Le froid est violent, il lui donne affreusement mal à la tête. Ses sourcils sont froncés, il n'y a plus cet air enfantin sur son visage, mais celui d'un être enragé, prêt à te sauter dessus pour une simple maladresse. Dans le coffre de sa voiture, il jette son sac. Dehors le vent est glacé, comme son sang, les branches d'arbre craquent sous le vent, laissant s'échapper le bruit d'une cassure, d'une brisure, d'une rupture.
Derrière sa fenêtre elle l'observe. Elle a le regard sombre et les yeux secs. La mâchoire contractée, c'était comme si elle s'était préparée à cette scène. Lui qui s'en va, elle qui reste. Ce n'était pas la première fois. Mais ça faisait toujours quelque chose à son cœur soi-disant de pierre. Il y a les nerfs qui explosent, une porte qui claque, le bruit des pneus qui dérapent, sa main qui passe dans ses cheveux, les ongles rongés, et la solitude. Mais pas de larme, plus de larme.
Il l'avait regardé une dernière fois, puis était parti. Il se rappelait d'avant quand c'était simple et beau, quand les sentiments n'étaient pas destructeurs, quand la possessivité ne leur brûlait pas la peau, quand c'était juste une question d'attirance et de jeu de séduction. Son regard tourné vers la route, c'était comme si tout le chemin qu'il avait parcouru n'existait plus. Comme s'il avait fait un énorme pas en avant, pour en faire des millions en arrière. Il a alors passé la main dans ses cheveux et a hurlé son désespoir entre les quatre vitres embuées de sa voiture.
A sa bouche, une cigarette, dans sa main un verre à moitié rempli d'un alcool fort, assez fort pour lui faire oublier. Chacun a son remède contre la peine, certains hurlent, certains pleurent, certains contiennent et puis explosent, d'autres préfèrent se détruire encore plus qu'ils ne le sont. Dès le début elle a su, elle savait que c'était dangereux. C'est quand elle l'a vu, elle a su qu'elle l'aimerait comme jamais, qu'il lui en faudrait peu pour tomber follement et abondamment amoureuse de lui. C'était risqué, elle s'est mainte et mainte fois remise en question, mais elle s'est jetée dans le vide en se disant qu'elle vivait déjà dans la souffrance, que jouer avec le feu ne lui fait pas peur, qu'après tout, l'amour peut être beau parfois.
Aujourd'hui elle s'est brûlée, et lui aussi. Ils ont mal. Ça leur pique le cœur, leur serre le ventre, ça les rends dingues, furieux d'aimer autant quelqu'un. Tellement fort, intensément, éperdument, ils s'aiment d'une telle puissance que ça les casse, les brise, les rompt. Ça les épuise, les énerve, les détruit.
« Plus on s'aimait, plus on souffrait. On a essayé de lutter, on a échoué. Aujourd'hui elle me manque, terriblement, mais c'est surement mieux comme ça, mieux pour elle. J'ai mal, moins qu'avant, mais toujours. »
Amour destructeur.