LE PARFUM DE LA DAME EN NOIR ***
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Gaston Leroux
LE PARFUM DE LA DAME EN NOIR
(1908)
Table des matières
I Qui commence par où les romans finissent. II Où il est question de l'humeur changeante de Joseph Rouletabille. III Le parfum. IV En route. V Panique. VI Le fort d'Hercule. VII De quelques précautions qui furent prises par Joseph Rouletabille pour défendre le fort d'Hercule contre une attaque ennemie. VIII Quelques pages historiques sur Jean Roussel-Larsan-Ballmeyer. IX Arrivée inattendue du «vieux Bob». X La journée du 11. XI L'attaque de la Tour Carrée. XII Le corps impossible. XIII Où l'épouvante de Rouletabille prend des proportions inquiétantes. XIV Le sac de pommes de terre. XV Les soupirs de la nuit. XVI Découverte de «L'Australie». XVII Terrible aventure du vieux Bob. XVIII Midi, roi des épouvantes. XIX Rouletabille fait fermer les portes de fer. XX Démonstration corporelle de la possibilité du «corps de trop»! Épilogue
À Pierre WOLFF
En souvenir affectueux de notre ardente collaboration en cette année qui a vu éclore Le Lys.
GASTON LEROUX
I Qui commence par où les romans finissent.
Le mariage de M. Robert Darzac et de Mlle Mathilde Stangerson eut lieu à Paris, à Saint-Nicolas-du-Chardonnet, le 6 avril 1895, dans la plus stricte intimité. Un peu plus de deux années s'étaient donc écoulées depuis les événements que j'ai rapportés dans un précédent ouvrage, événements si sensationnels qu'il n'est point téméraire d'affirmer ici qu'un aussi court laps de temps n'avait pu faire oublier le fameux Mystère de la Chambre Jaune... Celui-ci était encore si bien présent à tous les esprits que la petite église eût été certainement envahie par une foule avide de contempler les héros d'un drame qui avait passionné le monde, si la cérémonie nuptiale n'avait été tenue tout à fait secrète, ce qui avait été assez facile dans cette paroisse éloignée du quartier des écoles. Seuls, quelques amis de M. Darzac et du professeur Stangerson, sur la discrétion desquels on pouvait compter, avaient été invités. J'étais du nombre; j'arrivai de bonne heure à l'église, et mon premier soin, naturellement, fut d'y chercher Joseph Rouletabille. J'avais été un peu déçu en ne l'apercevant pas, mais il ne faisait point de doute pour moi qu'il dût venir et, dans cette attente, je me rapprochai de maître Henri-Robert et de maître André Hesse qui, dans la paix et le recueillement de la petite chapelle Saint-Charles, évoquaient tout bas les plus curieux incidents du procès de Versailles, que l'imminente cérémonie leur remettait en mémoire. Je les écoutais distraitement en examinant les choses autour de moi.
Mon Dieu! que votre Saint-Nicolas-du-Chardonnet est une chose triste! Décrépite, lézardée, crevassée, sale, non point de cette saleté auguste des âges, qui est la plus belle parure de la pierre, mais de cette malpropreté ordurière et poussiéreuse qui semble particulière à ces quartiers Saint-Victor et des Bernardins, au carrefour desquels elle se trouve si singulièrement enchâssée, cette église, si sombre au dehors, est lugubre dedans. Le ciel, qui paraît plus éloigné de ce saint lieu que de partout ailleurs, y déverse une lumière avare qui a toutes les peines du monde à venir trouver les fidèles à travers la crasse séculaire des vitraux. Avez-vous lu les Souvenirs d'enfance et de jeunesse, de Renan? Poussez alors la porte de Saint-Nicolas-du-Chardonnet et vous comprendrez comment l'auteur de la Vie de Jésus, qui était enfermé à côté, dans le petit séminaire adjacent de l'abbé Dupanloup et qui n'en sortait que pour venir prier ici, désira mourir. Et c'est dans cette obscurité funèbre, dans un cadre qui ne paraissait avoir été inventé que pour les deuils, pour tous les rites consacrés aux trépassés, qu'on allait célébrer le mariage de Robert Darzac et de Mathilde Stangerson! J'en conçus une grande peine et, tristement impressionné, en tirai un fâcheux augure.