Segment sans titre3

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 À la fin du repas, Aros avait prétexté de violents maux de ventre pour échapper à la méditation du soir, et, après avoir passé quelques instants allongé sur sa paillasse, il était ressorti et avait filé vers les combles situés au dessus du dortoir des étudiants de première année.

Arrivé en haut de l'escalier, il avait franchi le seuil, et refermé la porte derrière lui, avant de prononcer doucement un mantra de lumière, et s'avancer dans la pénombre.

Il avait fait une dizaine de pas quand il avait senti une main se poser sur son épaule. « Bonsoir Aros » avait murmuré Amelle. Il s'était retourné, et avait senti les lèvres de la belle étudiante se presser fougueusement sur les siennes.

La lueur bleue s'était brutalement intensifiée. « Hé, doucement avec ta lumière, tu vas m'aveugler, avait-elle plaisanté.

- Oui, excuse-moi, bien sûr. »

Et l'obscurité était revenue.

Le contact de ses lèvres aussi.

Aros troublé, s'était écarté le plus doucement possible « Mmmh, crois-tu que l'on puisse faire cela ? »

La voix d'Amelle s'était élevée dans le noir comme un couperet. « Tu préfères retourner dans le hall de méditation ?... Je ne te plais pas ?

- Non, euh, enfin si, si, si bien sûr...

- Alors, embrasse-moi. »

Aros avait senti monter en lui une excitation qu'il n'avait jamais connue auparavant, tandis qu'Amelle passait ses mains dans ses cheveux puis le long de son corps. Elle-même ne se sentait plus vraiment maîtresse de ses actes, emportée par le désir qui bouillait en elle.

Ils s'étaient laissés glisser sur le plancher. Elle avait ouvert sa robe safran, pris les mains d'Aros et les avait posées sur ses seins. « Caresse-moi. »

Puis tout n'avait plus été que douceur, chaleur humide, et volupté. Corps et âmes unis dans un élan d'amour irrationnel, instinctif et total. Elle avait poussé un petit cri quand il s'était lentement immiscé en elle. À un moment, elle avait chuchoté un mantra de lumière, et une faible lueur orangée avait jailli, les enveloppant comme une bulle. « Je veux te voir, Ar. » avait-elle chuchoté en s'installant à califourchon sur lui. Les mains tremblantes d'Aros avaient longuement parcouru chaque parcelle du corps de la jeune hioume, avant qu'enfin s'achève leur étreinte dans un spasme synchrone.

Elle avait posé la tête sur son cœur qui battait la chamade.

Et le cauchemar avait commencé.

 D'abord de longs chocs sourds et répétitifs, puis des hurlements stridents à vous glacer le sang dont l'origine ne laissait aucun doute : des hydres, que chevauchaient les chevaliers Torguls...

Saisis d'effroi, Amelle et Aros s'étaient rhabillés à la hâte, et avaient dévalé les escaliers.

Arrivés en bas, ils s'étaient précipités dans le corridor menant au grand hall, avant de se plaquer dans une alcôve pour éviter une troupe de berks répugnants, et armés jusqu'aux dents, qui se ruaient vers la grande salle. Les créatures blêmes, couvertes de pustules, aux visages grimaçants et à l'odeur fétide étaient passées sans les remarquer.

Amelle s'était tournée vers son compagnon « Ne restons pas là ! Je vais prendre des affaires dans ma cellule. Fais de même, et retrouvons-nous à la cuisine. »

Dehors, dans le ciel, tournoyaient au-dessus du toit en flammes du grand hall treize chevaliers Torguls montés sur leurs hydres impressionnantes, lançant des ordres dans un dialecte guttural à une centaine de petits drax ailés qui plongeaient dans les brèches ouvertes, et allaient semer la mort.

Dans le hall, la panique était totale. Les drax fondaient sur les étudiants, crachant flammes ou venin selon leur type. Arrachant les têtes, dévorant les entrailles des malheureux moines et étudiants qui hurlaient de douleur. Les berks, quant à eux, bloquant l'unique porte de sortie, taillaient dans les chairs, mordaient, éviscéraient celles et ceux qui tentaient de fuir.

L'odeur du sang se répandait partout.

Puis les Torguls, chevauchant leurs hydres, avaient fini par se frayer un passage dans les plus larges ouvertures du toit, et s'étaient joints au massacre.

Dans la noirceur de la nuit, deux silhouettes, protégées des regards par les bourrasques de neige, s'étaient enfuies du monastère en flammes et avaient disparu dans la forêt...

AmelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant