la salle de bain pour enfiler ma tenue d'équitation. Aujourd'hui, j'avais hâte de retrouver Judith, ma fidèle jument, et de parcourir la forêt avec elle. Une fois habillée, je descendis les escaliers pour découvrir que la maison était étrangement calme. Mon oncle Raymond n’était pas là non plus – il avait probablement rejoint la rivière pour sa pêche matinale, une routine à laquelle il ne dérogeait presque jamais.

Je me préparai rapidement quelques tartines, accompagnées d'une tasse de chocolat chaud, profitant de la tranquillité qui régnait. Après avoir pris mon petit-déjeuner, je rassemblai mes affaires et sortis dans l’air frais du matin. L’odeur de la forêt, humide et boisée, embaumait tout autour du chalet.

Je pris le chemin qui menait au box de Judith, situé en lisière des sous-bois. Tout en marchant, je savourais la sérénité de ce moment. Le bruissement des feuilles et les chants des oiseaux donnaient vie à ce début de journée. Arrivée près du box, je vis Judith qui m’attendait, impatiente. Elle dressa les oreilles en m'apercevant et poussa un petit hennissement de bienvenue.

— Salut, ma belle ! dis-je en caressant son encolure. Prête pour une balade ?

Judith frotta doucement sa tête contre mon épaule, comme pour me dire qu'elle l’était toujours. Je me sentais soudain prête à explorer la forêt avec elle, à me perdre dans les sentiers cachés, loin de tout, juste moi et ma jument, le monde qui nous entourait… et peut-être Billie, quelque part à proximité, si le destin voulait que nos chemins se croisent ce matin.

Alors que je brossais Judith en douceur, j’entendis des pas approcher derrière moi. Je me retournai et vis Billie, s'avançant vers nous avec un sourire discret qui fit légèrement battre mon cœur plus vite.

— Salut, lança-t-elle d'une voix calme.

Je répondis, essayant de rester naturelle :

— Salut ! Bien dormi ?

— Comme un bébé, répondit-elle en s’appuyant contre la barrière du box, son regard posé sur Judith, puis sur moi. Et toi ?

— Oui, plutôt bien, dis-je avec un sourire. J’allais justement t’attendre pour la balade.

Son sourire s'élargit, et je sentis cette étrange tension qui naissait parfois entre nous, comme une sensation difficile à nommer. Je me rappelai à chaque fois qu’elle était supposée être ma « cousine » et me dis qu’il fallait absolument que j’arrête de me poser des questions.

— J'ai hâte de découvrir la forêt avec toi, dit-elle en approchant Judith, qui la regardait avec une certaine curiosité.

Je hochai la tête, finissant de préparer Judith. En peu de temps, nous étions prêtes à partir. Je montai en selle, Billie marchant à côté de moi sur le sentier forestier. La lumière du matin filtrant à travers les arbres donnait à la forêt une allure presque féerique, et la fraîcheur de l’air faisait vibrer chaque son autour de nous.

— Ça fait longtemps que tu viens ici avec ton oncle ? demanda Billie, brisant le silence tout en marchant à mes côtés.

— Oui, depuis toute petite, répondis-je. On a passé tellement de journées ici, à explorer les coins perdus de la forêt. Ça me donne presque l’impression que chaque arbre cache un secret. Et toi, tu es déjà venue dans ce genre d’endroit ?

Elle secoua doucement la tête.

— Non, pas vraiment. Les forêts m’ont toujours attirée, mais jamais de cette façon… Tu sembles vraiment liée à ce lieu, c’est beau à voir.

Ses mots, accompagnés de ce regard perçant, me troublèrent un peu. Elle avait une façon de parler qui m’atteignait, comme si elle pouvait lire en moi plus que je ne le pensais.

Nous continuâmes en silence, seulement accompagnées par les pas de Judith sur le sol mouillé de la forêt. Tout semblait paisible, jusqu'à ce que j’entende un bruit étrange. C’était comme un murmure, très léger, qui flottait dans l’air, se mêlant au bruissement des feuilles. Je tirai doucement sur les rênes, regardant autour de moi.

— Tu as entendu ? demandai-je, un frisson me parcourant le dos.

Billie plissa les yeux, scrutant l’ombre des arbres.

— Entendu quoi ?

J’hésitai, craignant de passer pour une folle.

— On aurait dit... comme un murmure. Comme si quelqu’un m’appelait, dis-je d’une voix plus basse, presque chuchotée.

Elle posa une main rassurante sur mon bras, son regard se faisant plus intense.

— Ce doit être le vent, murmura-t-elle, mais elle ne semblait pas totalement convaincue.

Pourtant, ce son me paraissait si clair, comme une voix qui m’appelait, là-bas, quelque part entre les arbres. J'eus un moment d'hésitation, comme si une part de moi voulait suivre cet appel mystérieux. Billie, remarquant mon trouble, serra doucement mon bras.

— Hé, reste avec moi, dit-elle doucement. On est ensemble, d’accord ?

Son regard m'apaisait, et je hochai la tête, essayant de me convaincre que ce n’était rien de plus que mon imagination.

— Oui, tu as raison. Merci, murmurai-je, tentant de réprimer un frisson.

Nous reprîmes la marche, mais le son de ce murmure me hantait encore, et je sentis que quelque chose, ou peut-être quelqu'un, semblait vouloir attirer mon attention dans l’ombre de cette forêt ancienne.

À la fin de la balade, je jetai un dernier regard vers la forêt, comme si c’était la dernière fois que j’allais y entrer. Pourtant, au fond de moi, je savais bien que cet appel mystérieux… j’allais y retourner. Cela faisait des années que je n’avais plus exploré ces bois, et jamais une chose pareille ne m’était arrivée. C’était troublant, presque effrayant, mais je pris sur moi pour ne rien laisser paraître. Je ne voulais pas montrer la moindre peur, surtout pas devant Billie. Peut-être qu’elle avait raison après tout… c’était sûrement juste le vent. J'essaie en vain de me changer les idées en lisant ou en dessinant, mais mes yeux retournent sans cesse vers la forêt. J'ai cette étrange sensation qu'il y a quelqu'un là-bas, une présence qui m’appelle. Et cette voix... elle avait quelque chose de familier, presque comme celle de Billie. Est-ce que je suis en train de perdre la tête ?

Ces murmures en sous-bois / Une dark romance lesbienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant