Chapitre 33

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Faolàn pousse un gémissement lorsque quelqu'un s'approche de lui et lui donne un coup dans la tête. Il a mal partout, il y a dans sa mémoire comme un gros trou noir. Sa gorge est sèche.
"À boire...", grommelle-t-il.
"On dit s'il-te-plaît.", rétorque une voix froide et Faolàn se fige.
Où est Freyja ?

Erohel se penche vers lui et lui pose une main sur le front.
"C'est si pathétique ce en quoi la fièvre transforme un homme..." De quoi parle-t-il? Faolàn tente de le repousser mais l'autre homme est plus fort que lui et le repousse en arrière.

Ses yeux haineux lui jette un regard menaçant. Il ouvre la bouche, comme pour parler, mais s'arrête aussitôt lorsque raisonne les pas de Freyja. Un sourire machiavélique joue sur ses lèvres.

La jeune femme arrive devant eux. Faolàn espère qu'elle va dire à Erohel de le laisser tranquille. Qu'elle va lui donner à boire et passer ses petites mains dans ses cheveux...
"À nouveau réveillé, à ce que je vois."
Sa voix est dure. Faolàn ne comprend pas et son coeur se serre.
Qu'est-ce qu'il se passe?

Sa pensée cherche frénétiquement une explication mais il ne se souvient que s'être endormi sur elle.

"Je... ", sa voix est râpeuse, il se racle la gorge avant de continuer "Je suis... Désolé."

Il ne sait même pas pourquoi il s'excuse mais il ne veut pas que Freyja continue à lui jeter ce regard dégoûté. Erohel secoue la tête, faussement affligé tandis que Freyja le regarde incrédule.

"Désolé ? Faolàn, crois-tu vraiment que tu peux faire ça à chaque fois? Me traiter comme... Si horriblement et ensuite croire que tu t'en sortiras parce que tu es désolé? Tu m'as... Dénudée alors que tu sais très bien ce qu'on m'a fait! Alors que tu sais exactement ce que ça fait toi aussi!"

Faolàn sent son coeur accéléré et se fige.
"J'ai... J'ai fait ça?", murmure-t-il sans voix, les yeux exorbités. Il ne comprend pas. Quand? Pourquoi ?
Freyja secoue la tête, elle a des larmes dans les yeux.

"J'ai risqué ma vie pour toi Faolàn, j'ai passé des semaines à ton chevet. C'est ça la manière dont tu me remercie?"

Il se relève d'un bond, tremblant.
"Non!", s'exclame-t-il "Je... Je ne peux pas avoir fait ça! Je n'aurais jamais fait ça! Du moins pas en en étant conscient!"

Freyja hoquette et une larme roule sur sa joue. Erohel s'écarte de Faolàn et se rapproche, il la prend dans ses bras. Non!
Faolàn se fige.
Son coeur fatigué se brise en morceaux.

Il baisse les yeux. Il ne peut rien faire, rien dire. Il ne se souvient pas de ce qui s'est passé et ce qu'il a commis dans le passé est impardonnable.

"Je ne veux plus jamais te voir, ni t'entendre, ni même entendre parler de toi.", murmure Freyja et Faolàn hoche la tête. Il ne l'a relève pas lorsque la jeune femme quitte la maison, suivie par Erohel. Il reste assis à attendre que la douleur dans son coeur passe.

Mais la douleur reste et semble même s'intensifier. Il n'avait jamais su que perdre quelqu'un qu'on aime provoque de tels maux. Il n'avait pas su à quel point il aimait Freyja. Mais de toute façon, c'est trop tard maintenant. Il avait détruit ce qu'il restait, les bases fragiles qu'il s'était construites avec elle. Il déglutit. Une larme roule sur sa joue et il serre les poings et les dents.

Il n'avait aimé qu'une fois dans sa vie, qu'une seule putain de fois et il n'était pas capable de le faire correctement.

Faolàn se laisse tomber en arrière et ferme les yeux. De toute façon, que lui reste-t-il maintenant, à part la mort?

~***~

"Erohel!", appelle la mère, sans obtenir de réponse. Faolàn relève faiblement la tête, tandis qu'elle s'approche de lui. Lorsqu'elle voit son expression, un éclair de pitié travers son visage.
"Bonté divine, mon garçon, tu es plus pâle que la mort!"
Faolàn ne répond pas et elle lui pose une main sur le front.
"Pourtant... Ta fièvre semble être partie."

"Mère!"
Il est de retour... Faolàn soupire tandis que l'autre homme arrive d'un pas rapide. La vieille femme se retourne et regarde son fils quelques instants.
"Où est Freyja?", demande-t-elle d'un ton suspicieux et Erohel soupire dramatiquement.
"Mère... Cet homme à tes pieds l'a abusé, une fois de plus. C'est pourquoi j'ai emmené Freyja en sécurité."

Elle écarte les yeux et se retourne vers Faolàn.
"Est-ce vrai ?"
"Oui.", répond-t-il sans broncher, d'une voix morte. Qu'elle le haïsse aussi, qu'est-ce qu'il en a à faire. Mais la vieille femme secoue seulement la tête, la pitié illuminant ses traits.

"Mon garçon... Pourquoi aurais-tu fait une chose pareille ?"
"Parce que c'est une brute sans coeur!", s'exclame Erohel.
"Ce n'est pas à toi que je parle!", s'exclame sa mère mais Faolàn ne répond pas. Elle jette un rapide coup d'oeil à son fils.

"Je voudrais bien pouvoir lui parler seul", dit-elle alors. Son fils grogne mais hoche la tête.

"Bien. Je vais m'occuper de Freyja, je serai de retour demain matin, mère"
Il l'embrasse froidement sur la joue et part. La vieille femme s'assoit sur les fourrures.
"Bien. Mon garçon, explique-moi ce qu'il s'est passé exactement. Pas seulement maintenant. Tu vas aussi m'expliquer qui tu es et ce que tu as fait et ensuite, nous verrons."

Faolàn ne sait d'abord pas quoi faire, puis, d'une voix rauque, il lui dévoile son histoire sans omettre un seul détail.

~***~

La vieille femme hoche la tête et lui caresse les cheveux.
"Je comprends", dit-elle et Faolàn sourit douloureusement. Elle semble réfléchir quelques instants puis se remet à parler.
"Tu aimes Freyja, n'est-ce pas?"
"Oui", murmure-t-il.
Elle secoue la tête.
"Je pense qu'Erohel l'aime aussi. Cela ne m'étonnerait pas que ton accès de violence soit lié à lui. Tu sais, mon petit, j'aime beaucoup mon fils, mais... Il peut être si cruel de temps à autre."

Faolàn soupire.
"Ce ne peut pas être de sa faute, ce n'est pas lui qui m'a rendu violent du jour au lendemain."
La vieille femme lève les yeux au ciel.
"Tu devrais pourtant savoir que certaines substances sont utiles pour se perdre soit même."

Faolàn se fige.
Erohel l'aurait drogué?

"Pourquoi aurait-il fait ça ?", dit-il d'une voix lasse et la vieille femme ferme doucement les yeux.

"L'amour rend aveugle mais par dessus tout stupide. C'est bien connu", marmonne-t-elle" C'est bien connu."

Vénus a froidOù les histoires vivent. Découvrez maintenant