Dimanche, 9 Avril 1837
J'attend patiemment l'arrivée de mon premier patient. J'appréhende lentement la situation... Selon les dires de l'ami du lunatique, il semblerait qu'il soit turbulent. Dois-je avoir peur pour ma vie? Devrais-je craindre mon patient plus que nécessaire? Devrais-je demander l'aide supplémentaire d'un garde pour protéger ma pauvre personne? Suis-je assez bon pour régler la situation de ce malade mental? Vais-je aider ce lunatique à retrouver la raison?
Les questions fusent dans mon esprit me troublant encore plus que je ne le suis maintenant.
Je prend mon crâne entre mes grandes mains et tire sur mes cheveux. Je ramène ma tête vers l'arrière et soupire longuement exprimant mon mécontentement. Je me sens impuissant face à tout ça. Toujours dans mes pensées, j'observe l'intérieur de mon, désormais, bureau. La décoration est simple. Une immense bibliothèque orne le mur à ma droite. La porte est en parallèle au meuble en bois qui me sert de pupitre. Je suis moi-même assis sur une chaise recouverte de velours aux bordures dorées. L'exacte même chaise trône au devant de mon bureau en bois massif. Les murs de la pièce sont plutôt sombres. Trop à mon goût. La couleur taupe me donne l'impression d'être en enfer en compagnie du diable lui-même qui commente un combat entre mes démons et ma personne. Je n'ai jamais aimé les couleurs foncées, aimant plus le blanc pour la pureté que dégage cette teinte. Des objets dorés sont dispersés partout dans la pièce attirant à eux la lumière qui sort des fenêtres de style vitraux de cathédrale derrière moi. Un chevalet mordoré occupe fièrement la place au bord du meuble central. Je le récupère du bout des doigts et l'inspecte minutieusement. Mon nom et mon prénom sont gravés au devant, ma position sociale y figure également. Je le repose à sa place, si ce n'est que le lancer grossièrement, soupirant de mépris.
Il y a des peintures représentant, probablement, des employés de l'hôpital accrochées aux murs. Les portraits semblent m'épier, suivant tous mes mouvements, comme des âmes perdues emprisonnées dans des cadres dorés, vouées à être spectateurs du présent qui se déroule devant leurs yeux éteints par l'éternité perpétuelle. Je pense cruellement que cet endroit en lui-même est fou. Rongé par le délire. Renfermant tous ses occupants dans l'angoisse et dans la terreur. Laissant le malheur s'abattre sur les lunatiques qui sont déjà assez fous comme cela. Avec 500 ans de vécu, ce bâtiment est torturé par les esprits en pleurs des internés décédés entre ces murs. Mes pensées obscures me tourmentent pendant encore quelques instants avant que le bruit du bois frappé se fasse entendre. Sans même ai-je eu le temps d'autoriser la personne à entrer, la porte s'ouvre violemment sur un garde doté d'une carrure aussi large que le trou de la porte ainsi que l'un des jeunes hommes que j'ai rencontré hier. Celui-ci se fait sauvagement pousser à l'intérieur et s'étale complètement sur le plancher glacial. Je me lève rapidement et à peine ai-je le temps de me rendre à mi-chemin entre le patient et moi que le pied du garde rencontre les côtes de celui en mauvaise posture. Je me rue vers le garde et le pousse vers la sortie de la pièce, puis referme violemment la porte sous son nez. Je pose ma main sur la porte et tremble doucement, me remettant de mes émotions. J'expire bruyamment le peu d'air qui se trouve dans mes poumons. Je laisse ma main glisser sur le bois de la massive porte en posant mon front sur celle-ci et ferme les yeux pensant à ce qui vient de se passer. Si le garde s'était retourné contre moi, ça en serait fini pour moi. Moi et ma carrure légère. Je suis peut-être grand, mais je suis très mince.
Mon cœur retrouve sa cadence normale signe que je me calme. Je décide enfin de m'occuper de mon patient qui doit bien attendre. Je me retourne lentement, les yeux encore fermés, me calmant progressivement. En avançant je bute contre une surface plane que je tripote sans retenu avant de me rendre contre que c'est un torse. J'ouvre rapidement les paupières et sursaute lorsque je vois le jeune homme se tenir devant moi. Un léger cri m'échappe et je trébuche, tombant sur les fesses. Paniquant, je colle mon dos à la porte derrière moi et observe le géant qui me surplombe de sa grandeur. Je cligne des yeux et soupire d'agacement face à mon comportement insensé. Je me fais relever par l'homme devant moi qui en profite pour épousseter ma redingote et ma chemise de satin avant de se rapprocher de moi pour ajuster mon foulard à mon cou. Je regarde chacun de ses faits et gestes en constatant toute la douceur qui se dégage de lui. C'est quand il relève le regard que je vois toute sa rage prendre de l'expansion dans ses iris chocolatées. Beaucoup trop de frustration prend d'assaut son cœur et son corps. Je sais qu'il ne va pas bien et probablement qu'il n'ira jamais bien. C'est un lunatique, c'est normal.
Je n'aime pas le fait que l'on donne cette excuse chaque fois que nos patients se comporte trop émotionnellement ou agressivement. Chaque personne sur cette terre à le droit d'avoir des émotions, que se soit les pauvres de la société ou les aristocrates.
J'agrippe les mains de mon patient posées sur le tissu de mon écharpe et les ramène doucement de chaque côté de son corps en le remerciant d'un murmure. Je lui indique le fauteuil devant mon pupitre où il se siège silencieusement. Je passe près de la bibliothèque et effleure les reliures des livres d'un doux touché, ramassant une fine épaisseur de poussière avec la pulpe de mes doigts. Lorsque je me retourne, mon patient à la tête basse et semble honteux.
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Les Sept Péchés Capitaux.
FanficQu'arrive-t-il lorsque Sehun, jeune psychiatre en devenir, rencontre son premier patient? Possédé par le délire, Chanyeol n'est que l'ombre de lui-même. Celui-ci ne semble plus avoir le contrôle de son propre corps.