Les Ailes du Temps ~ Complot à la Cour du Roi Soleil

Chapitre 7

Gabriel éclata de rire et me confia :

"Que j'ai de la chance ! Tu seras ma belle-mère !
_ Comment ?
_ Je joue Hyppolyte, le fils de Thésée et le beau-fils de Phèdre...
_ Et Phèdre est amoureuse d'Hyppolyte, complétai-je avec un sourire. Et qui joue Thésée ?
_ Epiphaine...
_ Peux-tu répéter ?
_ Et sa sœur sera Aricie."

Il grimaça de dégoût et j'éclatai de rire.

"Quelle tristesse ! Tu vas devoir jouer l'amoureux transi avec Marie-Alice ! C'est tellement drôle !
_ Et toi, se moqua Gabriel, tu seras la femme d'Epiphaine.
_ Oh non !" grimaçai-je.

Gabriel me prit par la main et me conduisit jusqu'à la fontaine de Latone, et nous nous assîmes sur le bord.

"Trêve de plaisanterie ! murmura Gabriel. J'ai besoin de ton avis. Qui serai la personne que les deux malfrats risquent d'enlever ?"

Il me demandait mon avis ? Je n'en avais aucune idée ! A moins que...

"Je pense que Madame de Maintenon est une victime potentielle.
_ Madame de Maintenon ? s'étonna Gabriel. Pourquoi ?
_ Marguerite m'a dit que beaucoup de nobles la détestaient. Peut-être que ça suffit !
_ Je vois."

Gabriel fixa le sol un moment avant de lâcher :

"Il faudrait qu'on la garde à l'œil.
_ La garder à l'œil ? C'est facile à dire. En ce moment, elle reste à Saint-Cyr.
_ Alors elle doit y rester ! fit Gabriel. Il faut que je passe le message à Bontemps.
_ Bontemps ? Qui est Bontemps ?
_ Bontemps est le valet du Roi, m'informa le jeune homme.
_ Mais pas que, devinai-je. Il est bien plus important qu'on ne le croit, n'est-ce pas ?
_ Bontemps, révéla Gabriel, et l'informateur du Roi. En vérité, je ne suis pas vraiment un garde. Je travaille comme espion pour lui.
_ Comme une sorte d'indic' ! m'écriai-je.
_ Une sorte de quoi ?
_ Je dis n'importe quoi, ne fais pas attention."

Gabriel me dévisagea intrigué, avant de secouer la tête.

"Madame de Maintenon restera à Saint-Cyr. Je m'en occuperai personnellement. Maintenant, va te coucher Victoria. Tu dois être en forme pour demain."

Je soupirai et retournai au château. Perdue dans mes pensées, je ne vis pas Epiphaine devant moi et le percutai.

"Aïe ! Mais faites attention ! Victoria ! s'exclama Epiphaine. Ça va ?
_ Oui. Mais attends ! Espèce de saligaud !
_ Victoria, pardonne-moi !
_ Tu veux que je te pardonne ? criai-je. Tu te rends compte de ce que tu m'as dit ?
_ Et j'en suis désolé, assura-t-il en me prenant la main.
_ Tu dis ça à chaque fois, geignis-je, et regarde ! Ça n'a pas changé les choses. Alors laisse-moi !"

Je m'éloignai en vitesse, trop épuisée pour songer à quoi que ce soit. Cette vie était géniale, mais j'aurai tant aimé vivre à la Cour dans d'autres circonstances. J'avais une énorme boule de stress dans le ventre, et je ne cessais d'imaginer ce qui se passerait si j'échouais. Et puis si Mme de Maintenon n'était pas la victime de ce complot, qui cela pouvait-il être ?

Toujours dans mes pensées, j'ouvris la porte de ma chambre et me retrouvai face Marie-Alice, la colère brulant dans ses yeux.

"Euh... Ça va ? demandai-je avec un petit sourire.
_ Vous ! siffla-t-elle en s'approchant de moi. Vous m'avez humiliée.
_ Quand ça ?
_ J'aurai dû danser avec Gabriel ! C'était moi sa cavalière. Et là, vous arrivez comme une fleur et vous me le volez !
_ Je n'ai volé personne ! récriai-je en rougissant.
_ Mon frère a raison, gronda la jeune fille, vous n'êtes qu'une intrigante. Et puis, Gabriel ne vous aime pas ! Lorsqu'il jouera Hyppolyte, il tombera forcément amoureux de moi !
_ Parce que vous êtes Aricie ? gloussai-je. Ce n'est que du théâtre.
_ Eh bien, nous verrons cela !" fit Marie-Alice en tournant la tête.