Chapitre 4

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La tête roula devant lui, frôlant ses pieds, sans qu'il n'y prête attention. Des goutes de sang vinrent éclabousser ses bottes. Il me fixait, ses yeux noirs s'écarquillant de surprise à mesure qu'il me détaillait. D'un seul bras, il redressa son épée ensanglantée, et tous les muscles de son torse se bandèrent à travers son haut noir. De la sueur coulait sur son visage basané, si bien que ses courts cheveux bruns semblaient collés à son front. Rien dans ses traits n'indiquait un quelconque sentiment de culpabilité, ou de regret. Un corps sans vie était étendu à ses pieds, et cet homme ne semblait pas s'en soucier. Un garçon avec des rêves, des espoirs, sûrement une famille ; tout cela s'était éteint avec lui. La malfaisance de ces hommes des terres au-delà du Grand désert semblait sans limites, et s'étendait aussi vite que la flaque de sang sur le sable, à l'image de ma rancœur.

Je plissais les yeux, sentant la colère monter en moi. De quel droit se permettait-il de tuer, ainsi ? Etait-il un Dieu ? Un être supérieur ? Je n'en croyais rien. Pas avec sa tête d'abruti finit, ou j'arrêtais de croire en Dalakhani. L'homme s'avança vers nous – je notais qu'il n'avait pas rangé sa lame – et s'arrêta à quelques mètres de moi, à une distance respectueuse de Kheith.

En l'observant mieux, je m'aperçu qu'il était beaucoup plus jeune que ce que je croyais : un garçon, tout juste devenu un homme. Il devait à peine avoir vingt automnes, et pourtant la noirceur que je pouvais voir dans ses yeux témoignait d'une âme beaucoup plus vieille. C'était un regard tourmenté, remplit de haine et de tristesse. Celui de quelqu'un qui a grandit trop vite. J'eu une étrange impression de déjà-vu, comme si... un frisson me parcourut de la tête aux pieds, et le mirage disparu, me laissant là, déroutée, vide. Et comme à chaque fois qu'on me prenait par surprise, je me mis sur la défensive.

- T'es qui, grondais-je en croisant les bras sur ma poitrine.

- Je te retourne la question, répliqua-t-il d'une voix égale.

- Tu viens de massacrer un enfant sous mes yeux, et tu crois vraiment que je suis dans les meilleures dispositions à ton égard ? Toi d'abord.

- Ton accent est bizarre, répondit-il simplement, un sourire flottant sur ses lèvres fines. Très... exotique.

- Et ?

- Je ne le connais pas. (Je haussais un sourcil). Et je connais tous les peuples de cette terre.

- C'est pas la modestie qui t'étouffe, toi, cinglais-je.

A mon grand désarroi, il éclata de rire.

- Je ne me vantais pas, c'était une simple observation.

- Si tu veux, soupirais-je en haussant les épaules. Bon, poursuivis-je en me tournant vers Lucian qui fixait le cadavre, blanc comme un linge, on y va, nous.

Je pris la tête, secondée par Kheith, et passait devant le brun sans lui accorder un regard. Je frissonnais en passant près du corps, mais tâchait de ne rien montrer. D'un pas décidé, je me dirigeais vers la forêt que je pouvais apercevoir quelques kilomètres plus loin. Je n'avais pas fais deux mètres que je sentis une pression sur mon bras. Je me figeais. Sa main qui me touchait me dégoûtait, mais j'avais gagné mon pari, et mon passe-droit pour les royaumes des hommes. Je tournais lentement la tête vers lui en tentant d'avoir l'air surprise, et ouvrais la bouche pour parler mais il ne m'en laissa pas le temps. Mon petit jeu semblais avoir marché, puisqu'il m'interrompit d'une voix claire :

- Tu m'intrigues. Je crois que je t'aime bien, poursuivit-il, ses yeux noirs braqués dans les miens. Tu as quelque part où aller ?

Règle numéro un : ne pas lui donner l'impression qu'il est notre seul espoir.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 26, 2015 ⏰

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