Le vent faisait vibrer les branches des arbres de la dense forêt qui s'étendait sur plusieurs lieues à l'horizon, au-delà des remparts qui avaient été bâtis autour de la ville de Dianam. On pouvait entendre quelques hiboux hululer au sein de cette flore qui semblait en tout point différente de ce qui entourait Lukas. Il imaginait les animaux, libres de leurs déplacements et de leurs mouvements ; libres de faire ce qu'ils voulaient à n'importe quel moment de la journée ; libre de partir ou de rester. L'oiseau solitaire qui surplombait la forêt à la recherche de son dîner lui plaisait bien, libre comme l'air et indépendant de la volonté d'autrui. Le lapin courant jusque dans son terrier pour y retrouver sa femme et ses enfants lui laissait l'idée du réconfort d'une vraie famille, une idée qui ne le laissait pas indifférent et qu'il enviait également. Et même le plus insignifiant des insectes était au moins mille fois plus chanceux que lui à ses yeux. Ses livres lui avait permis de se rendre compte de la beauté de la nature, bien qu'elle fut critiquée à de nombreuses reprises par scientifiques et chercheurs, jugeant une telle simplicité dans le naturel animal bien trop primaire.
Lukas ferma les yeux un instant, profitant d'une faible brise pour s'évader quelques secondes. Il essayait de ne plus penser à la conscription, à cette épreuve qui pourrait lui coûter la vie, à cette rouquine qui pourrait disparaître à tout jamais. Il passa une main sur son menton imberbe, remontant doucement sur ses paupières qu'il massa légèrement avant de passer sur son front en rouvrant les yeux faiblement. Il repensait à tout ce qu'il avait vécu ici, en compagnie des quelques personnes qu'il pouvait supporter derrière ces épais murs de pierre. Au moins Boris avait survécu. Il avait tellement donné pour s'en sortir un jour qu'il méritait sa réussite... Tout comme Magalianne et Ferrik. Il se demandait pourquoi tous les mages étaient envoyés à l'abattoir de la sorte. Mais par dessus tout, il se demandait pourquoi personne ne faisait rien contre cette oppression.Le vieil homme qui lui tenait compagnie s'approcha doucement de lui, et reprit la parole d'une voix faible mais chaleureuse. "Es-tu prêt, mon garçon ?" Lukas ne répondit pas, il posa une main sur le rebord de la fenêtre, frottant ses doigts sur la pierre froide et laissa un silence peser. La porte ne devait plus tarder à bouger, pour s'ouvrir ou par secousse... Le jeune homme se prononça alors sans bouger, d'une voix sereine. "Nous le verrons bien dans un instant."
Puis la porte s'ouvrit lentement, dans un nouveau grincement. Lukas se retourna, non sans craintes, et aperçu Yvis dans les bras d'un des hommes en robe, sa chevelure rousse lui couvrant le visage. La voix retentit à nouveau, d'un ton tout aussi froid et inerte que précédemment. "Que le cinquième candidat rentre." Il s'approcha alors d'un pas léger, regardant devant lui sans vraiment se rendre compte de ce qu'il voyait. Il se contentait d'avancer vers sa destinée. La distance qui le séparait du Grand Arcaniste réduisait peu à peu, mais chaque pas lui semblait prendre une éternité. Il préférait ne pas imaginer ce qui allait se passer une minute plus tard, voire même une seconde. Ainsi s'arrêta-t-il face au Grand Arcaniste, et il entendit derrière lui les portes se refermer dans un claquement sourd. Le Grand Arcaniste le toisa du regard sans grande émotion, et se retourna pour prendre entre ses mains une grande coupe dorée, sertie de quelques gemmes vertes ; Des émeraudes, à n'en pas douter. Faisant à nouveau face à l'apprenti, il prononça quelques mots avant de lui tendre le récipient."Les arcanes ont un pouvoir défiant les lois du réel. Ainsi, pour contrôler ce pouvoir qui nous est unique, nous devons prouver notre valeur aux arcanes. Ceux qui réussissent héritent du pouvoir de la Magie. Ceux qui échouent offrent leur corps à la Magie."
Puis, le Grand Arcaniste plongea son regard dans celui de Lukas et, après un court temps d'arrêt, il lui adressa quelques mots. "Puissiez-vous réussir et prouver votre valeur." Lukas attrapa alors délicatement la coupe qui lui était tendue, et observa le Grand Arcaniste reculer d'un pas avant qu'il ne reprenne la parole. "Maintenant, Apprenti, buvez et vivez votre destinée." À ces mots, le jeune homme porta l'objet à ses lèvres sans le lever. Il ferma les yeux doucement, prit le temps de souffler un moment et fit couler le liquide présent dans le récipient jusque dans sa bouche. Il avala une gorgée, une deuxième, puis une troisième. Lorsqu'il baissa l'objet et rouvrit les yeux, il n'y avait plus personne autour de lui. Comme si tout le monde avait disparu, il regarda autour de lui avant de se rendre compte que le sol, lui-aussi, avait disparu et qu'il lévitait comme par magie. Sous l'effet de la surprise, il fit un pas en arrière qui le fit tomber dans le vide qui s'était formé sous ses pieds. Sa surprise étant amplifiée, il hurla de toutes ses forces en chutant en arrière, dos au vide et tête vers le plafond qui commençait déjà à s'éloigner.
Par réflexe naturel, il leva les bras vers le ciel comme pour tenter de s'accrocher à quelque chose mais il continuait de s'écraser vers un fond qu'il ne voyait pas. Il finit finalement par s'écraser brutalement sur le dos, dans une énorme douleur qui le prit de partout. Il hurla à nouveau, cette fois de douleur, se tordant dans tous les sens sur le sol froid qu'il venait de heurter. Mais peu à peu, la douleur s'estompait pour disparaître totalement au bout de quelques minutes. Toujours allongé sur ce qui semblait être des pavés de pierres taillées, il reprenait peu à peu son souffle en se passant une main sur le coeur et l'autre sur le front. Il pouvait se demander ce qui venait de se passer, essayant de regarder autour de lui afin de trouver un quelconque indice sur le lieu où il venait littéralement de s'écraser. Peu à peu, il reconnut ce qui lui semblait être une des nombreuses salles de cours de l'académie. De nombreuses tables étaient disposées en cercle autour d'une table centrale. En temps normaux, les élèves s'asseyaient aux tables extérieures et un professeur faisait son cours sur la table centrale. Lukas se releva doucement, se tenant la tête alors que tout lui semblait encore trembler autour de lui, et s'approcha d'une des chaises. En relevant la tête, il vit un homme au centre de la pièce, proche de la table, dos à lui. Le jeune homme plissa alors les paupières pour tenter de reconnaître sa silhouette jusqu'à ce que ce dernier se retourne pour poser son regard froid sur lui. C'était Monsieur Aliom, un professeur d'alchimie et de transmutation que Lukas avait du mal à supporter ; Il était bien trop froid et trop sévère à son goût. Ses longs cheveux noirs comme le charbon tombaient sur ses épaules et dans son dos, tandis que ses yeux, tout aussi sombres, semblaient juger chaque personne qui passait devant lui. Il avait un nez tordu qui lui donnait une apparence encore plus autoritaire. Certaines rumeurs circulaient entre les étudiants, qui allaient jusqu'à dire que, dans sa jeunesse, ce professeur aurait eu des liens avec les écoles de Magie interdites, les écoles touchant à la magie noire. Mais, encore une fois, les rumeurs sont très nombreuses dans le monde, et rares sont celles qui sont vérédiques.
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Vahni : La chute de Farungar
FantasíaDans un monde encore naissant, aux continents tout justes formés et à l'histoire nouvelle, existent des peuples tous plus variés et diversifiés les uns des autres. Leurs histoires et leurs mœurs n'ont, pour la plupart, rien en commun et, pourtant, i...