Le poignet de Lucas L. vibre avant qu'il ne puisse répondre à la question. Il inspecte les alentours d'un rapide coup d'œil, et une fois certain qu'il ne court aucun risque d'être vu, il baisse les yeux sur le Dae-Phone qui lui mord le bras en clignotant avec impatience. Lucas L. déverrouille l'appareil et accède à son application de messagerie virtuelle, dont l'icône est sertie d'un petit 1 écarlate qui scintille. Une vidéo d'une trentaine de secondes se met aussitôt à se charger.
Elle s'ouvre sur un groupe de jeunes se précipitant à vive allure sur la voie pavée d'un parc. Des bruits, des encouragements probablement, se font entendre alors qu'ils approchent d'un escalier électrique qu'empruntent quelques passants. Sans hésiter une seule seconde, ils redoublent même d'efforts tandis qu'ils s'engouffrent dans les marches. Lucas L. ne peut réprimer un éclat de rire lorsqu'il voit deux passants s'effondrer, heurtés par un genou, un coude, ou un pied. L'un des blagueurs se réceptionne mal sur les marches et chute à terre sans que les autres ne stoppent leur course effrénée. Dans un hurlement de joie incontrôlé, la caméra rejoint le jeune homme déchu qui dégringole jusqu'aux premières marches. La vidéo coupe à l'instant où apparaît dans le cadre la jambe tordue et ensanglantée du jeune inconscient accidenté.
Lucas L. pouffe encore de rire et ferme l'application, non sans avoir vérifié s'il a reçu un autre message entretemps. Puisque ce n'est pas le cas, il verrouille le Dae-Phone, laisse retomber son bras le long de son corps et relève la tête.
- De quoi ?, lâche-t-il en remarquant que son vis-à-vis attend une réponse de sa part.
Lucas L. sait qu'il peut consulter son Dae-Phone devant son collègue, Michael A., en toute impunité, mais le visionnage de la vidéo lui a complètement fait perdre le fil de la discussion.
- Je te demandais où ça en était avec la gamine, là. Tu sais, celle du secrétariat », répète son collègue.
Lucas L. sourit. La seule mention de la fille lui ramène à l'esprit d'agréables images entremêlées de courbes alléchantes et d'un parfum entêtant et indéfinissable, quelque part entre le BlackSunrise et le Feu d'un Soir d'Alain Jeanvier. A chaque fois qu'il pense à elle, c'est dans cet espèce de débardeur serré gris de chez E-Modo qu'elle portait la seule fois où il l'avait vue en civil.
- Oh punaise, t'as de la chance que j'ai pas encore eu l'occasion de lui toucher deux mots, souffle Michael A. en soulevant une lourde caisse. Tu sais, les petites comme ça, moi, il faut pas que je reste à rien faire, sinon ça finit par me démanger.
Lucas L. laisse échapper un gloussement de rire. Il attend que son collègue ait posé sa caisse et qu'il se soit retourné pour ménager l'effet de son annonce.
- Tu serais arrivé trop tard de toute façon, vieux con. Si t'avais bossé hier soir, tu saurais que je l'ai ramenée chez moi après le boulot.
Michael A. ne cache pas sa surprise et s'esclaffe bruyamment.
- Ah ! Alors toi, mon salaud ! Jamais là où on t'attend, hein ?
Lucas L. esquisse un sourire et attrape la dernière caisse, qu'il porte en ahanant jusqu'au bord du wagon. Son collègue attrape la télécommande du tapis roulant et fait défiler une vingtaine de nouvelles caisses prêtes à être chargées. Il lisse les plis de son haut de combinaison gris sombre avant d'en saisir une.
- Bon, bah vas-y, raconte !, le pousse Michael A., impatient.
- Si tu savais, mon vieux, j'ai pas été déçu, raconte Lucas L. en s'étirant avec un grand sourire. De tous les côtés, j'ai été servi comme jamais. Et puis, pour une gamine de dix-sept ans, pas farouche du tout ! Je te jure, j'ai pu essayer ce que je voulais, elle a pas rechigné une seule fois !
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Synthétique - Saison 1
Science FictionDans un futur indéfini, dans un monde où la guerre fait rage, Lucas L. travaille pour Zhanshi, une importante multinationale. Internet est devenu secondaire, laissant place à une technologie capable de matérialiser le virtuel.