LES DÉRIVES

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Je vais maintenant traiter d'une partie de ma vie "malade" dont j'ai honte avec le recul. Pour récapitulatif, je suis tombée dans l'anorexie vers 11 ans. Il s'est ensuite passé quatre-cinq ans où j'avançais un peu et reculais beaucoup, c'est à dire que quand je décidais de prendre le dessus sur la maladie et de reprendre du poids, il m'arrivait de réussir à prendre 2 kilos en ... trop de temps, pour en reperdre le double en quelques jours. Les périodes où je réussissais à manger un peu mieux étaient terriblement décourageantes, car les effets sur mon corps étaient quasiment inexistants. 

Et puis vers l'âge de 15 ans, j'ai commencé à vouloir voir les témoignages d'autres adolescents qui souffraient d'anorexie comme moi, je voulais voir comment ils affrontaient leur quotidien, et si certains avaient fini par guérir. Mais en allant de blog en blog, j'ai fini par tomber sur des groupes de filles qui prônaient l'anorexie, crachant sur les kilos, et donnant des conseils sur comment perdre du poids et se couper la faim. Les pro-ana. Un groupe qui personnifie l'anorexie comme étant Ana, une sorte d'entité qui peut nous permettre d'atteindre la perfection physique pour peu que l'on soit prêt(e)s à suivre les règles et à faire quelques sacrifices.

C'est assez paradoxal, et difficile à comprendre j'imagine, mais je m'étais toujours trouvée trop grosse tout en ayant conscience d'être anorexique. Le médecin qui me suivait avait beau s'évertuer à me démontrer ma maigreur, j'étais en perpétuel combat intérieur. D'un côté je sentais que j'étais faible, trop maigre, et de l'autre mon miroir me montrait obsessionnellement de la graisse, une fille qui aurait encore besoin de perdre un peu par ici, et puis par là aussi.

Et je n'ai malheureusement pas eu l'intelligence de fermer directement ce blog pro-ana, je me suis plongée dedans comme une souris dans un piège, me laissant rapidement séduire par leur vision des choses. L'anorexie était une bénédiction, le moyen de tout contrôler, d'être en quelque sorte supérieure (du moins c'était une impression). Et moi qui ne supportait pas mon corps, qui souffrait continuellement du regard des autres, j'y ai vu comme une solution à mes problèmes.

J'ai donc commencé lentement à suivre les conseils du blog, surveillant le peu que je mangeais, comptant la moindre calorie, me remettant au sport en cachette, quitte à faire des malaises, je voulais atteindre cette perfection physique promise. Un corps débarrassé de toute impureté. Repoussant toujours plus loin les limites. Je simulais même d'être malade, non pas pour échapper à l'école (enfin, en partie tout de même), mais pour être exemptée de participer aux repas, afin de pouvoir faire des diètes.

J'avais subi comme un lavage de cerveau, n'écoutant plus mon médecin, maîtrisant de plus en plus le mensonge pour qu'on me laisse mener ma quête à bien.

Ils ne pouvaient pas me comprendre, eux qui aimaient tant cette nourriture si écœurante à mes yeux, et je ne pouvais m'empêcher d'avoir un sourire en coin quand je voyais quelqu'un qui s'empiffrait et se plaignait de ne pas conserver sa ligne, alors que je contrôlais

Aujourd'hui, j'ai pitié de la jeune adolescente que j'étais, et écrire cette partie est bien plus difficile que de donner des détails. Je me sentais tellement inférieure que j'avais l'impression de n'avoir que ça, cette foutue obsession de contrôle pour avoir l'impression de me sentir supérieure aux autres. Impression oui, puisqu'au fond rien n'avait changé.

Si vous le souhaitez, vous pouvez trouver la lettre d'Ana ici http://babyskinnybutterfly.over-blog.com/2015/08/lettre-d-ana-1-version-longue.html


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⏰ Dernière mise à jour : Sep 19, 2016 ⏰

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Ana, ma chère AnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant