40 Condoléances

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Bonne lecture !

Lorsque je me réveillais je n'étais plus dans la forêt mais dans mon lit. Toutes mes blessures avaient été bandées et ma louve ne souffrait plus de son emprisonnement. La pièce était plongée dans le noir mais une fine lumière filtrait à travers les rideaux. Nous avions donc commencé une nouvelle journée, peut-être même plusieurs. Quelqu'un claqua la porte de ma salle de bain, me faisant sursauter et gémir de douleur. La jeune femme me lança un regard surpris en me voyant réveillée et écarta le rideau pour inonder la pièce de lumière.

–Désolée, dit-elle en me voyant cacher mes yeux.

Elle s'installa ensuite près de moi et appuya sa main fraiche sur mon front en fermant les yeux.

–Tu vivras, déclara la sorcière en replaçant une mèche de cheveux rouge derrière son oreille. Les blessures dues à la magie mettront plus de temps à guérir que le reste, applique ce baume chaque soir pour aider à la cicatrisation.

Ruby sortit ledit baume d'un sac en toile et le déposa sur ma table de nuit avant de quitter la pièce, sans plus d'explication. Je pouvais entendre le remue-ménage en bas mais je ne me sentais pas de descendre. Je savais qu'ils voulaient tous s'assurer que j'allais bien mais je ne voulais pas affronter leurs questions. Je ne voulais pas avouer à voix haute que Loïc était mort parce que je l'avais entrainé dans un piège. J'avais vu de mes propres yeux ce qu'il lui était arrivé et le raconter m'était impossible, pas si je voulais avoir une chance de l'oublier. Après un détour par la salle de bain pour me laver et faire un état de mes blessures, j'enfilais un jean et un sweatshirt à capuche trop grand. Une fois de plus je me faufilais par la fenêtre de ma chambre et pris la direction du centre-ville à pied. Je me fichais de savoir si quelqu'un m'avait entendu car pour le moment je ne voulais parler avec personne... ou presque.

Le portail n'était pas fermé lorsque je le poussais. J'aurais sonné à l'interphone si je n'avais pas eu peur d'être ignorée ou pire...accueillie chaleureusement. L'anxiété me gagna à quelque pas de la porte d'entrée et je songeais un instant à faire demi-tour. Moi j'avais besoin de lui parler mais peut être qu'elle ne voulait pas me voir, après tout j'avais tué son petit-fils. J'amorçais déjà un repli lorsque la voix de la vieille louve retentit dans mon dos.

–Tu n'as pas fait tout ce chemin pour repartir maintenant, si ?

Je me figeais sur place avant d'affronter son regard. Je m'attendais à y lire de la colère, du dégout mais rien de tout cela. Son regard me semblait au contraire vide. Je n'y trouvais ni la malice ni la sagesse qu'il abritait habituellement. La vieille louve me fit signe d'entrée avant de disparaitre dans la maison. Après un soupir je la suivis à l'intérieur et la retrouvait assise dans son salon. Le feu de sa cheminée crépitait et diffusait une chaleur bienveillante pourtant tout semblait mort ici. Même la composition florale sur la table basse avait bien entamée sa décomposition.

–Je ne m'attendais pas à recevoir de la visite aujourd'hui mais je peux faire du thé si tu veux, proposa-t-elle en me regardant droit dans les yeux.

Je secouais la tête et détournais bien vite le regard pour me concentrer sur les flammes de la cheminée.

–Je peux sentir ton tourment, tu te sens coupable pour sa mort.                                                         

Ce n'était pas une question mais je hochais tout de même la tête.

–Tu ne devrais pas. Ce sont les choix de mon petit fils qui l'on mené à sa perte, les tiens nous ont tous sauvé.

–Vous ne savez pas ce qu'il lui a fait subir, dis-je en serrant les dents alors que les images me revenaient en mémoire.

Sans même que je m'en rende compte la vieille louve se retrouva devant moi. Elle agrippa ma main et la serra pour me forcer à la regarder droit dans les yeux.                                                                                                                                                                                      

-Tu n'as rien fait de mal, tu m'entends ? Un Alpha doit parfois prendre une décision difficile pour une meilleure cause.

Je lui offris un pauvre sourire avant de secouer la tête.

–Vous oubliez que je n'étais plus l'Alpha à ce moment-là.

Agnès leva les yeux au ciel avant de balayer ma remarque du revers de la main.

–Tout le monde n'a pas la capacité de porter les pouvoirs de l'Alpha en son sein, il faut avoir des prédispositions.

 A mon tour je levais les yeux au ciel. On en revenait toujours à cette histoire d'Alpha avec elle.

–Tu ne dois plus être tourmentée par ce qui est arrivé, le seul fait que tu ressentes de la culpabilité prouve que tu es quelqu'un de bien Regan.

Je hochais mollement la tête avant de me diriger vers l'entrée. Ce n'est qu'une fois sur le seuil que j'osais dire les moments pour lesquels j'étais venue.

–Mes condoléances, murmurais-je dans un souffle.

Agnès prit une grande inspiration et je lus de la gratitude dans son regard. Même si son menton tremblait elle ravala ses larmes et hocha la tête. Son petit fils était un traitre dans notre meute et je savais que personne ne viendrait pour présenter ses respects après ce qu'il avait fait. Malgré tout Agnès avait aimé son petit fils et la voir faire face au deuil seule me faisait beaucoup de peine. Je quittais ensuite rapidement la propriété de la louve et tombais sur Hex. Il était adossé contre sa voiture un peu plus loin dans la rue et m'attendait. En me voyant il se redressa pour venir à ma rencontre et me serra dans ses bras.

–Je savais que tu viendrais ici, dit-il en me relâchant.

–Il le fallait.

Hex démarra la voiture sans un mot et je me concentrais sur le paysage.

–Tu es prête à rentrer, demanda mon protecteur.

–Tu crois qu'on arrivera à oublier ce qu'il s'est passé, demandais-je plutôt.

Mon protecteur réfléchit à ma question pendant une bonne minute, choisissant ses mots avec soin.

–Je ne pense pas qu'on puisse oublier ce qu'il s'est passé, mais on peut vivre avec en sachant que plus jamais ça n'arrivera.

Je hochais la tête en méditant ses paroles avant de me tourner vers lui.

–C'est une promesse ?

-Absolument.

–Alors oui, je suis prête à rentrer.

Mon protecteur hocha à son tour la tête et mit le cap sur la maison. Malgré le regard désapprobateur d'Hex, je remontais mes jambes sur mon sièges et les entouraient de mes bras. Je calais ensuite ma tête contre la vitre fraiche et fermais les yeux. Mon esprit vagabonda quelques minutes sur les doutes et  les peurs mais je finis par m'endormir.



Fille de lune  T1 : Pleine luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant