Chapitre 1

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Palerme, 8 aout 2024.

Le plus dur dans le métier de journaliste, c'est d'avoir assez de matière pour commencer notre enquête.Et quand je dis "notre" c'est de la mienne dont je parle, évidemment. Cependant, dans le cas " des disparues de Palerme" , l'affaire avait été à chaque fois très médiatisée pour aussitôt retomber comme un soufflet au fromage raté. Ou comme une meringue trop cuite.

J'avais des pistes, mais avoir accès aux dossiers des victimes et aux rapports de police, étaient indispensable pour mes recherches. Éléments qui étaient évidemment strictement confidentiels. Éléments dont je n'avais évidemment pas accès, sinon ça serait trop facile et nous, on n'aime pas quand c'est facile. Pour l'instant, je devais me concentrer sur toutes les informations que j'avais à ma disposition et faire le tri entre les faits avérés et les fake news. Notre profession n'était pas épargné par son lot d'incapables et de coureur de scoop, quitte à raconter n'importe quoi. Triste mais vrai, on a tous nos rongeurs de parquet qui veulent obtenir la gloire.

Je vivais dans un petit appartement dans le cœur de Palerme, la chaleur était étouffante en ce début de journée et je préparais mon enquête depuis 2 heures du matin. L'avantage avec le métier de journaliste indépendante c'est que je pouvais travailler à n'importe quelle heure. Il était 8 heures soit beaucoup trop de temps sans caféine. Il était temps de prendre une pause, et de sortir de mon four personnel.

Je pris juste mes clés et mon porte monnaie et descendis dans le café du coin.

Palerme n'a jamais été une ville que j'aime particulièrement, mais mon petit quartier est vraiment mignon, les habitants sont toujours gentils et souriants contrairement à la majorité des autres coins de la ville, gangrenaient par les gangs, la mafia et le trafic de drogue. Aussi, vivre à côté d'un café était une vraie source d'informations et de racontars utile pour mes sujets. Les informations locales allaient plus vite que sur twitter.

En rentrant "Chez Alf", la bonne odeur de café fraîchement moulu sur place me saisit et me ravit les sens.Un bon enquêteur ne tient que grâce à sa dose de caféine qui lui provoquera une crise cardiaque avant 50 ans.

 Alfredo, le patron, tient le bar depuis au moins mille ans,  et je peux dire sans mentir qu'il fait le meilleur café de la province de Palerme. Parole de journaliste indépendante.

Malgré l'heure matinale, le café était déjà en effervescence. Alfredo était déjà affairé dans tous les sens derrière son comptoir. En entendant la cloche d'entrée retentir, il leva la tête et m'adressa un signe de la main.

- Bonjour Alf, un café noir comme d'habitude, s'il te plaît. Je m'avançais au comptoir pour m'installer sur un des tabourets libres. La décoration était vraiment vintage pour ne pas dire complétement dépassée, mais c'était propre et je ne risquais pas de courir aux toilettes après avoir mangé une panna cotta à la mangue. Longue histoire.

- Ciao Livia, tout de suite, bambina.

Comme d'habitude, les lieux étaient pleins, surtout des habitués, mais quelques touristes semblaient avoir trouvé les lieux assez authentiques pour se reposer avant de commencer leurs visites. En continuant à parcourir le café des yeux, je repérais deux hommes penchaient l'un vers l'autre en train de chuchoter de façon énergique. Mon instinct se mit direct au garde à vous. En essayant de tendre de l'oreille, je ne réussis qu'à saisir des bribes de la conversation. Foutu touristes trop bruyants.

- ... premier corps... lac... pas loin.

-C'est horrible...la famille....

Le café, bruyant quelques instants plus tôt, sembla se figer. En réalité, c'étais moi qui était figée, mon cœur loupa un battement. Est-ce que Tic et Tac parlaient bien de ce à quoi je pensais ? Ou est ce que j'étais déjà tellement obsédé par cette histoire que j'espionnais la conversation d'un futur scénario d'un thriller ?  La voix d'Alfredo sembla me venir de loin.

- Livia, tout va bien ? Son ton avait l'air inquiet, mais on n'était jamais sur de rien avec ce vieux ours.

Il toucha mon épaule et me tendant mon café, cela fut suffisant pour me ramener sur terre.

- Alf, tu peux allumer la télé ? Sans poser de question, Alfredo se saisit de la télécommande pour mettre la chaîne d'info continue. Je crois qu'il commençait à avoir l'habitude de mes excentricités. Pauvre Alfredo.

Sur l'écran, un présentateur à l'air grave annonçait une nouvelle qui glaça mon sang :

— Ce matin, à proximité du parc Favorita situé à Palerme, le corps d'une femme a été découvert par des passants. Les autorités confirment qu'il s'agit de Maria Bellini, portée disparue depuis le 3 juillet et vue pour la dernière fois à via Maqueda près de la Fontana Pretoria, un lieu très fréquenté. La police privilégie la piste d'un meurtre, mais aucune déclaration officielle n'a été faite pour l'instant.

Maria Bellini, l'une des cinq femmes dont j'avais étudié le dossier la veille, était désormais la première dont on retrouvait le corps. Cela changeait tout, les cartes étaient rebattues. Mon enquête venait à peine de commencer et il y avait déjà des rebondissements. Si les corps commençaient à apparaître, cela ne pouvait qu'inciter la police à réouvrir les dossiers pour "disparitions et meurtres". Ils ne pouvaient plus se cacher sous le motif de la "fugue ou de la disparition volontaire". 

Les détails dont je me souvenait sur la victime, était qu'elle était âgée de 35 ans, mère célibataire de 2 enfants. Pas d'antécédent avec la justice, elle travaillait de nuit dans une supérette pour pouvoir subvenir au besoin de sa famille. Sa disparition avait été signalé par une collègue venant prendre son service du matin. En voyant la voiture de Maria sur le parking, et ne la trouvant pas dans la supérette, elle avait appeler les autorités vers 8 heures. 

Plusieurs choses sont étrange dans ce sac de noeuds, la première est que les précédentes victimes n'avaient pas d'enfants. S'attaquer à une mère célibataire est plus risquée pour une personne mal intentionnée. En effet, son schéma familial est plus susceptible d'attirer l'attention de la presse et d'émouvoir la population.  Ce qui peut laisser penser que toutes les affaires ne sont peut être pas lier ou du fait du même individu. La deuxième chose, est qu'on a vu pour la dernière fois Maria à 5 heures du matin  à l'angle de la via Maqueda sur la bande de vidéo de surveillance de la ville. Soit à 1 kilomètre de son travail et 3 heures avant la fin de son service. Pourquoi Maria n'était pas à son poste de travail ? Avait-t-elle rendez-vous avec quelqu'un ? Ou est-ce qu'on l'avait attirer dans un endroit reculé pour commettre le crime en toute tranquillité ? 

Les personnes de son entourage et ses collègues l'avaient décrite comme très sérieuse et reconnaissante d'avoir un travail qui pouvait lui permettre de s'occuper de ses enfants. Pour l'instant, rien ne justifié ce comportement pour le moins perturbant. Sur les vidéos, Maria était seule et aucun témoins ne s'était fait connaitre.   

 Je nageais dans un océan de questions. Beaucoup de questions et zéro réponse. Cinq mois de perdu et maintenant on était certain qu'une femme avait payé l'incompétence de la police, laissant 2 orphelins. C'était frustrant, rageant et beaucoup d'autres mots finissant en "ant". Prenant mon café pour le boire d'une traite, je me dirigeais d'un pas ferme vers mon appartement. Il était temps que je m'occupe de cette affaire en remuant les ordures.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 25 ⏰

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La belle et les méchantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant