La fête est finie

357 27 2
                                    

Au palais d'Aphrodite, les réjouissances se prolongeaient et on en était venu à la grande première sortie officielle de Perséphone et de ce qu'elle allait porter ce jour là. Athéna et Artémis se rangeaient du côté du péplos blanc et simple, avec un cécryphale avec des fils d'or contenant sa chevelure mais Aphrodite s'y opposait fermement, arguant que les trois/quarts des autres déesses auraient la même tenue. Il était hors de question que sa protégée se mêle au milieu des autres et ne soit pas remarquée pour ce qu'elle appelait "sa grande apparition". Chaque divinité serait en effet présentée à Zeus et Héra dés son arrivée pour lui rendre hommage et elle devait se démarquer, point final. Perséphone, qui considérait Zeus comme sympathique mais réprouvait toutes ses aventures, ne comprenait pas en quoi il était si important d'être remarquée par le Tout puissant. Interrompre Aphrodite était malheureusement impossible et Némésis profita que cette dernière était allée chercher un "présent" pour expliquer les choses à l'ingénue demoiselle.

- Que tu sois remarquée de Zeus n'est pas forcément mauvais, et je ne parle pas d'être sa maîtresse, mais s'il apprécie ta compagnie, il te conviera donc plus souvent à l'Olympe, d'autres dieux te remarqueront et t'inviteront à leur tour et ta mère ne pourra plus rien faire pour t'enfermer en Sicile.

Cette explication limpide plut à l'aventurière qui s rangea à cet avis et avait de plus en plus hâte d'être à cette journée de célébration. Finissant son sixième verre de vin, ce qui la rendait légèrement euphorique, n'ayant pas été habituée à boire de l'alcool, Perséphone vit revenir Aphrodite qui déposa devant elle un paquet et l'incita à l'ouvrir. Curieuse, elle défit les rubans un à un pour tomber sur un sublime tissu bordeau foncé, une ceinture d'or et des épingles également en or. Ne laissant pas le temps à la jeune femme de la remercier, elle la fit se lever et lui demanda de le mettre tout de suite. "Demander" était un terme généreux au passage, la déesse ayant déjà commencé à déshabiller sa protégée pour l'habiller elle même. Pas assez ivre pour ne plus être pudique, Perséphone dissimula son corps comme elle pouvait avec ses mains. Les autres convives se mirent à rigoler et aidèrent Aphrodite à habiller rapidement la poupée vivante.

Elles se disputèrent ensuite sur la profondeur du décolleté, Némésis et Artémis n'en voulant tout simplement pas et Aphrodite désirant le contraire, même si cela signifiait qu'on devinerait un de ses seins à chaque pas qu'elle ferait. Athéna finit par trancher en le mettant juste à la hauteur de la naissance de sa poitrine, les plis du tissu lui donneraient ainsi un peu plus de volume et laisseraient ses potentiels admirateurs imaginer la forme qu'ils pourraient avoir. D'après la déesse de la Sagesse, le mystère était ce qui provoquait le désir, trop en dévoiler tout de suite la ferait passer pour plus superficielle qu'elle ne l'est. Toutes les autres se rangèrent à cet avis et la tenue fut enfin achevée. Il ne restait que ses cheveux qu'on se contenta de ramener en arrière pour dégager son visage, de longues mèches retombant sur ses épaules.

La déesse de l'Amour plaça ensuite sa protégée face à un grand miroir qui lui permit de se voir en entier. Perséphone découvrit alors une femme qui n'était pas elle. Enfermée sur son île à jouer dans la nature et donc habituée à se salir, c'était sans doute la première fois qu'elle portait une robe avec un tissu de cette qualité et des épingles d'or en forme de fleur de pavot, symbole d'Aphrodite et de Déméter. En se mettant de profil, elle remarqua que la robe était fendue sur le côté jusque mi cuisse, un détail qui foudroierai sa mère sur place aussi efficacement que le tonnerre de Zeus. Pourtant, qu'importe le désaccord de la déesse de l'agriculture, cette tenue était un véritable coup de coeur et on ne pût plus arrêter la jeune femme dans ses remerciements, promettant sans cesse qu'elle la porterait le jour J.

- Hors de question que tu t'habilles comme une vulgaire prostituée!

La voix de Déméter frappa les femmes d'un coup et Perséphone sentit son coeur s'arrêter. Ce qui se passa ensuite lui échappa à moitié. Une poigne ferme se saisit de son bras et tenta de la traîner hors du palais. Les déesses, en particulier Aphrodite et Athéna, comme cette dernière l'avait promis, voulurent intercéder en faveur de la demoiselle mais Déméter, furieuse, n'écouta rien et les repoussa sans ménagement. La mère poussa violemment la fille sur un char, son épaule droite heurta d'ailleurs une des barres de l'armature, ce qui lui arracha un cri de douleur mais la mère ne s'en soucia pas. Il y eut ensuite un coup de fouet cinglant, des hennissement apeurés et le char partit d'un trait sous les plaintes des déesses solidaires de Perséphone mais impuissantes.
________________________________________

On appelle ça l'amour, certainement fatalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant