Ma vie en éclat

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J'accroche la dernière guirlande lumineuse à ma fenêtre, puis je m'assois sur mon lit. Nous sommes déjà en décembre. C'est fou comme le temps passe vite. J'ai l'impression qu'hier encore, j'étais sur la plage de Miami, à bronzer avec mes copines. Je jette un coup d'œil par la fenêtre, et j'observe silencieusement la vue. La tombée de la nuit, la neige et la grande Tour Eiffel illuminée, plantée là, c'est magnifique. Je sors mon appareil photo, et prend plusieurs clichés. Puis, je prends une photo panoramique avec mon téléphone portable, et la poste directement sur les réseaux sociaux. J'ai beaucoup de chance d'habiter une ville merveilleuse comme Paris, et j'en ai conscience. Petite, j'ai énormément voyagé, à cause du travail de mon père. Puis, lorsque j'avais quatorze ans, mes parents se sont séparés, et je me suis installée à Paris avec ma mère. Mon père, quant à lui, à continué à traverser le monde en permanence, et m'a complètement négligée. Peut être m'a-t-il rendu visite une ou deux fois depuis que je vis ici, et je lui en veux beaucoup. Mais comme beaucoup d'enfants, je crois que je dois faire avec. Je crois pouvoir dire que je suis en colère contre lui, mais je ne le déteste pas. D'ailleurs, s'il était amené à revenir, je lui pardonnerai tout de suite. Mais pour le moment, c'est grâce aux deux photos scotchées au dessus de mon bureau que j'entretiens son souvenir. Un papa parfait, et une petite fille toute aussi parfaite. Un tintement me sort de mes pensées nostalgiques. La photo que j'ai postée il y a quelques minutes vient d'atteindre plus d'une centaine de likes. Comme les ados disent aujourd'hui je suis plutôt populaire. Au lycée, j'ai ma place de princesse qui, je dois le dire, ne me déplait pas. Pourtant, tout ça, toute cette superficialité, ça n'est pas moi. Je passe le plus clair de mon temps à jouer ce rôle de diva, qui ne me correspond absolument pas en réalité. J'ai à peine le temps de regarder les commentaires, que ma mère m'appelle pour le diner.

Je descends tranquillement vers la salle à manger, quand j'entends soudainement un fracas. Nala, mon petit labrador blanc tout bouboule, n'a semble t-il pas encore comprit le principe de l'escalier. Maman me l'a offert il y a quelque mois, pour mon anniversaire, certainement pour se faire pardonner de l'absence de papa. Je sais bien moi, que ce n'est pas de sa faute, mais j'ai l'impression que ma mère culpabilisera toujours d'avoir épousé un idiot. Je prends Nala dans mes bras, et en prenant cette voix agaçante qu'ont les gens quand ils parlent à leurs animaux de compagnie, je lui chuchote à l'oreille : « Qui c'est le gros toutou qui va manger avec Maman ? ». Oui, c'est ridicule, je sais, et alors ? Et puis tout à coup, Nala aperçoit une minuscule araignée sur la rampe. C'est bêbête un chien à cet âge, alors elle saute, et j'essaye de la rattraper d'une main pour le poser au sol. Mais elle bascule par-dessus mon épaule, et elle a beau être encore toute jeune, ses 35kg me poussent en arrière. Je lâche alors un cri, ma tête cogne contre une marche et puis plus rien. Pendant quelque minute, je me bats pour rouvrir mes paupières. J'y parviens rapidement. Ma vision n'est pas nette, mais je vois ma mère attraper le téléphone, et mon chien me secouer. Pourtant je ne le sens pas, mon corps est inerte, et je rebascule dans le noir total. J'entends des cris, des pleurs, des sirènes, des gens qui parlent, et puis tout devient silencieux.

Je me réveille dans un lit. J'ouvre la bouche mais aucun son n'en sort. Je n'entends pas le son de ma voix. Je me lève, le souffle coupé, et je m'écroule par terre. J'appelle à l'aide, et cette fois les sons sortent de ma bouche. Mes cordes vocales vibrent dans ma gorge et ça me fait tout bizarre. Un homme en blouse blanche accourt aussitôt vers moi.

- Que t'arrive-t-il ma grande ? Ah ! Mais je vois que tu as repris tes esprits ! C'est bien mais ne force pas trop sur le physique pour le moment. Reste au lit.

C'est en voyant l'air d'incompréhension qui se dessinait sur ma figure qu'il a comprit.

- Je suis le docteur Johnstein, reprit-il. Je suis de garde ce matin. C'est une belle chute que tu nous as fait hein !

- Excusez-moi, où... où suis-je ? demandais-je doucement.

- Au centre hospitalier de Staleford, tu ne te rappelles pas ? Tu as été transportée d'urgence hier soir.

- Non... Je ne m'en souviens pas, repris-je après un silence. Où est ma mère ?

- Plus loin, dans la salle d'attente. Prend ça, dit-il en me tendant une pilule rose. Je vais la chercher.

Mémoires d'une fille sans mémoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant