Chapitre 1 - Dures séparations

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Je m'étais promis que je ferais de mon mieux pour protéger toute ma famille, mais au fond de moi je savais qu'en cette période de guerre ça ne servait à rien de prier pour que rien ne leur arrive. J'avais même entendu parler de villages détruits, d'habitants du Rohan massacrés dans les rues de leurs villages ou même dans leurs propres maisons. Et pourtant, même avec tout ça, je ne m'étais pas méfiée. Alors quand les Orques sont arrivés dans mon village à moi, je n'ai rien pu faire pour défendre les membres de ma famille. Après tout, on m'avait déjà dit que les femmes qui n'apprenaient pas à manier l'épée mouraient par elle, et c'est ce qui est arrivé à mes deux sœurs, toutes deux plus jeunes que moi, et à ma mère. Moi, je m'étais exercée de mon mieux, du moins depuis que j'étais en âge (d'après moi) de manier une épée, allant et marchant seule dans les plaines jusqu'à être hors de vue de mon village. Et là, seule au monde, infiniment tranquille, je m'entraînais. Presque quotidiennement, une heure chaque jour, et non plus, parce que je devais aussi aider ma mère, mon père et mes sœurs à gérer notre petite ferme, et à s'occuper de notre cheval.

J'ai dit que c'était parce qu'elles ne savaient pas manier l'épée que mes sœurs et ma mère étaient mortes, mais c'est probablement faux. Après tout, même si moi je savais à peu près la manier, je n'avais pas pour autant survécu grâce à ça. Ma mère m'avait simplement ordonné, en voyant la mare d'Orques se déverser sur les flancs de la colline derrière laquelle a toujours été abrité notre petit village, de chevaucher jusqu'à Edoras sur Natturel et d'avertir le Roi de tout ce qui se passait au Rohan. Je lui ai répliqué :

- Mère, d'autres ont déjà dû l'avertir... Je veux rester, je ne peux pas tous vous abandonner !

- Non, surtout, ne te préoccupes pas de nous et pars !

Alors finalement, je lui ai obéi et je suis partie. Lorsque je me suis retournée, un peu à l'abri derrière un bosquet d'arbres minces, j'ai simplement vu mon village ravagé par les flammes. Et également quelques fuyards rattrapés et massacrés par des Orques. Des Orques sur le casque desquels j'ai cru apercevoir une main. Une main blanche. Le symbole de Saroumane, si c'était bien ce que je pensais.

Oo0oO

Maintenant, je me suis considérablement rapprochée d'Edoras, la capitale du Rohan. Il faut dire que Natturel est très endurante et plutôt rapide, et en considérant la vitesse à laquelle elle a galopé et la distance qui sépare (non, qui séparait, il n'existe plus désormais) mon village d'Edoras, je dois être à quelques heures de la capitale. Alors je la félicite pour ses efforts et je lui permets, enfin, de s'arrêter près d'un petit ruisseau, pour qu'elle puisse se désaltérer et se reposer. Il faut qu'elle reprenne des forces pour les quelques heures qu'il nous reste encore à parcourir.

J'enlève la selle du dos trempé de sueur de ma petite jument, je lui ôte également sa bride et je me mets à marcher, essayant de toutes mes forces de dégourdir mes jambes. Je n'aurais peut-être pas dû rester si longtemps en selle, mais la peur qui m'emprisonnait était bien plus forte que la voix de ma raison, qui m'ordonnait quant à elle de mettre immédiatement pied à terre et de laisser souffler Natturel.

Je murmure à ma jument, après l'avoir laissée tête basse quelques minutes :

- Allez ma belle, nous avons encore quelques heures de route avant d'atteindre notre destination. Alors il faut repartir maintenant.

J'ajoute quelques secondes plus tard, un ton plus bas encore :

- Je suis vraiment désolée...

Et après l'avoir ressellée et rebridée, en ne sachant toujours pas à qui je m'étais adressée, je la remets au galop et, alors que la nuit s'empare peu à peu du Rohan, je me dirige à vive allure vers Edoras.

Oo0oO

C'est seulement le lendemain matin, que j'atteins Edoras, après avoir fait une pause de quelques heures pendant la nuit, pas pour dormir mais au moins pour me reposer un peu avant de reprendre la route. Et quelle n'est pas ma surprise lorsque je vois une longue colonne de cavaliers galoper dans ma direction, sortant de la ville. Ils ne paraissent pas agressifs, mais je cherche quand même des yeux un endroit où me cacher. Après tout, dans mon état de fatigue et celui de ma jument, si ce sont là des hommes aux mauvaises intentions, nous n'aurons strictement aucune chance de nous en sortir. Puis je me résonne. Après tout, autant d'hommes formant une colonne si ordonnée ne peuvent logiquement pas avoir de réelles mauvaises intentions. Et je vois désormais des bannières du Rohan portées par plusieurs de ces cavaliers. Devant cette « armée » à l'air officiel, je reste d'abord interdite, puis je remets Natturel au galop et me dirige vers ces hommes à cheval. Peut-être peuvent-ils m'aider... Peut-être sont-ils proches du Roi...

Celui qui semble être le chef de cette petite armée paraît étonné de me voir et arrête la colonne d'un bref mouvement de bras. Il m'attend et lorsque je parviens enfin devant lui, son air surpris s'accentue.

- Que fais-tu si loin de ton village, jeune fille ? me demande-t-il. Tu ne parais pas être d'Edoras.

C'est vrai que ma petite taille dévoile assez peu mon âge (j'ai vingt ans), et c'est vrai aussi qu'avec mes cheveux probablement ternes et sales, de même que ma peau et mon visage doivent l'être, je dois vraiment faire peur à voir. Et il est donc assez logique qu'il en déduise que je ne suis pas d'Edoras.

Je me retiens de justesse de répliquer que je ne suis pas vraiment une jeune fille, mais plutôt une jeune femme, et au lieu de répondre cela, je réponds ceci :

- Ne savez-vous donc pas ce qui se passe au Rohan ? Beaucoup trop de villages sont brûlés, beaucoup trop de gens sont massacrés, et trop de...

Il ne me laisse pas finir et dit d'une voix très sèche :

- Je sais ce qui se passe au Rohan, jeune fille. Tu ne me l'apprends certes pas. Mais tu n'as pas répondu à ma question : que fais-tu si loin de chez toi ?

- Vous ne l'avez donc pas compris lorsque je vous ai décrit ce qui se passait au Rohan ? (Je ne peux m'empêcher de le railler.) Je n'ai plus de village, et plus de chez moi. Je venais en informer le Roi, ainsi que de tout ce qui se passe dans son pays.

J'ai essayé d'empêcher ma voix de fléchir, mais apparemment j'ai échoué, puisqu'il pousse un léger soupir, sans paraître prendre en compte ma raillerie, puis reprend :

- Le Roi ne vous aurait pas répondu, ni même écouté.

Je ne pose pas de question, devant l'air las de ce chef militaire, qui soudain m'interroge de nouveau :

- Et comment vous nommez-vous, jeune fille ?

- Elianor. Je viens de l'Ouestfolde.

Je le devance de sa prochaine question.

- Eh bien, jeune Elianor, rendez-vous au château d'or de Meduseld, et demandez-y dame Eowyn. Elle prendra soin de vous, comme je la connais.

Je me retiens de justesse de répliquer que je n'ai pas besoin qu'on prenne soin de moi, une fois encore, et je me contente d'incliner la tête et de faire partir Natturel au petit trot en direction d'Edoras, pour qu'elle se fatigue moins vite (certes, fatiguée, elle l'est déjà, mais autant éviter qu'elle ne s'effondre, je pense...).

Lorsque je passe dans la grand-rue de la ville, tous les visages se tournent vers moi. Certaines personnes affichent un air très méfiant, d'autres sont simplement étonnés. Je n'ai aucune idée de ceux qui me blessent le plus, parmi tous ces gens anxieux : ceux qui se méfient de l'une des leurs, ou ceux qui paraissent surpris de me voir passer, comme si plus personne ne venait dans cette ville...

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Merci beaucoup d'avoir pris le temps de me lire !! J'espère que ce chapitre vous aura plu...

Mais ne vous attendez tout de même pas à une publication très régulière, il faut bien que j'écrive mes chapitres avant de les publier, et comme j'ai la très fâcheuse manie de les écrire au jour le jour, ça fait que quand je n'ai plus d'inspiration, les chapitres peuvent beaucoup tarder... Encore désolée pour ça... :(

(Histoire déjà publiée sur Fanfiction.net, mais sous un autre pseudo, simplement parce que le pseudo que j'utilise sur ff.net était déjà pris ici...)


A la Croisée des Chemins ~ Eomer Fanfic' ~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant