Chapitre 1

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-Jessie ?

Je me retourne. Steven est devant moi, une boîte de pâtisserie dans les mains.

-Je m'en vais, déclare-t-il de sa voix nasillarde.

-Pourquoi ?

Peut-être que mon ton avait l'air plus désespéré que je ne l'étais. Non pas que je n'aime pas Steven, c'est un  rédacteur incroyable ; un véritable atout pour "Cultivez votre jardin". Sauf que sa tendance a n'avoir aucune émotion sur le visage n'est pas très agréable. Surtout lorsqu'il faut collaborer pour un article de dernière minute. Et il prétend avoir une femme... 

-Je vais être rédacteur dans une presse animalière, répond Steven.

Il me tend la boîte rose pâle. Je l'ouvre et constate que son salaire avait dû y passer pour pouvoir acheter autant de tartelettes. J'en saisi deux avant qu'il ne m'interpelle.

-Hin hin, s'exclame-t-il en m'arrachant une des deux tartelettes aux framboises, tu crois pas que tu vas manger ça toute seule ? Déjà que t'as pas un physique très avantageux tu veux te faire davantage de mal ?

Plus il parle, plus j'ai hâte qu'il s'en aille pour de bon.

-Dans ce cas, dis-je avec un sourire superficiel, je vais en laisser pour les autres.

Je repose ma dernière tartelette dans la boîte en carton en regrettant mon geste : j'avais faim !

-Sage décision.

Il passe une main dans ses cheveux gras et me fixe. Un lourd silence s'installe. On entend juste les cliquetis des doigts s'abattant sur les claviers d'ordinateurs. Je ne sais pas quel genre de scénario il se fait dans sa tête, mais ça en devient perturbant.

-Tu sais, Jessie... 

"Eh c'est r'partit !" je soupire en pensée.

-Tu n'es pas la fille la plus jolie que je connaisse, continue-t-il, ni la plus intelligente, mais t'es sympa et puis... J'me disais, un de ces quatre... Peut-être on pourrait se voir, genre lumières tamisées, musique en fond...

Je le coupe dans son délire, craignant que ça ne parte trop loin.

-Je suis fiancée, tu te souviens ?

Je lui désigne ma bague en diamant à huit carras qu'Evan m'a offerte.

Il hoche tristement la tête, gêné. Il tourne les talons, le pas lent.

-Mais t'es un type bien, je crie dans son dos pendant qu'il s'en va.

Il ne prend pas la peine de se retourner et passe la porte.

J'aurais bien repris ma tartelette...

Je soupire et retourne à mon article sur les limaces. J'en suis assez fière, Martin (le patron) m'a donné son feu vert pour que je puisse moi même choisir le sujet. J'y ai réfléchi toute les nuits depuis des semaines entières, avant de trouver le sujet qui serait le plus lu de tous nos abonnés ! Il est vrai que les limaces sont un calvaire depuis des années (ça va sans dire !). On en trouve partout quand il pleut, toujours agglutinées sur les tranches de salades de potager. Et les insecticides sont une mauvaise idée pour les exterminées. Je traite le sujet avec une telle philosophie (sans vouloir ma vanter, évidemment) que ça ne m'étonnerait même pas que j'ai une augmentation.

Pendant que je tape la phrase finale de mon article, je sent mon portable vibrer. Je sors ce dernier de ma poche et consulte mes sms.

J'en ai juste un (c'est sûr qu'avec en moyenne une dizaine de contact je ne dois pas m'attendre à un flot de messages). Il vient d'Evan. 

Enfer au Paradis de la mode ; Saison 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant