- MANGE - - Mais je ne peux PAS -

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Je suis tombée dans l'anorexie à l'âge de 11 ans. A l'époque je ne savais pas ce que c'était, je sortais tout juste de la primaire, je n'avais pas spécialement conscience de mon corps, ça m'est un peu tombé dessus, comme ça.

Enfin. Sans rentrer dans les détails, ma mère est tombée dans la dépression quand j'avais 9/10 ans, mon père était absent à l'année pour des formations, le peu de fois où il était là, c'était pas la joie, et au collège, c'était l'horreur, 4 ans a subir ce qu'on appelle bullying.

Bref.

Ce sont toutes ces « petites » choses qui ont fait que, petit à petit, sans m'en rendre compte, j'ai commencer à m'alimenter de moins en moins. Le matin j'étais trop stressée pour manger, le midi, j'étais entourée de tous ceux qui me harcelaient, des coupe-faims plutôt efficaces à vrai dire. Et le soir, le stress me nouant encore l'estomac, je trouvais des prétextes pour manger peu, voire pas du tout.

J'ai perdu 15kg en un mois, mais personne ne semblait le remarquer. J'ai commencé à faire des malaises, mais c'était mis sur le compte de mes problèmes de sommeil. Et puis, dans ce genre de situation on devient vite expert en dissimulation, je ne voulais surtout pas inquiéter ma mère. J'ai passé l'année de sixième à réussir à camoufler avec plus ou moins de succès mon amaigrissement, mon manque d'appétit et mes malaises, inventant toujours des excuses.

C'est l'infirmière du collège qui a commencé à s'inquiéter au cours de l'année de cinquième, au moment de la consultation annuelle. Mon IMC était alors de 15, sachant que le minimum est sensé être de 18. A ce moment là, les repas étaient déjà devenus une véritable source de tension à part entière.

Première consultation avec le médecin, pour la première fois, « sous-poids » est prononcé. Il suggère une psy à ma mère, qui ne comprend pas « ce qui me prend ».

Les séances commencent, je ne comprends pas ce qu'il m'arrive, et je me ferme à la psychologue. Elle a donc passé mon dossier à un médecin spécialisé pour mon problème.

C'est à ce moment qu'est tombé le diagnostique, Anorexie. BIENVENUE DANS LE MONDE D'ANA MA PETITE. La spécialiste annonce : rendez-vous toutes les semaines, avec pesée et objectifs de reprise de poids. Bonjour, au revoir, au patient suivant et gavez la.

Sauf que voilà, la « maladie » s'était déjà bien installée dans mon corps et ma tête. Premier repas surveillé de près, je me suis retrouvée incapable d'avaler le tiers de mon assiette.

C'est là qu'ont commencé les guerres des repas.

Ma mère, mon père quand il était là, n'ont jamais vu ça comme un trouble, pour eux c'était un moyen de les emmerder. Mes frères et moi avons été éduqués à la baguette, et mon « comportement avec la nourriture » était comme une rébellion à leurs yeux.

Autant vous dire que ça n'a pas arrangé les choses.

Mais je me suis rendue compte par la suite que beaucoup de parents sont incapables de comprendre ce qui arrive à leurs enfants atteints d'anorexie, et qu'ils ont tendance à les enfoncer un peu plus dans la maladie.

Ana, ma chère AnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant