Journée: Chiante. Moral: Au plus bas.
C'est le weekend, mais je ne veux pas rentrer chez moi. Je sais ce qui m'attend.
En arrivant dans mon village, je dévisage toutes les familles. Comment peuvent-elles être aussi heureuses ? De faux sourires sur leur visage, des gestes affectifs et des regards remplis d'amour... Pff ça me donne envie de gerber ! Avec toutes ces maisons, les unes plus grandes que les autres, on se croirait vraiment dans le quartier de Wisteria Lane des Desperate Housewives. Si seulement ils savaient...
Je me gare dans l'allée de garage et arrête la voiture. Ma petite Twingo tient la route ! Inconsciemment, je sens au plus profond de moi, le stress s'installer. Mon ventre commence à me titiller par spasmes et mon rythme cardiaque s'accélère. Je fixe quelques secondes la porte d'entrée. En lâchant le volant, je me rends compte de la moiteur de mes mains. Je les essuie sur mon jean troué et sors de la voiture. Sois discrète Sky, me rappelle ma conscience, n'ouvre pas ta grande gueule comme tu as l'habitude de le faire ! Je reste plantée sur le seuil de la porte et approche ma main tremblante de la poignée. Ma mère l'ouvre violemment, me prend le poignet et met son doigt devant la bouche pour me demander de ne faire aucun bruit. Elle me tire dans le salon et monte l'escalier. Une fois dans ma chambre, elle me pousse sur le lit et ferme au plus vite la porte comme si sa vie en dépendait.
- Où est-il ? je demande inquiète.
- Il dort. Je lui ai donné suffisamment de bières pour qu'il soit assommé pendant quelques heures.
- Mais maman, si...
Elle met de nouveau, son doigt sur ma bouche et me sourit tendrement. Ce sourire... Elle tente de rester forte mais la peur se lit sur son visage.
- Je dois te parler Sky. Tu dois absolument partir de cette mais...
- Non, non, non, tais-toi, je crie fermement en me levant juste devant elle. Tu ne vas pas recommencer avec ton discours !
- Skyler, c'est pour ton bien. Tu dois partir tant qu'il en est encore temps !
- Je ne veux plus t'entendre, je hurle en la poussant violemment. Tu veux que je quitte cette maison en te laissant ici avec ce connard ?
- Skyl...
- Arrête ! Sors de ma chambre ! Maintenant !
La colère s'empare de moi. Des larmes coulent sur mon visage et je sens leur brûlure sur mes joues. Je me connais. Il vaut mieux éviter le point de non-retour. Trop impulsive, j'ai tendance à m'emporter et faire des choses... stupides, voire dangereuses. Ma mère sort de ma chambre, le regard baissé. Je me passe les mains sur le visage. Il faut que je me calme. J'ai besoin de réfléchir. J'enlève mon tee-shirt sale, baisse mon pantalon et l'enjambe. Je me dirige vers ma commode et choisis mon débardeur violet foncé, mon collant de sport noir, et enfile mes chaussures de couleur identique à mon haut. Devant le miroir, j'attache mes longs cheveux bouclés d'un blanc glacial en queue de cheval haute et y ajoute un petit bandeau noir. Je me fixe. Le fond de teint n'a pas tenu la journée et laisse apparaître mon bleu à l'œil.
Le jogging est le seul moyen pour décompresser. Je m'approche de la fenêtre, l'ouvre en grand et monte sur l'arbre extérieur. Je n'éprouve aucune envie de voir le visage de ma mère attristé et celui du connard totalement ivre. Je saute sur l'herbe et c'est parti pour la course.
Le vent fouettant mon visage est une sensation des plus relaxantes. Certains voisins me disent bonjour, mais je n'ai pas envie de leur répondre, alors je fais comme si je ne les entendais pas. Je suis concentrée sur chacun de mes pas et réfléchis. Ma mère veut que je quitte la maison pour vivre en sécurité et loin du connard. Mais elle s'arrête là. Elle sait pourquoi je ne peux pas: il m'est impossible de la laisser seule avec lui. Pourquoi elle ne comprend pas ça ? C'est pourtant simple ! Elle fait ses bagages et on part toutes les deux dans un autre pays ! Ce n'est pas l'argent qui manque ! Le connard a tout hérité de ses parents milliardaires. Et puis si je quitte ce village, je quitte aussi ma fac. Ce qui ne serait pas si mal... Kévin, le mec le plus populaire de la promo ne me lâche pas d'une semelle. Il a toutes les filles à ces pieds, mais non. Monsieur « je pète plus haut que mon cul » veut une fille qui ne veut pas de lui. Où est la logique ? Je dois être un défi pour lui et dès que je céderai, je ne serais qu'un trophée de plus. Hors de question de lui donner cette satisfaction !
Des voisins tondent, d'autres jardinent ou discutent. Je suis énervée contre tous alors qu'ils ne m'ont rien fait. Je les déteste, mais pourquoi ? Tu es jalouse de leur belle vie, me remémore ma conscience. C'est vrai. Pourquoi ils ont le droit d'être heureux et pas moi ? Pourquoi n'y a-t-il pas de connard dans leur vie comme moi ? Et les enfants, pourquoi ils ont des frères et sœurs ? Tu n'as pas été un enfant désiré, tu as été un accident et un obstacle dans leur vie. Je la fusille du regard. J'aurais tellement aimé avoir un grand-frère pour qu'il puisse me protéger, me réconforter, rire avec moi et être mon confident... Mais le visage du connard me ramène à la réalité. Il sera toujours ce mur dans ma vie qui m'empêche d'avancer. Plus d'une fois j'ai voulu le tuer ou appeler la police, mais c'est impossible. Ma mère ne peut pas se passer de lui. Elle aime être sa putain de bonniche et... Du calme Sky.
Sur le chemin du retour, je croise un homme en train de sortir des cartons de son coffre. Une femme en robe cintrée, sort de la maison et vient l'embrasser sur les lèvres d'un baiser trop chaste à mon goût. Le couple de parfaits petits chrétiens... Encore un qui va me faire chier sur mon comportement trop vulgaire. Je ne vois vraiment pas pourquoi ils disent ça, merde ! En ce moment de d'égarement, mon corps rencontre un obstacle de plomb et je tombe à la renverse. Le choc entre le sol et mes fesses est plus douloureux que prévu.
- Putain, dis-je en tombant sur le sol.
Je relève la tête et voit cet homme. Grand, apparemment bien musclé, des cheveux bruns coiffés en arrière et le petit polo bleu sur ses épaules.
- Tout va bien mon fils, demande l'homme qui continue à débarrasser les cartons.
- Oui père.
« Père » ? Sérieux ? Il porte à nouveau son regard sur moi et fait son plus beau sourire en me tendant sa main.
- Excuse-moi, je ne t'avais pas vu.
- Me touche pas, dis-je en poussant sa main. J'ai pas besoin de ton aide.
Son regard change. Monsieur le parfait chrétien doit être choqué de mon comportement ! Pff, maintenant j'ai mal au cul !
- Tu ne t'es pas fait mal ?
- Qu'est-ce que ça peut te faire si je me suis faite mal ou pas ?
- Euh...
Apparemment mal à l'aise, je passe à côté de lui en le poussant. Pourquoi je me sens obligée de réagir ainsi ? Fière de lui avoir cloué de clapet, je pars pour qu'il ne puisse rien ajouter.
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Sous Tension
ActionSous l'autorité menaçante de son beau-père, Skyler va voir sa vie changer... Elle se retrouve du jour au lendemain, enfermée dans une cellule où elle devra passer plusieurs épreuves pour mériter sa place. Sous tension perpétuelle, elle fera de bon...