Chapitre II

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Un silence de mort s'abattit sur la cour du château. Lyra était figée. Elle ne pouvait prononcer un seul mot. Ses pensées se bousculaient dans son esprit. Comment osait-il ? Alombriel n'avait pas le droit ! Quel père voudrait envoyer sa propre fille vers la mort ? Certes il n'était que son père adoptif, mais tout de même ! Elle se sentait perdue. Alombriel détourna le regard. Lui aussi semblait ne plus savoir où il en était. Il s'avança vers Lyra d'un pas hésitant:

" Je te laisses tout de même un choix. Nous savons tous ce qu'encourt cette quête alors c'est à toi de décider. "

C'est bien la peine de me le dire, pensa Lyra avec rancœur. Lui donner la plus périlleuse des quêtes pour ensuite faire croire qu'il ne voulait pas lui faire prendre des risques ? A quoi cela rimait-il ?

- Lyra si tu le souhaites, tu peux rejoindre Evans et Birfaël.

Les spectateurs retenaient leur souffle. Entre une mort quasi certaine et la possibilité de prêter main forte à ses camarades, le choix était vite fait. Pourtant l'elfe semblait hésiter. Elle se mordillait les lèvres avec nervosité, les yeux perdus dans le vide. Tous les regards étaient braqués sur elle et elle sentit les battements de son cœur s'accélérer. Son corps était parcouru de frissons et tout son être lui criait de fuir. Lyra serra les poings, s'efforçant de ne pas tourner les talons.

Le roi ferma les paupières un instant. Il espérait que personne ne voit son incertitude et s'évertuait à garder un air impassible. Personne n'avait jamais pu retrouver la trace de ce lion à part ce jeune garçon, le soir où Althaïa fut partagé en cinq royaumes. Alors comment pouvait-elle, sa fille adoptive, réussir cet exploit ? Il passa nerveusement une main dans ses cheveux grisonnants. Se serait-il trompé ? Alombriel secoua imperceptiblement la tête, comme pour se remettre les idées en place. Il posa ses yeux sur l'elfe qui lui faisait face et croisa son regard gris lourd de reproche.

-Tu as jusqu'à ce soir pour prendre ta décision. »

Ses dernières paroles résonnèrent comme une sentence. Alombriel tourna subitement le dos, descendit de l'estrade et gravit les marches de granit pour disparaître derrière les portes du grand hall.

Il n'y eut aucun mouvement. C'était comme si le temps avait été suspendu. Le public fixait encore la scène avec incrédulité. Une légère brise s'infiltra dans la cour du château, faisant s'agiter les branches des grands chênes. Le doux bruissement des feuilles sembla ramener les esprits à la réalité. Quelques-uns se mirent à chuchoter, puis, un timide claquement de main donna suite à une acclamation générale. Nos jeunes compagnons ne savaient comment réagir et se lançaient des regards déconcertés. Jamais la cérémonie ne s'était déroulée de la sorte. Birfaël descendit brutalement de l'estrade et s'éloigna dans un coin, bientôt suivie des autres.

- Vous en pensez quoi ? De ce qui vient de se passer je veux dire ?

- Il faut avouer que c'est étrange... Evans s'était exprimé d'une voix grave et fixa Lyra. J'espère que tu feras le bon choix...

- Ça ne te regarde pas Evans ! Chirok avait planté ses prunelles dorées dans celles de l'elfe. C'est à elle et à elle seule de choisir.

- Calmez-vous d'accord ! Je suis du même avis que vous, tout cela est étrange. Birfaël et Chirok sont envoyés chez eux et Lyra...Enfin bref. Je sens que quelque chose va arriver et ça ne me plait pas tellement...

- Moi non plus, avoua Birfaël.

- On ne devrait pas rester là, intervint Evans, nous devrions aller participer aux festivités.

Tous le regardèrent avec un air de reproche. D'un autre côté, il avait raison. Ils ne pouvaient pas disparaître dans leur coin et laisser tomber la fête du château. D'un commun accord, ils se dispersèrent dans la foule. 

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