||La plage||

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27 août

J'ai revu Ode aujourd'hui. Mais j'aurais préféré que ce ne soit pas le cas. Ce matin, j'ai eu besoin d'air. Je suis allée courir en criant dans les champs. J'ai dû faire ça pendant vingt bonnes minutes. Étrangement, la voisine n'est pas sortie sur son balcon pour me lancer des regards noirs comme à son habitude. Aurait-elle cessé de me trouver idiote? Cela ferait au moins ça de bon.

Je n'avais plus de voix. Je l'avais épuisée. Mais je n'avais aucune envie de rentrer. Alors je suis allée au lac. Il y avait du vent et mes cheveux flottaient. C'était agréable.

-Salut Eurielle, ai-je entendu derrière moi.

Je me suis retournée vivement. Je savais pourtant déjà qui se tenait derrière moi. Mais je ne voulais pas le croire. Ode. Elle était là. Elle me parlait. Je n'allais pas tenir. Tout allait partir en fumée.

-Je... Je voulais savoir pourquoi... Poruquoi...

Je ne pouvais pas lui faire ça. C'était trop horrible. Si je lui expliquais, peut-être qu'elle comprendrait.

-Pourquoi je t'ai ignorée l'autre jour?

Elle a hoché la tête. Ses cheveux frisés ont rebondis sur son crâne, comme de petits lapins. J'aurais voulu rire, mais ce n'était pas le moment. Je lui ai dit de s'asseoir à côté de moi. Elle semblait si heureuse, si soulagée...

-Eh bien... C'est parce qu'il y avait mes parents...

-Tes parents m'aiment pas?

-Non! Non, c'est pas ça...

J'ai vu qu'elle ne comprenait rien à ce que je racontais. Moi non plus, d'ailleurs, je ne comprenais rien à ce que je disais.

-Je... Je... C'est quoi alors? a-t-elle dit.

Pourquoi avais-je décidé de lui dire? C'était trop compliqué, beaucoup trop compliqué. J'ai pris ma tête entre mes mains. Je n'en pouvais plus de tout cela. J'étais si fatiguée.

-C'est que... Ode...

Et là, le pire est arrivé. Le truc qui ne devait pas arrivé. Ou plutôt la personne. Constance. Elle était là, debout, en nous toisant. Ode a vu mon regard et s'est retournée. Je devais saisir l'occasion. Discrètement et silencieusement, surtout, j'ai pris les jambes à mon cou. Je me suis cachée derrière un rocher. J'espérais tellement fort que cet événement n'ait pas réduit mon masque en poussière. Il ne fallait pas que cela arrive.

Je n'entendais pas distinctement ce qui se passait en bas, mais j'entendais quelques bribes. Des "t'es trop nulle", "Eurielle", "briller", brille pas", "acharner", "amie" et encore "Eurielle". Et là, Ode s'est retournée. Elle a vu que je n'étais plus là. J'ai sentis sa tristesse de là où j'étais. C'était horrible. Elle est partie en courant.

Et j'ai compris que l'événement n'avait pas réduit mon masque en poussière, il avait empiré la vie d'Ode. Quel genre de monstre suis-je?

-Eurielle

EurielleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant