Une lueur rouge et brûlante montait dans le ciel noir sans lune. De tous côtés, les flammes grandissaient, gagnant du terrain sur les plantations de blé. Au loin, d'une petite baraque en bois piégée par les flammes, sortit une femme tenant un enfant par la main. Son visage pâle était couvert de suie et ses longs cheveux noirs en bataille abîmés par le feu.
Les poutres se consumaient, la maison craquait et la jeune femme peinait à rassurer l'enfant. Elle la serra près d'elle, ne sachant par où s'enfuir et leva les yeux. Elle n'eut le temps que de pousser l'enfant et de lui crier avec la force du désespoir " Cours ! " . Dans un craquement, la poutre céda et la petite fille se retourna à l'instant même où sa mère disparaissait sous les décombres. Elle eut envie de pleurer, de crier même, mais elle choisit de courir pour sauver sa peau. Elle tituba et s'écroula à peine quelques mètres plus loin, au bord de l'asphyxie. Elle ne pouvait pas rester là, il fallait qu'elle s'échappe, qu'elle se sauve ! La fillette se mit à ramper de toutes ses forces et parvint à sortir de la zone enflammée... Du moins c'est ce qu'elle crut. Se relevant les habits en lambeaux, elle se trouvait au beau milieu d'un cercle de feu. Les flammes étaient immenses mais elles ne brûlaient rien... Elles ne progressaient pas, seuls leurs sommets brûlants continuaient d'agresser le ciel. La petite fille frotta ses yeux irrités par la fumée et tenta de trouver un passage dans ce chaos. Des ombres étranges semblaient danser dans le rideau de flamme, des ombres semblables à des visages, ceux d'un homme et d'une femme. La fillette fit un pas. Elle les avait déjà vu, elle en était certaine ! Pourtant, sa mémoire lui faisait défaut, elle ne savait même plus comment elle était arrivée là. Perdue, elle se regarda, les mains tremblantes. Son corps avait changé, elle avait grandi. Désormais, elle ne ressemblait plus à une petite fille de cinq ans, mais à une jeune fille de seize.
Un rugissement sourd retenti comme un coup de tonnerre. La jeune fille releva la tête. Les deux visages s'étaient métamorphosés en deux immenses prunelles d'un bleu glacé. On devinait une crinière d'une couleur argentée puis un museau plat surmontant des babines retroussées. Les crocs mortels d'une blancheur aveuglante étaient prêts à la dévorer. La tête du lion s'approcha plus près, confondue dans les flammes. La jeune fille recula, les yeux agrandis par la peur et les bras en remparts devant elle. Le lion ouvrit la gueule en grand, les crocs s'approchèrent de son visage. Elle hurla de terreur et la gueule se referma sur elle en un claquement sourd. Il ne restait plus que le néant.
Lyra se redressa en sursaut dans son lit, haletante et trempée de sueur. Ce rêve lui revenait encore et toujours, chaque soirs, et ce depuis un mois. La jeune elfe se hissa tant bien que mal hors de son lit, en proie à des hauts le cœur incessants. Elle s'agrippa au dossier et fit quelques pas chancelants jusqu'à la chaise en face de la coiffeuse, une main sur son estomac. Elle se sentait ballottée comme un radeau en pleine mer. Il lui fallait de l'air, et vite ! Dans un dernier effort, elle tituba et se laissa presque tomber sur le rebord de la fenêtre qu'elle ouvrit en grand. Une légère bourrasque s'engouffra dans la chambre, soulevant ses cheveux noirs décoiffés. Elle inspira à plein poumon l'air frais et pur du matin. Revigorée, Lyra laissa son regard errer sur les jardins. Entre deux rosiers, une silhouette noire et silencieuse se déplaçait avec souplesse. Le chat s'arrêta, posa son regard doré sur l'elfe et repris son chemin vers la forêt. Visiblement, Chirok était déjà debout. L'elfe s'était sentie mal à l'aise quand leurs regards se sont croisés. Il lui semblait que le garou lui reprochait de l'avoir surpris à déambuler dehors à cette heure. Lyra frissonna, elle aussi avait besoin de se détendre. Laissant les carreaux grands ouverts, elle s'arma d'une serviette et entrouvrit sa porte. Sur la pointe des pieds, elle avança dans le couloir telle une ombre, prenant grand soin de ne faire aucun bruit. Elle dévala l'escalier et, arrivée dans le grand hall, obliqua à la troisième colonne et emprunta un nouvel escalier. Plus qu'un couloir à traverser et elle pénétra dans les bains.
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Terres Elfiques
FantasyCela fait quarante ans que la Guerre de Rejet a pris fin. La paix règne sur les terres d'Althaïa mais plus pour longtemps. La tension monte et dans l'ombre se préparent de sombres projets. Un espoir cependant subsiste : « Quand les troubles reviendr...