28 août,
La vitre ouverte et la radio à un volume beaucoup trop élevé, Tucker conduisait sans vraiment y penser sur cette interminable ligne droite.
Les larmes aux yeux, il s'était enfuit du lycée une demi-heure plus tôt.
Et cet état déplorable était seulement dû à une journée trop chargée en reproches. Etre attentif, travailler, se tenir droit, participer un peu plus, ne pas dormir, ne pas avoir l'air de s'ennuyer...
Mais Tucker en avait assez. Pas seulement des réprimandes, non ça c'était seulement une question d'habitude. Il en avait assez de ne pas rentrer dans le moule, d'avoir compris plus de choses que ses petits débiles de camarades.
Il aurait aimé être bête, comme les autres, ne rien comprendre de fondamental, ne pas s'inquiéter en permanence, ne pas être conscient à ce point.
Comme Conor par exemple, qui chaque soir jouait à GTA des heures durant, comme les mecs ''normaux'', sans être lassé une seule seconde.
Ou comme Bonnie qui pouvait passer des nuits entières au téléphone sans jamais manquer de sujet de conversation.
Comme son père qui ne plaignait jamais de son boulot de comptable pourtant bien naze.
Tucker, lui, n'avait d'ambition, de rêve ou de désir particulier si ce n'est d'accepter son sort sans rechigner, sans avoir à faire semblant, en faisant comme les autres.
Alors, souvent, il conduisait des heures durant sur les routes désertes qui entouraient la ville. Ou il s'asseyait au milieu et attendais que le temps passe, le vent dans les cheveux.
Pourquoi ne pas faire autre chose ?
Parce qu'il n'en avait pas la force, ou pas la volonté, selon les points de vue.
Parfois aussi il se baladait à pieds sur le périph nord de la ville, celui qui était toujours vide en août et il contemplait la ville survivre, vide de la plus part de ses habitants.
Alors, souvent quelques questions se formulaient dans son esprit dans qu'il ne puisse y répondre :
Mais est-ce que je continuerais de faire ça dans dix ans ? Me balader seul sur le périph vide ?
Est-ce que je serais – enfin – rentré dans le moule ?
Est-ce que j'aurais arrêté de faire semblant ?
Mais également une dernière, terrible, à laquelle il ne voulait pas de réponse :
Et si je devais faire semblant toute ma vie ?
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Beep.
RandomBeep, un bruit résonant dans le néant existentiel. Ne se heurtant à rien d'autre que du béton armé et des poutrelles d'acier. Parmi tout cela il y a Alice, Alec, Max, Dana, Megan... PS : la vie ça craint.