Fathomless

"Je te fais confiance, ok ?"

Ce matin, tout va bien. Je me réveille avec la chanson "Touch and go" de Ed Sheeran , parfaite pour bien commencer la journée. Je me dépêche de déjeuner, me préparer, je me rends chez le vétérinaire avec maman pour aller voir comment se porte Scott. On y va pour l'ouverture, il ne faut pas que je rate une seule minute de cours, d'après ma mère. Elle a raison ! Je veux pouvoir discuter avec la nouvelle. Je sais qu'elle est avec moi en cours d'allemand, cours dans lequel on peut changer de place n'importe quand et parler à volonté. La prof se fâche tout de même, mais les élèves n'en ont rien à faire. J'enfile rapidement un gilet, ma veste et mes chaussures. J'entends ma mère me héler depuis le bas, il faut se mettre en route. Tant mieux, je suis fin prête. Je grimpe dans la voiture et m'installe sur le siège avant. Je mets le chauffage et la musique assez fort, histoire de bien me réveiller. Je n'ai pas envie d'apprendre que mon chien va me quitter ou autre nouvelle désagréable avant d'aller au lycée, ma journée n'en serait pas améliorée si je peux dire. Mais nous voilà arrivées, et je n'ai pas le temps de me poser trop de questions existentielles avant de rentrer dans la clinique. Je pousse la porte, mais comme d'habitude, il faut tirer. Je sais bien que c'est écrit dessus, mais je suis incapable de lire avant cette petite inscription. Je tiens la porte à ma mère, et me retourne. Et là, je pique un fard. Impossible ! Il est là, à l'accueil, il a l'air de négocier un prix, ou je ne sais pas trop quoi. Le garçon qui a fait fuir Rainbow, pensai-je. Alors, je décide de l'ignorer complètement. Mais manque de chance, il y a la queue pour les consultations matinales, et la salle d'attente est juste à côté de l'accueil. Au secours ! Je ne me suis jamais sentie aussi ridicule qu'à ce moment là. Perdue dans mes pensées, je le dévisage (même s'il est de dos) sans m'en rendre compte. Ma mère me parle mais je ne l'entends même plus. Mais qu'est-ce qu'il fait là ? Je meurs d'envie de lui demander s'il connaît Rainbow. A la fois pour avoir vraiment cette réponse, mais aussi pour avoir un prétexte pour lui parler sans avoir l'air inutile. C'est ma mère qui me tire de mes pensées angoissées en me pressant :

- Jules ! Lève-toi, c'est à nous. Allez !

J'obéis, je comprends tout de suite à son regard insistant que ce n'est pas la première fois qu'elle me demande de me lever. Je rougis à nouveau, persuadée de m'être ridiculisée à vie auprès des personnes présentes dans la pièce, et me presse à l'intérieur de la salle de consultation. J'y retrouve Scott, en bonne santé, prêt à repartir. Alors, j'oublie tout, mes angoisses à son sujet, le beau garçon à l'accueil, les mystères de Rainbow. Tout. Puis je pleure de joie, de soulagement. Il est vivant, et bien portant ! Je le serre dans mes bras, il me lèche affectueusement les joues. Je m'amuse quelques minutes avec lui, comme à notre habitude, puis je constate que le vétérinaire et ma mère nous regardent en souriant, d'un air attendri. Alors, je me relève, et remercie chaleureusement ce vétérinaire miraculeux, car je n'avais pas vu Scott en aussi bonne forme  depuis un moment ! Il me prévient tout de même :

- De rien, ce fut un plaisir. Ce chien est adorable ! Mais il faudra le ménager. Il n'y a pas vraiment de remèdes contre l'âge, et vous vous en occupez bien. Il est maintenant rétabli, il manquait de compagnie. Il n'était pas vraiment dépressif, il voulait... Hum hum... Pardon ! Oui, il voulait attirer votre attention. Je suppose qu'avec les études vous êtes très occupée ?

- Oui... Il peut rentrer avec moi ? demandai-je d'une voix mal assurée, honteuse d'avoir l'air de délaisser mon chien.

- Bien sûr ! il regarde sa montre, rapidement, puis nous sourit et conclut : Au revoir ! Le rendez-vous qui suit va devoir commencer, je pense que le client est ici. Excusez-moi !

Ma mère et moi lui serrons la main. Un homme charmant, vraiment ! Nous nous dirigeons vers la sortie, accompagnées de Scott, lorsque je croise le regard du garçon de l'accueil. Je reste figée, incapable de faire le moindre mouvement. Il sourit, me salue de la main, et se dirige vers moi. Ma mère, qui n'est pas née de la dernière pluie, me souffle qu'elle rentre avec Scott et que je peux me diriger seule vers le lycée, qui est à quelques minutes de la clinique. Sur le moment, je lui en veux de me laisser seule avec l'inconnu. Mais plus tard, je la remercierai ! Il s'adresse d'une voix grave et douce à moi :