Ce matin, je me trouve belle. C'est une des premières fois de ma vie où je dis ce mot, "belle", associé à "je". Le miroir doit être trop bien nettoyé. Je ne laisse jamais ma vie et mon avenir au hasard, ce qui veut dire que si ce matin je sens que quelque chose en moi a changé, c'est que c'est le cas. Et que ce "quelque chose" va bouleverser ma vie. Je suis brune, assez petite, j'ai les yeux verts, des tâches de rousseur et des lunettes. Je ne suis pas particulièrement jolie, mais mon prénom, lui, ne l'est pas DU TOUT ! Mes parents ont eu la superbe idée de m'appeler Jules. Comme un garçon. Ils sont comme moi, ils détestent ressembler aux autres. Ils ont gagné, aucune fille de ma connaissance ne me ressemble. Je suis unique, et peut-être un peu trop parfois. J'ai toujours eu du mal à me faire des amis, ce pourquoi ceux que j'ai sont les mêmes depuis ma tendre enfance. Maisie, une blonde aux yeux bleus, et Louisa, une grande brune à lunettes d'origine thaïlandaise. J'ai rencontré Maisie en petite section de maternelle, nous sommes devenues amies grâce à nos tâches de rousseur, je crois. Quant à Louisa, elle s'était liée d'amitié avec Maisie, parce que cette dernière avait déménagé, me laissant seule. On s'est retrouvées plus tard au collège, Maisie était toujours avec Louisa, et moi toujours avec Maisie. Peu étonnant qu'on ait tissé des liens... Surtout que je suis fille unique. Je n'ai ni frères, ni sœurs, et je suis atrocement seule à la maison. Mes parents travaillent ensembles, ils tiennent un cabinet d'architecture réputé et sont noyés de travail. Ils ont de bons revenus et peuvent donc me laisser seule à la maison avec mon chien, Scott. J'ai toujours voulu voyager en Ecosse. C'est le pays le plus beau qui puisse exister, selon moi. Mais mes parents n'ont "pas le temps, trop de travail". Et moi, du temps, il m'en manque. Il faut que je quitte la maison. Le lycée est à vingt minutes de marche de chez moi, et je vais finir par être en retard. Deux mois que les cours ont commencé, et je suis déjà à bout de nerfs. Je prends mon sac à dos, qui représente des flamants roses sur un fond bleu, sac aussi original que moi, et ma veste. Je sors. Le vent glace mes joues, et je sens le bout de mon nez devenir tout froid. Je grelotte. J'entame alors une marche rapide, aussi bien pour rattraper mon retard, perdue dans mes pensées que pour me réchauffer. Mes cheveux sont incapables de me réchauffer le crâne, j'aurais dû prendre un bonnet. Alors, pour oublier ce froid mordant de novembre, je fouille dans la poche de mon sac et en extrait ma paire d'écouteurs verts et bleus et mon baladeur rose. Hors du commun, eux aussi. Je mets ma musique préférée, celle qui me motive, je veux bien commencer cette énième journée. J'appuie sur lecture, et "Thanks for the memories" de Fall out Boy retentit vivement dans mes oreilles. Je soupire d'aise. C'est si agréable la musique... Malheureusement, au bout de cinq ou six musiques, je suis arrivée. Le vent fait voler les dernières feuilles mortes sur le trottoir. Je suis pile à l'heure, la sonnerie s'acharne à me faire vriller les tympans, comme à son habitude. Mais je sens encore que quelque chose a changé, que quelque chose ne va pas. Pourtant, tout est pareil que vendredi dernier... Mise à part les nuages, rien n'a bougé ! Je me laisse entraîner par la cohue de lycéens qui rentre dans l'établissement. Aucune trace de Maisie, ni de Louisa. Je me dirige alors seule vers les panneaux d'affichage, pour me mettre en quête des noms des professeurs absents aujourd'hui. Mon professeur d'histoire/géographie n'est pas là, et ça tombe bien, je pourrai rentrer plus tôt à la maison. Je l'avais en dernière heure ! Je me dirige vers mon premier cours, je ne souhaite pas non plus être en retard. J'ai mathématiques, et le professeur de cette matière est mon professeur principal. C'est un cours long et ennuyant, je ne peux parler avec personne, le prof me connaît et m'a isolée. Mais aujourd'hui, c'est différent. Je l'avais pressenti. A côté de moi, il y a une fille. Mais pas n'importe laquelle... Une nouvelle ! Chose très rare de par chez moi. J'habite dans une petite ville qui n'a qu'un seul lycée, un collège et une école primaire/maternelle ainsi que quelques commerces, qu'utilisent aussi les habitants des villages voisins. C'est vous dire, une nouvelle, ici... Hallucinant. Mais peu importe, elle est à côté de moi, et tant mieux. Pitié, de la compagnie, enfin ! Comme je suis bavarde, mais timide (je suis assez contradictoire comme fille) je décide de lancer la conversation, histoire de l'accueillir comme il se doit.
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Fathomless
General FictionLE PASSE INSONDABLE D'UNE FILLE SANS NOM - Tu accepterais de me dire au moins ton nom ? J'ai l'impression que c'est une chose énorme que je lui demande, un interdit que je brave... J'ai l'impression que si je n'avais pas posé la question de cette ma...