Chapitre 2 : Connerie humaine

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Je me jette à plat ventre sous la voiture. De là, je peux voir un homme sortir de la maison. Il achève les trois cannibales en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, puis regarde à droite et à gauche, sans doute pour s'assurer que la voie est libre. Il s'avance dans ma direction. Mon cœur bat si vite que j'ai l'impression qu'il va l'entendre. Je plaque ma main gauche contre ma bouche et de l'autre je décroche mon pistolet de ma ceinture.

Des tas de pensées se bousculent dans ma tête. Est-ce que c'est lui le miracle que j'ai attendu si longtemps? Ou est-ce qu'il est complètement fou et va essayer de me tuer? Il regarde à peine dans ma direction, comme s'il avait la tête ailleurs et qu'il ne m'avait pas vue. En regardant bien, je crois remarquer qu'il s'appuie plus sur sa jambe gauche que sur la droite. Il doit être blessé. La stratège qui est en moi se dit que ça me donne un avantage sur lui en cas de problème. En même temps, je ne sais même pas me servir de mon pistolet. Je l'ai simplement trouvé sur un soldat mort et ne m'en suis jamais servi.

L'homme arrive devant la voiture. Je ne vois plus que ses chaussures. Je serre mon arme contre ma poitrine, mon cœur bat tellement fort qu'il risque d'exploser.

Et là, de l'eau se met à couler entre ses pieds. En fait non, c'est pas de l'eau. Il est en train de pisser ?! J'étais morte de peur alors qu'il venait juste pisser ? C'est n'importe quoi. Vraiment. En plus ça commence à sentir. J'attends d'avoir entendu sa braguette se refermer pour m'extirper de ma cachette. Je braque mon arme sur ce type qui a l'air beaucoup plus inoffensif, maintenant. Il met instinctivement ses mains en l'air, une lueur d'incompréhension dans ses yeux. 

J'essaie de le regarder sans le voir car j'ai trop peur de me dégonfler si je vois un visage humain et de baisser ma garde trop vite. Malgré tout, je ne peux m'empêcher de le dévisager pendant quelques secondes. Si de loin il avait l'air d'un homme, de près il ne semble pas plus âgé que moi. Mais il fait bien 15 cm de plus que moi et ses épaules sont presque deux fois plus larges que les miennes. Pas de doute, je ne ferais pas le poids contre lui malgré sa potentielle blessure. Mais à la manière dont ses yeux noisettes me fixent, je n'ai pas l'impression qu'il me veuille du mal. Et je n'ai pas envie de lui en faire non plus. Je savais que j'allais finir par me dégonfler. Et puis j'ai cruellement besoin de compagnie. S'il veut me tuer, qu'il le fasse. Plutôt ça que de passer une seule journée de plus toute seule. Je suis sur le point de baisser mon arme lorsqu'il prend la parole d'une voix tendue:

- Je te veux aucun mal, d'accord?

J'ai peur d'avoir oublié comment parler.

- Tu es tout seul?

Le son de ma voix me surprend.

- Oui, il n'y a personne avec moi, t'as rien à craindre. Écoute, je sais que tu me connais pas, mais fais moi confiance, je te ferai rien.

Je baisse lentement mon arme. De toute façon, j'aurais jamais osé lui tirer dessus. J'espère seulement qu'il ne va pas en profiter pour se jeter sur moi, parce que vu la largeur de ses épaules, il a dû être rugbyman dans une autre vie. Alors que moi, je suis taillée comme un petit oiseau. Mais à mon grand soulagement, il se détend en voyant mon arme se baisser et ne tente rien. Il baisse les yeux sur ses jambes et j'aperçois une tâche foncée sur son treillis, au niveau de son mollet droit. Du sang. Il est vraiment blessé. Je me raidis à l'idée qu'il s'agisse d'une morsure. Si c'en est une, je me barre en courant. J'ai pas envie de devoir l'achever.

- Qu'est-ce que tu t'ai fait? je lui demande prudemment en désignant sa jambe.

- Un type m'a tiré dessus il y a deux jours. Mais la balle a seulement frôlé ma jambe, c'est pas très grave. Je me disais qu'il y aurait sûrement de quoi me soigner là-dedans - il désigne la maison dans laquelle il s'était réfugié -, mais j'ai rien trouvé.

Marche Avec Les MortsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant