Chapitre 11

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JOUR 57 - Sous le charme.
Samedi 25 octobre - Tribeca - 21H30.

Meryl rajusta son pendentif pour se donner une contenance. C'était la dernière fois qu'elle se laissait embarquer dans les idées loufoques de son excentrique colocataire. Une soirée de célibataires, non mais franchement, elle n'était pas désespérée à ce point. Qu'est ce qu'elle pourrait bien leur raconter à tous ces hommes?

« Tu vas voir, c'est des nullos, mais ça t'entrainera à aborder les hommes. Tu n'as qu'à de dire que c'est une mise en pratique intensive! Plusieurs rencontres, plusieurs approches, en un soir! ». Et la voila, totalement mal à l'aise, essayant de s'auto-convaincre de rentrer dans ce fichu bar. Elle avait déjà réfléchi à un scénario lui permettant d'écourter la soirée mais Cassie était pire qu'un détecteur de mensonge. Elle ne s'en sortirait pas comme ça.

-Vous aussi vous hésitez?
Meryl se retourna, le jeune homme semblait tout aussi nerveux qu'elle.
- Oui, les rendez-vous ne sont pas mon fort.

En entrant dans le pub, elle se remémora ses premières rencontres chapeautées par l'infernale Cassandra. « Tout d'abord, les sites de rencontres. Oh non. Créer ton profil va t'apprendre à te mettre en valeur - à vendre la marchandise comme à une foire aux bestiaux- et à savoir quels sujets abordés. Interdiction de mentionner : les enfants, les parents, la politique, la religion, les régimes et le travail plus de cinq minutes! Ensuite, identifier les menteurs! Ca c'est simple. Tout le monde embelli la réalité, il faut repérer ceux qui font carrément dans la science fiction. Ca te servira toujours. Enfin, la première approche et la rencontre!

L'élaboration de son profil avait été un vrai casse-tête. Elle ne savait pas quoi dire et Cassandra refusait toutes ces idées. Si elle ne pouvait pas dire qu'elle faisait du scrapbooking, il était inenvisageable qu'elle prétende faire de la pole dance pour garder la forme. Elles avaient finies par se mettre d'accord sur un profil qui lui correspondait assez bien.
Le pire avait été de sélectionner les profils. Aucun ne lui plaisait, elle ne cessait de les comparer à Dylan et aucun n'arrivait à supporter la compétition. Au bout de nerfs, Cassandra avait finalement choisi pour elle et avait menacé de lui raser les cheveux pendant la nuit si elle n'allait pas aux rendez-vous. La connaissant, Meryl alla à tous les rendez-vous sans discuter, elle arriva même en avance, au cas ou.

Les premières rencontres avaient été catastrophiques. Le premier était aussi timide qu'elle. Ils s'étaient quittés au bout de vingt minutes de silence pesant. Meryl avait prétexté une urgence dentaire, avant de disparaitre, elle avait vu la lueur de soulagement dans les yeux de son partenaire. Cassandra l'avait poussé à accepter une autre rencontre le soir même. Non vingt minutes, ça ne compte pas comme un rendez-vous! Le pas trainant, la jeune femme s'était rendu au Monzo's. Elle qui s'était inquiétée de faire face au silence, elle avait à peine pu en placer une. Il lui avait posé deux trois questions puis il avait embrayé sur sa vie. Surtout sa vie avec son ex. Meryl s'était transformée en psychanalyste de comptoir et s'était ennuyée à mourrir, pendant qu'il se demandait s'il devait oui ou non donner une seconde chance à Angela. A moitié endormie, elle avait acquiescé. Avec un grand sourire, il l'avait quitté pour rejoindre l'amour de sa vie. Le troisième rendez-vous qu'elle avait eu n'avait pas arrêter de lui lancer des regards lubriques sans écouter un traitre mot de ce qu'elle pouvait dire. Enervée, elle avait filer quand il s'était levé pour reprendre une bière.

Au fil des rencontres, si elle n'avait pas trouvé d'hommes dignes d'intérêt, elle était définitivement plus à l'aise et elle passait généralement de bonnes soirées. Clou du spectacle, elle n'avait rien à débourser!
Elle s'installa à une table un peu à l'écart et soupira. Pourquoi avait-elle accepté de venir? Elle avait l'impression de laisser tomber Dylan, après tout, elle n'avait plus de compte à lui rendre. Elle redressa les épaules et scanna le bar. Cassie lui avait appris à repérer d'un seul coup d'oeil les partenaires acceptables. Une présence à sa droite lui fit tourner légèrement la tête.
- Est ce que tout va bien?
Elle fut impressionnée par sa posture, il se tenait droit, la démarche assurée. Elle remarqua ensuite ses yeux bleus, ceux-ci la transpercèrent et elle ne sut plus quoi dire. Le jeune homme devait approché de la trentaine et sa chemise beige lui allait à la perfection, elle se demanda si n'était pas faite sur mesure. Il semblait relativement aisé.

- Je sais, c'est nulle comme approche, dit-il contrit, mais vous aviez l'air vraiment triste. Si vous ne voulez pas en parlez, je ne vais pas vous importuner plus longtemps.

- Non, restez, répondit-elle précipitamment. Excusez-moi, je me demandais juste ce que je faisais ici. Elle ne pouvait décemment pas évoquer Dylan devant lui.

Le jeune homme examina la foule.

- Vous n'êtes pas la seule dans ce cas, la rassura-t-il. Je pense toujours que c'est une bonne idée, jusqu'à ce que j'arrive et que je me semble complètement stupide, avoua-t-il penaud. Il semblai pourtant dans son élément, son anxiété ne se devinait pas.

- Vous venez souvent?

- Ici, c'est la première fois. Mais mes amis en ont marre de mon statut d' « éternel célibataire », il mima des guillemets. Du coup, j'ai eu la chance de participer à des speed dating, des blind dates, et même un sport dating sur une patinoire. Bref, tout ça pour vous dire que vous n'êtes pas la seule à chercher l'âme soeur quitte à se ridiculiser de temps en temps.

Meryl écarquilla les yeux. Cassandra à sa place l'aurait surement qualifié de cucul la praline, mais en grande romantique, Meryl trouva sa remarque magnifique et pleine d'espoir. Il était rare de rencontrer un homme qui avouait croire à l'âme soeur. Dylan, n'était pas un grand romantique. Il savait se montrer charmant, mais la romance n'était pas son fort. Meryl fut troubler de ne sentir aucun pincement au coeur en pensant à Dylan.

- Je vous offre un verre? proposa-t-il, déjà prêt à accuser un refus.

- Oui, si vous voulez. Merci, rougit-elle.

Qu'est ce qui lui arrivait? Elle se rendit compte qu'il n'était pas juste mignon, il était beau surtout quand il souriait.

Ethan était médecin -pédiatre pour être exacte- s'il lui raconta ces divers voyages humanitaires, il ne parla que des gens « formidables » qu'il avait eu la chance de côtoyer et « quelques fois d'aider ». Il ne cherchait pas à se mettre en valeur et posa beaucoup de questions à la jeune femme en écoutant attentivement ses réponses. Deux qualités que Cassandra avait jugées indispensable pour un premier tête-à-tête. Il s'intéressa à sa famille, à sa vie au Kansas, il l'a fit rire et ne regarda aucune autre femme de la soirée. Quand le serveur apparaissait, il semblait agacé et impatient qu'il parte. Meryl était totalement sous le charme. Il était prévenant, respectueux, drôle et irrésistiblement beau. Elle se surprit même à se demander s'il allait l'embrasser, légèrement fébrile.

- Tu ne veux pas un café avant de partir? Ces cocktails peuvent être traitres, s'inquiéta-t-il.

- Oui, volontiers, sourira-t-elle. Si cela lui permettait de rester un peu plus longtemps en sa compagnie.

Le jeune homme héla un taxi et lui tendit une poignée de billets.

- Rentre bien, souffla-t-il à Meryl en s'approchant doucement pour ouvrir la portière du véhicule. 

Elle frissonna et fixa sa bouche. Il déposa un baiser léger sur le coin de ses lèvres et lui souhaita bonne nuit sans la quitter des yeux, en lui tenant la portière, gentleman. Il attendit que celui-ci soit hors de vue pour se diriger vers son propre véhicule. Luther sortit de la ruelle adjacente juste à temps pour voir le bolide filer à toute vitesse. Il avait un mauvais pressentiment. 

La mission secrète de Cupidon Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant