Partie 1: Découverte, chapitre I: Les Portes

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Il est dans ce monde, une place pour chaque chose. Et chaque chose est à sa place. Et c'en est de même pour les individus. L'humanité a beau se vanter d'être différente des animaux il n'en est rien. Autant pour eux que pour les hommes, la loi du plus fort domine, prédomine même. Et ça, pour toujours. Prenons un environnement, simple et propice au débordement de haine, de moquerie et de manque de pouvoir. Oui, bien évidemment, une cour d'école. Au coeur de Cold City, ville la plus peuplée et capitale de Lasaitasuna, un monde bien étrange où la loi du plus fort règne en sous-marin. En effet, dans ce monde, chacun est à sa place et s'en contente. Les forts au-dessus, les faibles en-dessous. Mais le mot faible englobe beaucoup de chose non? N'est pas faible celui qui a besoin de frapper pour montrer sa dominance? N'est pas faible celui qui a besoin de puissance? N'est pas faible celui qui est imbu de lui-même? Cette façon de penser certes noble est affiliée à un groupe de personnes qu'on appelle les anormaux. L'anormalité est quelque chose de spécial en Lasaitasuna. Les habitants ne savent toujours pas si c'est génétique, aléatoire, si on le devient, rien n'est connu. Ils savent uniquement que cette anormalité pousse les gens à remettre en cause l'ordre établi dans leur doux monde, leur monde si "parfait". Mais bien heureux sont les simples d'esprits, les anormaux ne représentent que 3% de la population mondiale, selon le dernier recensement effectué.

Cependant, un endroit sort de l'ordinaire, oui cette école dont j'ai parlé plus tôt. École la plus malheureusement célèbre de tout Lasaitasuna. Non pas pour son taux de réussite. Non pas pour son niveau scolaire au-dessus. Ni pour sa qualité culinaire d'ailleurs mais bien pour son nombre d'anormaux présents au même endroit. Nous sommes 5. Oui, je dis bien nous car je suis l'un d'entre eux. Après tout qui de mieux qu'un anormal pour vous parler d'eux? Pas un normal en tout cas. Je m'appelle... Ça n'a que peu d'importance, faîtes comme la populace grouillante qui m'appelle le Riz ou la chose à roulette. Les adolescents ont visiblement beaucoup d'humour vu les surnoms qu'ils donnent à un anormal en fauteuil roulant et qui mange beaucoup. Je vous le jure, de vrais génies. Mes "amis" quant à eux, sont appelés: le pédophile, pour sa visible attirance pour les petites filles - ils auraient pu trouver pire vue sa peau noire. Le sein, pour son amour envers cette boule de chair ou parfois le travesti sans raison apparente. Le benêt, pour sa gentillesse, en effet ce roux(qui fulmine d'ailleurs car selon lui il est brun..) malgré la haine que les normaux lui vouent, persiste à aider et apprécier tout le monde. Trop bon, trop con, comme on dit. Enfin, le dernier anormal qui ne fait pas partir de mon entourage. Après tout, il n'a pas d'entourage. De deux ans notre cadet, du haut de ses 15 ans, c'est un réel génie, vu comme un nouveau Einstein et apprécié par tout le corps professoral mais encore plus haï par ses pairs tant pour son intelligence hors-norme que pour son anormalité. Surnommé le fou il n'est pas rare de l'apercevoir avoir des épisodes paranoïaques dans son petit coin. Comme vous l'avez sûrement remarqué si votre Q.I est supérieur à celui d'une huître, nous avons tous une tare. Peut-être une manifestation de notre anormalité ou juste une conséquence psychotique suite au rejet que nous avons toujours vécu. Revenons-en à moi-même. Forcé à traîner avec le pédophile, le benêt et le sein, étant donné que c'étaient les seuls à ne pas me haïr ici présent, j'avais fini par me complaire dans cette non-vie qu'était la mienne. Elle était presque à.. Je n'eus pas le temps de finir ma pensée. En effet alors que je réfléchissais au conséquences de la vie, de la mort, de la recrudescence de singe dans mon établissement scolaire, l'un d'eux s'était justement approché de moi et m'avait arraché mon bol rouge fétiche des mains, pour renverser ma nourriture sur le sol. Riant à gorge déployée, il agitait mon bol vide devant moi "Bah alors le riz? On fait un régime? T'es déjà en sous-poids avec ce que tu manges ça serait bête de te priver non?" Encore des moqueries. Je ne sourcillais même pas, c'était tellement futile, que je m'étais bien trop habitué. Devant mon manque de réaction, le grand singe blond du nom de Tobias, me mit un coup du dos de sa main sur la joue. Toujours impassible, je passais ma main sur la zone meurtrie. Ca faisait mal, certes, mais je n'allais pas donner à ce singe la satisfaction de me faire tressaillir. Je suis au-dessus de ces animaux. Et alors qu'énervé, il s'apprêtait à me frapper à nouveau lorsqu'il se retrouva à son tour au sol, une pierre lui ayant percuté le visage. Le lanceur était inconnu, cependant un peu plus loin, le fou rigolait, jouant avec des pierres. Je m'en foutais un peu au fond, l'essentiel était que ce singe avait aussitôt détalé et que mon bol était toujours entier. C'est bien les normaux ça. Un coup, et ça fuit. Pathétique. Mes 3 compères me regardèrent l'air inquiet mais d'un beau et tendre "Ta gueule" je leur fis comprendre que leur pitié ou leur inquiétude était la dernière chose dont j'avais besoin.

La journée passa bien vite après cet épisode bien trop normal. Ma vie se limitait à ça. Manger et être persécuté. Allongé sur mon lit, je fixais mon fauteuil roulant à ma droite, un air grave sur le visage. Je poussais un dernier soupir avant de m'endormir, une seule pensée en tête. "J'aimerais tellement avoir un monde à mon envergure." Une voix vint cependant briser mon sommeil "Et si c'était possible?" murmurait-elle. Me réveillant en sursaut, je pris une grande inspiration en ouvrant les yeux. Sûrement un mauvais rêve pensais-je. Cependant je réalisais bien vite que non. Mon lit n'était plus mon lit. J'avais fini dans une salle totalement noire qui semblait comme.. irréelle. Hors du temps. Devant moi se trouvait 5 portes, portant chacune un symbole. Mais ma stupeur atteint finalement son paroxysme lors qu'inconsciemment, je m'étais mis debout. Après 17 ans d'infirmité, je me mettais à rêver que je marchais dans une sale aussi glauque. Vraiment étrange, mes rêves. Ce .. "Ce n'est pas un rêve!" hurla une voix rauque semblant venir de partout et nul part à la fois. Je sursautais puis tournais sur moi, cherchant vainement l'origine de cette voix. Rien. Nada. Personne. J'étais visiblement seul ici. Prenant une grande inspiration, je me mis cependant à parler à voix haute:

- Ahem.. Salut? Il y a quelqu'un ou bien c'est juste un r..

- Ce n'est pas un rêve. Et dire qu'on traite le benêt de con, en comparaison, t'as l'air bien attardé toi.

- Le benêt? Mais vous êtes qui et comment vo..

- Appelle moi Dieu si tu veux. Bon je vais te faire gagner du temps. Non je ne compte pas arrêter de te couper la parole. Et oui si t'es ici c'est parce que t'es anormal. Maintenant que j'ai répondu à tes questions propres à un humain attardé, laisse moi t'expliquer, pourquoi tu es ici. Vous autres, les anormaux, êtes faits, comme moi, pour régner. Cependant chacun doit découvrir son monde, sa destinée. Et moi, je suis là pour t'envoyer chez toi. Ton vrai chez toi. Comme tu vois il y a des portes devant toi. Quatre ont déjà été utilisées par tes comparses scolaires. Trouve ta porte. Trouve ton destin, et on se reverra sûrement un jour, cher Rhice."

Un souffle sembla s'engouffrer dans la pièce. Un vent plus que violent m'entourant. Je restais cependant totalement impassible. Sur mon bras droit apparut une inscription, comme tatouée. "Khing Auf Rhice". Je n'y prêtais presque pas attention. Moi qui avais toujours eu une vie monotone, morose, ennuyante. Voilà enfin du piment. Voilà enfin ce que j'avais, au fond, toujours désiré. Je m'avançais lentement vers les portes, les scrutant. La vérité m'apparut bien vite. Le riz. Khing auf Rhice. Il était logique que la porte du milieu et son symbole représentant un grain de riz étaient pour moi. Affichant pour la première fois de ma vie un sourire, j'ouvris la porte, révélant un gouffre noir visiblement sans fin. Je ne réfléchissais pas plus longtemps. Je m'y jetais corps et âme. Destin, prépare toi, le Riz est proche.

KhingsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant