Seule

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Sur le pas de la porte de la Brasserie il marque un temps d'arrêt, imperceptible et pourtant il regarde hâtivement dans tous les sens, comme s'il pensait être surveillé.

Personne à gauche, personne à droite il accélère le pas et se fige devant un bellâtre d'une cinquantaine d'années, blond et massif on dirait Dolph Lundgren dans Rocky IV.

Je réalise que le moment est mal choisi mais je ne peux pas m'en empêcher, depuis toujours je fais des comparaisons avec des acteurs lorsque je croise quelqu'un qui ne me laisse pas indifférente dans tous les sens du terme. Cela énerve mon entourage, ma famille comme mes amis, ils se demandent où je vais chercher ces idées. Il n'y a que Finch, mon meilleur, qui trouve ça drôle il dit que cela lui permet de mettre un visage sur les inconnus dont je lui parle parfois, mes collègues, des clients. 

Alors, cet homme ne me plait pas, son allure et le ton qu'il emploie me marquent, je veux l'imprimer dans mon esprit à jamais, ma petite manie m'aide à me souvenir du physique des gens que je rencontre.

Il nous toise de toute sa hauteur, Kevin est déjà grand, cet homme l'est encore plus et il nous fixe, portant son regard sur moi, sur Kevin et encore sur moi...

- tu n'aurais pas du revenir, lâche-t-il soudain à Kevin sur un ton menaçant.

Kevin me regarde, inquiet, puis m'entraîne jusqu'à sa voiture sans me lâcher la main.

Il ouvre la portière passager, et quand je suis installée il contourne rapidement la voiture et s'installe pour démarrer en trombe.

Sa voiture, un magnifique X5 gris anthracite répond immédiatement à sa nervosité comme pour nous emmener loin de ce qui vient de se passer.

- ça va ? me dit-il pour rompre le silence pesant qui s'était installé alors que nous sommes arrêtés à un feu rouge.

- je crois... oui. Mais il est temps pour moi de vous laisser, répondis-je sans le regarder, une main déjà posée sur l'ouverture de la portière.

Je ne sais pas ce qui se passe, je suis sous le charme, mais je sens qu'il faut que je  parte, que je m'éloigne de lui... vite !  L'attitude de Sylvie il y a quelques heures et cet homme à la sortie de la Brasserie me font froid dans le dos, il y a quelque chose de bizarre autour de Kevin et je n'ai pas envie d'y être mêlée.

- Ah... vous voulez rentrer. dit-il dépité.

- Oui il y a une station de métro juste là je vais y aller.

- Non ! répond-il immédiatement, je peux quand même vous déposer chez vous, donnez-moi votre adresse. Il est énervé je le sens au ton de sa voix.

Je ne sais pas comment lui dire mais je ne veux pas qu'il sache où j'habite, je suis inquiète. Mon cerveau fonctionne à 100 à l'heure.

- rue de Paris, dis-je rapidement numéro 25

- Ok on y va et il accélère en prenant la voie rapide qui contourne le quartier de Belle-Rive.

Il se gare devant l'adresse que je lui ai donnée, un grand portail noir avec un digicode s'impose sur le trottoir.

- Vous êtes sûre que je ne peux pas vous convaincre de rester avec moi ce soir ? espère-t-il. Nous pourrions aller au restaurant.

- Je pense que vous avez mieux à faire. Des problèmes à régler peut-être. répondis-je sarcastique.

- pourquoi me dites-vous cela? dit-il en me regardant furtivement alors qu'il doit se concentrer sur la route qui défile à vive allure.

- et bien, si je récapitule sur ces quelques heures, Sylvie a eu une drôle de réaction en vous voyant (je me garde bien de lui parler de la conversation téléphonique que j'ai surprise) et cet homme devant la brasserie, il vous connait, qu'a-t-il voulu dire par "tu n'aurai pas du revenir" ?

- je... je ne sais pas, je ne le connais pas, il a du me prendre pour un autre.

- mmff, je préfère ne rien répondre, je sens qu'il me ment et pourtant j'ai envie de rester avec lui, il est attirant, intéressant et amusant, nous avons passé un très bon moment à faire connaissance autour d'un café.

Mais je ne dois pas céder il doit régler ses affaires. Ce que je ressens me met mal à l'aise.

Je mets la main sur l'ouverture de la portière et il attrape mon poignet.

- reste avec moi, s'il te plait. Je n'ai jamais ressenti si rapidement pour une femme ce que je ressens pour toi depuis que je suis entré dans l'agence.

Il me tutoie ! Cela lui donne un charme particulier et sa voix se fait suppliante.

- Non je... je dois rentrer, merci pour le café et à bientôt... peut-être. dis-je dans un souffle.

Je sors rapidement et claque la portière sans me retourner, je marche rapidement vers le portail devant moi et compose le code.

Le portail s'ouvre et je m'engouffre sous le porche sans un regard vers la BMW qui n'a pas bougé.

Je m'adosse au portail qui vient de se refermer et respire plusieurs fois pour retrouver mon calme. Les sensations se bousculent dans mon esprit, dans mon corps tout entier.

Je suis dans un conflit intérieur intense, entre l'envie de le suivre et d'entamer une relation sur des bases chaotiques et le soulagement d'avoir évité une histoire compliquée dans laquelle je ne suis pas certaine de trouver la place que je souhaite au plus profond de moi...

ressaisit-toi Savana tu ne l'as vu que quelques heures, jamais personne ne t'a chamboulée ainsi en si peu de temps !

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Si vous aimez dites-le moi !!!

Et si vous n'aimez pas... aussi !!!

Bacci a tutti

Serena


Let me HopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant