Anne-Laurie-Yvan

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Anne-Laurie-Yvan. Eh oui, ceci est bien mon nom. Ici, tous les noms sont mixtes et presque tous composés. Je dis ici, mais comme ailleurs. Il y a quelques planètes et chacune a ses particularités ; la plus petite : KIS, a souvent le hoquet et ses habitants parlent le cochon. N'importe qui est capable de le comprendre, c'est dans les gènes, on ne sait pas pourquoi. La deuxième planète : KET, regroupe certains peuples que l'on pourrait qualifier d'étranges et de bizarres (les peuples cochon ne sont pas bizarres) si on ne vivait pas sur la troisième planète, la plus grande : NAGY. Alors elle, vu que c'est la plus grande, contient toutes les espèces inimaginables et c'est ici que j'habite.

" Aly ! Descends je voudrais te parler! "

Mon entourage a l'habitude de raccourcir mon prénom par Aly, mes initiales si on le décomposait. Cela ne me gêne pas du tout, je préfère.

C'était ma mère qui m'appelait. Ici, comme ailleurs, on n'avait qu'un seul parent. Vous allez comprendre avec la discussion qui suit, que je soupçonne être LA discussion d'un parent à une adolescente (vous m'avez tous compris).

"J'arrive !" répondis-je.

Je vis mon frère arriver dans le même temps. Ma mère était assise sur le fauteuil en plumes de jaguar que son feu mari lui avait offert avant d'accoucher. Nous prîmes tous deux place en face d'elle, sur un canapé en velours de limace.

"Alexia-Margaret-Antoine (mon pauvre frère n'avait pas eu le droit à un surnom), Aly, j'ai une discussion importante à avoir avec vous.

- Oui maman, on sait. dit mon frère plus jeune d'un an, mal à l'aise.

En même temps, je le comprenais, qui pouvait être à l'aise à ce moment précis. A part moi. Je connaissais ma mère et je savais pertinemment qu'elle pensait perdre son temps avec ça. Elle allait donc faire court, très court.

- Je sais que vous savez. Mais en tout cas, faites attention. Et n'allez pas sur KIS enceintes, vous risqueriez de perdre la tête.

Elle se leva et partit. Je vous l'avais dit. Elle aimait faire court.

J'espère que sa vie le sera aussi.


Une fois dans ma chambre, je pris mon carnet et le secouai pour faire tomber les lettres de la page. Je recommençais mon devoir pour la troisième fois. Grille-pain n'aimait pas les ratures et malheureusement j'en faisais beaucoup.

Oui, Grille-pain est mon enseignant. Ici, comme ailleurs, ce sont les objets qui enseignent car ils sont dotés d'un QI plus important et apparemment, selon LE FLAN ils seraient plus pédagogues que des humains. Soit, il était plutôt sympathique.

Sauf qu'il n'aimait pas les ratures. Et que j'en faisais plein.

Bref, pour en revenir à l'histoire des familles monoparentales -- puisque ma mère n'a pas voulu vous expliquer, lorsqu'une personne tombe enceinte, homme ou femme, sa tête se transforme en œuf. Il n'y a plus qu'à attendre que le jaune devienne un petit truc qu'on nomme bébé et l'œuf éclos. La tête, donc, se brise et la personne enceinte meure, bien-évidemment. C'est pour cela qu'une famille avec les deux parents n'est possible que si le parent s'est remarié. De plus, lorsqu'on naît, on tue. Si c'est pas génial !

Pour ma petite histoire ; nos parents sont tombés enceintes tous les deux. Mon frère est né de ma mère et moi de mon père, qui s'était entre-temps remarié à ma mère actuelle (On se limite à papa, maman, frère, sœur, sinon ce serait bien trop compliqué). Il y a environ un an, ma mère actuelle s'est mariée à un type qui est tombé enceinte quelques jours plus tard. Il est mort mais avant d'accoucher ( certaines personnes avaient besoin d'argent). Donc en gros, nous sommes orphelins mais sous la ''responsabilité'' d'une femme qu'on se doit d'appeler ridiculement maman.

Et pour la soi-disant appréhension de maman (hypocrite, va !) à propos de la planète KIS, c'est parce qu'on a statistiquement 1 chance sur 10 de garder le bébé (que votre tête n'explose pas quoi) après un hoquet (eh oui, la planète a le hoquet !). Et je ne vous dis pas dans quel état.

Pour en finir avec ce sujet parmi tant d'autres, les premiers mots d'un nouveau-né (rassurez-vous, les ancien-nés n'existent pas, nous ne sommes pas étranges tout de même !) sont les dernières pensées de la personne qui nous portait.

Mes premiers mots furent : ''T'as intérêt de réussir salope, et pas comme ta mère''. Je ne connaissais pas mon père, mais je pouvais dire qu'il ne m'appréciait pas trop, ni moi, ni maman. Ou du moins qu'il n'avait pas très envie de mourir. Banal.


Une banalité pas banaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant