chapitre III

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Il ne fait pas vraiment beau cette après-midi, il pleut toujours, mais le soleil vient de pointer le bout de son nez de derrière les nuages gris, j'ai donc emporté mon parapluie au cas où.

Alors que je me rends au boulot, je reprends le même chemin que la veille, comme tous les jours. Je m'arrête, une fois encore, sur le pont, et regarde l'eau qui est beaucoup plus agitée qu'hier, ça doit être à cause des précipitations de la nuit, ou plutôt du matin !

Un arc-en-ciel apparaît en face de moi. Mon père m'a appris que quand on en voit le matin c'est signe de pluie le lendemain, mais si on est l'après-midi, comme tout de suite, il fera beau !

J'espère bien ! j'en ai un peu marre de ce temps déprimant, avec un peu de chance c'est terminé ! et sur ces bonnes pensées je reprends mon chemin.

Sur ma route je rencontre un grand immeuble avec une fenêtre casser aux environs du troisième étage. Mais qu'est-ce qui a bien pu la briser ? je regarde en dessous, il y a toujours les débris de verres ! alors c'est quelque chose qui l'a traversée de l'intérieur... mais quoi ?

Amanda ! arrête tes divagations ! ou va travailler pour la police ! je me reprends en main, je vais me rendre folle. C'est comme ça tous les jours.

Mes petits pas saturés reprennent de plus belle, et bientôt j'arrive à la boîte, je rentre, retire mon manteau et commence à faire l'inventaire.

À partir de dix-sept heures, on ouvre, mais juste pour boire, pas de musique, pas d'ambiance, les clients viennent prendre un coup et parfois jouer aux cartes.

Vers vingt-deux heures, le DJ arrive et la musique commence. Les clients plus jeunes s'en viennent danser, oublier, s'amuser.

C'est pourquoi parfois je dis pub et d'autres night-club. Après tout, les deux appellations sont véridiques, puisque c'est un peu des deux.

Mes journées ne sont pas bien animées, entre les disputes avec mon patron, les ragots des collègues, les bouteilles manquantes, rien d'extravagant.

Ici, la pire chose qu'il puisse arriver c'est une tache de vodka qui ne s'en va plus, une coupure de verre, un client qui nous prend pour son psychologue...

Les clients que j'aime le moins, c'est bien cela ! ils me parlent de leur famille, de leur déception amoureuse, de leur travail de bureau et me demandent des conseils.

Mais sérieusement ! j'ai perdu tout contact avec mes parents, ma seule famille, depuis environ deux ans. J'ai perdu la seule personne que j'aimais et depuis ne suis plus jamais sortie avec personne. Je travaille en tant que barmaid, mais je ne m'en plains pas vraiment... malgré tout, je l'aime mon taff !

*

* *

Il doit être aux alentours de dix-huit heures, j'essuie un verre en écoutant patiemment une jeune femme. Elle est rousse et ses taches de rousseur, éparpillées sur son nez, rendent son visage adorable, comme celui des poupées.

Je hoche la tête de temps en temps pour qu'elle ne sente pas que je ne l'écoute que d'une oreille distraite. Des problèmes j'en ai déjà, merci.

Il paraît qu'elle pense que son mari est stérile (ça fait bientôt un an qu'ils essaient de faire des enfants sans succès), mais n'a pas le courage de lui demander de faire des tests et ainsi remettre en question sa virilité.

Je tente de la rassurer avec toute la conviction que je peux avoir pour ce genre de sujet qui, à mon humble avis, devrait rester familial, ou alors entre amis, pas à la première inconnue qui veut bien se prêter au jeu du psychologue.

La BarmaidOù les histoires vivent. Découvrez maintenant