Chapitre 1

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   La salle dans laquelle on m'a enfermée est sombre, parfaitement carrée et carrément flippante. Un grand miroir teinté recouvre un des murs. Je suppose qu'il y a là-derrière des miliciens qui me regardent sans que moi je puisse les voir, comme dans les films policiers de l'époque.
Au centre de la salle, une chaise attend, bravant l'obscurité et résistant au temps, que je vienne m'asseoir. Sauf que ça m'étonnerai que je sois la première prisonnière de cette cellule, et des gens sûrement pas tous très propres ont dû s'asseoir là avant mon arrivée. Résultat: je suis assise par terre, dans un coin qui me semble de plus en plus sombre.

   J'estimerai à quatre heures le temps que j'ai passé ici, et la fatigue commence à se faire sentir. Mes paupières sont lourdes, mes sens engourdis et...

-La voilà Madame.

Flash.

-Merci Arthur.

   Mes yeux s'habituent peu à peu à la lumière. Un garde vient d'ouvrir la porte, projetant une clarté aveuglante sur la pièce. Une femme se tient à ses côtés. Grande, blonde, yeux verts, tenue militaire. Ma mère.
   Quand ma mère est en colère, je le vois. Tout le monde le vois. Et alors qu'elle a toutes les raisons du monde pour être énervée contre moi, elle est impassible. Quant à moi, je me lève d'un bond, plus fatiguée du tout, et commence à sortir toutes les excuses qui me passent par la tête:

-Maman, je te jure que je n'ai pas fait exprès. Tu te souviens de mon exposé sur les animaux d'outre-temps? Et bien j'ai vu...euh... un scorpion. Donc je l'ai suivi et je suis arrivée à la Gare. Je te jure que...

   La voix autoritaire de ma mère me coupe:

-Qu'elle me suive.

-Pardon?

   Mais ce n'était pas à moi qu'elle s'était adressée. Le garde fit un signe de tête affirmatif. Mme O'Connor prenait l'affaire "Shasha O'Connor" en charge. Ma mère ne s'attarde pas plus et, tournant les talons, repart. Elle m'a à peine regardée.

-Tu devrais te dépêcher. Je ne la ferai pas attendre à ta place, me dit le prénommé Arthur.

   La tête vers le sol, en colère après moi pour m'être laissée avoir pas ces idiots de la milice; contre ma mère pour ne pas s'être souciée de moi, je m'engage dans un couloir blanc à la suite de ma mère.

   À la sortie du bâtiment, un fourgon blindé de la milice m'attend, portière passager grange ouverte, moteur allumé, ma mère en conducteur. Je saisi rapidement et m'installe dans le fourgon. Mon sac contenant encore sûrement mes affaires de graffiti est à mes pieds. Sauf que si ce sac est là, ma mère l'a vu, ainsi que son contenu. Mon mensonge n'aura fait que m'enfoncer. Merde.

   La route me paraît soudain très passionnante. Les maisons défilent, d'abord luxueuses, puis de plus en plus misérables au fur et à mesure qu'on s'éloigne du poste de la milice. Nous rentrons finalement dans notre quartier, pas très riche, mais ni sale, ni mal fréquenté. Juste normal.
Parfait quand on a quelquechose à cacher.

   Fait étrange, au lieu de tourner à droite pour rentrer à la maison, ma mère continue de rouler tout droit. Jusqu'à la Gare. Elle se gare (chose facile dans cet endroit désert) et descend du fourgon:

-Suis moi.

   Je saute à mon tour et ratterit, assez adroitement je dois dire, sur le même sol que mes pieds avaient foulés plus tôt. Ma mère arrive à mes côtés, un sac noir dans une main, une matraque dans l'autre. Elle avance d'un pas rapide sur la voie ferrée. Je la suis, courant à moitié. Je profite de cette petite balade pour réfléchir.

   Pourquoi m'a-t-elle amenée ici?
Pour que tu assume pleinement tes actes.

   Bon, admettons. Mais pourquoi une matraque?
Il y a peut être des animaux dangereux.

   Possible. Ça expliquerait l'interdiction formelle de pénétrer dans la Gare. Et le sac alors?

   Ma mère s'arrête soudain. Je me rend compte que l'endroit où nous sommes est exactement l'endroit où je me tenait ce matin, devant le mur que j'ai tagué. Et mon scorpion n'a pas disparu. Au contraire, j'ai l'impression qu'il est plus noir que l'encre qui est sorti de ma bombe. Parfaitement visible.

-Maman, je suis désolée de t'avoir menti. Je sais que c'est ridicule de venir peindre les murs, et totalement inconscient de le faire dans un endroit comme celui-ci. Mais j'ai besoin de sortir un peu de cette bulle que tu as créée autour de moi, même si elle me protège. Je ne m'attend pas à ce que tu me comprenne, tout ceci ne doit être pour toi qu'un caprice d'adolescente trop gâtée, et ce n'est peut être pas totalement faux. Je veux  juste te dire que j'assume pleinement mes actes désormais.

-Quels sont les dix espèces d'outre-temps, Shasha?

-Pardon?

-Tu m'as entendue.

   Sa  voix est dure. Mais je parviens à déceler une autre nuance. Une nuance qui reflète la peur.

-Euh... Le Cygne, la Tortue, le Faucon, le Tigre, la Chouette, le Serpent, le Crocodile, le Loup, le Lion et le Scorpion.

   La question était facile: la notion d'espèce d'outre-temps nous est rabâchée pendant toute notre scolarité, pendant les cours d'Histoire Antérieure et de biologie. Ma mère savait pertinemment que ma réponse serait juste. Alors pourquoi me poser une question comme celle-là dans une telle situation? Parce que mon dessin représente un scorpion?

   Comme pour certifier mon intuition, ma mère demande:

-Pourquoi es-tu si fascinée par les scorpions?

-Ils sont petits, discrets mais redoutables. Une fois leur poison injecté, la proie ne peux plus rien faire. Elle est privée de ses facultées. Les scorpions sont impressionnants.

   En même temps que je parlais, ma mère s'était approchée du mur jusqu'à toucher le lierre qui tombait en cascade autour de mon scorpion.  D'un geste brusque, elle l'arracha. Le lierre tomba à ses pieds dans un nuage de poussière et de terre. Quand les derniers grains de poussière retombèrent, je pu voir nettement ce que cachait le lierre: des dessins, tous semblables au miens, mais représentant chacun un animal différent. Le tout représentait dix animaux.

   Les espèces d'outre-temps. Reunies sur un seul mur.

-Wow.

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Coucou tout le monde! Non, je ne suis pas morte et oui je m'excuse de l'attente. Pour compenser, je veux que mes chapitres soient bien écrits (pas de fautes d'orthographes du moins) et un minimum long. Donc: j'ai décidé de faire au moins 1000 mots pour chaque chapitres. Ça peut paraître enfantin, mais je vous promet que ça demande quand même du travail.
Sur ce, n'oubliez pas de commenter, et de voter si ça vous a plu.
KISS

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