'' La fille qui ne voulait pas se pousser ''

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-       Oh mais il est énorme votre centre d’achats ! dit-je à Léa en me garant.

-       Ouais, il est génial, me dit elle avec un grand sourire. À nos cartes de crédit ! fit-elle en sortant la sienne comme si c’était une arme.

Le centre d’achats Bay View était gigantesque. Quatre étages, s’étendant sur au moins huit cent mètres, ça, c’était la vie. Tout le reste de l’avant midi, Léa me traina dans ses boutiques préférées. En même temps, nous fîmes connaissance. Nous étions identiques ; environ la même taille (5’’6po), les mêmes gouts musicaux, nous aimons la même nourriture, le même style vestimentaire un peu loufoque mais classe et la même pointure de pieds. J’essayai plusieurs jolies robes soleil, des chandails bedaine, de magnifiques escarpins noirs en satin avec une petite boucle aux chevilles…

Vers une heure de l’après midi, mon ventre gargouilla très fortement.

-       Ok, on prends une pause, m’exclamai-je.

Nous nous dirigeâmes vers le centre de restauration et lorsque nous aperçûmes le restaurant thaï, je regardai Léa avec des airs à suppliants.

-       C’est bon, on y va, m’accorda-elle.

-       Oh merci merci merci ! dit-je en lui sautant dans les bras.

Je nous prit deux pad thaï et deux coca, puis nous sommes allées nous asseoir à une table au fond de la salle afin de nous éloigner des odeurs de friture et du bruit assourdissant qui régnait. Je déposai mon petit sac à dos en cuir sur le siège et m’assit.

-       Bon, fit-je, alors parle moi de toi.

-       De quoi veux tu que je te parles ?

-       Je ne sais pas moi, je réfléchis un instant. Ce matin tu me disais que tout le monde faisait comme si tu n’existais pas ? Ça veut dire quoi exactement ?

-       Ça veut dire que personne ne fait attention à moi. Que pour ne pas enrager ma sœur, personne ne se moque de moi, mais que pour ne pas la rendre jalouse, ou je ne sais quoi, ils ne parlent pas de moi et surtout ils font tous bien attention de faire comme si je n’étais pas là. C’est assez étrange. Je pourrais arriver en sous vêtement à l’école et tout le monde ferais comme si de rien était, j'en suis sure.

-       C'est étrange, fit-je. Tu as d’autres amis ?

-       Oui, un seul. Il s’appelle Sammy, c’est un métis gay. Il n’était pas là aujourd’hui, il est parti en vacances au Portugal et ne reviens que la veille de la rentrée des classes. C’est vraiment quelqu’un de bien mais tout le monde le méprise car il est homosexuel, ce qui est vraiment idiot.

-       Je n’en reviens toujours pas que encore à notre époque, des gens continuent à être homophobes ! C'est idiot, fit-je outrée.

-       Oui, enfin bref, parle moi de toi, me dit elle.

-       Oh d’accord. Je n’ai pas grand chose à raconter. Ma mère est dessinatrice pour Chanel, donc nous changeons constamment de ville.  Mon père est mort lorsque j’avais sept ans, du cancer du cerveau. Je l'ai très peu connu car il était homme d’affaires et ne passait que très peu de temps à la maison. J’adore peinturer, lire, écrire des poèmes. Je suis fascinée par les voitures, j’aime l’eau, regarder les étoiles, chanter faussement. Je suis enfant unique et je n’ai jamais eu de copain.

LouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant