𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 𝟐

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J'avais espoir que ma soirée prenne un autre tournant. En bonne compagnie, un verre de vin rouge et un plateau repas avant de terminer la nuit dans mes draps en soie. Mais non, me voilà à faire demi-tour en plein milieu de la route, mes pneus crissant sur le goudron et les klaxons résonnant autour de moi. Un nuage de fumée blanche stagne derrière moi, vestige du dérapage contrôlé que je viens d'effectuer à grande vitesse.

À l'aide de la commande vocale de mon véhicule, j'envoie un message à Isaïah pour le prévenir de cette déconvenue. Je sais qu'il sera capable de gérer la livraison du corps caché dans le coffre de l'utilitaire. Petit cadeau directement apporté à l'organisation criminelle que je suis en train de démanteler homme par homme. Je jubile à l'idée de les torturer un à un jusqu'à ce qu'ils finissent tous dans les limbes.

Après quelques minutes de route, je me gare devant le poste de police et sors de mon véhicule. D'un pas assuré, j'avance vers l'entrée et franchit les grandes portes automatiques en verre. Je contourne le bureau d'accueil sans accorder un regard à la femme qui se tient derrière sa vitre de plexiglas et trace ma route jusqu'au bureau du capitaine du trente-troisième District de la police de Manhattan.

— Hudson.

Le ton de ma voix est neutre. Je m'efforce de ne pas laisser transparaître mon mécontentement. Comme toujours, je pare mon visage d'un masque d'indifférence. Ne pas montrer ses émotions, car elles nous rendent faibles, telle est ma devise.

— Valentine, je te vois trop souvent en ces lieux et jamais derrière les barreaux.

Un rire franc s'échappe de mes lèvres et un sourire en coin se dessine sur mes traits. Sa plaisanterie me fait toujours autant rire. Il est comme un père de substitution – du moins, il se comporte comme tel – jamais, il ne sera capable de me faire enfermer.

— Je te ferai livrer la plus belle bouteille de champagne, le jour où tu réussiras à me faire enfiler une tenue orange et des menottes.

Je fais mine de réfléchir, mon doigt tapotant contre mon menton.

— Oublie la dernière partie, j'adore les menottes, mais dans un tout autre contexte.

Derrière Hudson, un jeune flic s'esclaffe et se porte volontaire pour me les enfiler au besoin. Je lui lance un regard noir qui le fait taire immédiatement. Non merci, les forces de l'ordre n'ont rien à faire dans mon lit, bien que ce serait drôle de les baiser autrement qu'en leur échappant.

— On a retrouvé ce lascar non loin de J. Hood Wright Park à bord d'une voiture qu'il s'est amusé à sortir de notre fourrière. Rose, c'est quoi encore cette embrouille ?

Hudson pointe mon acolyte du doigt. Milán est assis sur une chaise à côté du bureau du capitaine et se tient droit comme un piquet. Pour une fois qu'il est calme et silencieux, j'en viens à me dire qu'il devrait se faire chopper plus souvent.

— Tu es sûr qu'elle vient de chez toi cette caisse, répliqué-je, en esquivant volontairement sa question.

— Rose Valentine, tu me prends pour un idiot ?

Son soupir atteste de sa déception. Une fois de plus, il m'a appelé pour venir chercher l'un de mes hommes suite à leurs conneries, mettant en danger sa carrière de capitaine. Derrière, j'entends le faible rire de Milán et d'un regard assassin, je lui indique de la fermer.

— Non, tu sais bien que non.

— Rose, j'espère que tu te rends compte de la chance que tu as. S'il avait été trouvé par quelqu'un d'autre, Milán ne s'en serait pas aussi bien sorti.

Le ton de sa voix est tendre, compatissant. Je le connais depuis ma plus tendre enfance. Hudson est un vieil ami de mon père, ils étaient inséparables bien que leurs mondes soient opposés. Un flic et un mafieux. Une paire qui n'avait rien d'autre en commun qu'un passé pourri dans un orphelinat miteux du Bronx.

Hopeless SoulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant