Parfois je me trouve belle. Très belle. Je me regarde dans le miroir et je me dis que j'ai de la chance, d'être belle. Je m'amuse alors à passer mes mains dans mes cheveux, à imaginer la vie de femme qui seulement un buvant un café à la terrasse du Conquérant, arrive à être séduisante et à vous arracher un regard passionné. J'essaye d'être ce genre de femme, parfois quand je marche dans la rue ou quand je suis assise et que je ris, renversée en arrière, décolletée en coup de vent. J'aimerais bien qu'un jour un homme écrive ça pour moi. Et le pense réellement.
Puis plus je me regarde et plus je me déteste. Parce que je me trouve belle, parce que cela révèle mon égocentrisme, parce que je ne veux pas être le genre de femme qui sait qu'elle est belle et qu'elle peut séduire un homme seulement en marchant dans la rue un dimanche matin, parce que je veux être belle, parce que moi aussi je veux être désirée, admirée, alors que je suis le genre de fille qui dit « Mais on s'en fout de ça ! ». Parce que je suis contradictoire. Parce que je ne suis pas modeste, que je le sais et que j'en joue mais que, au fond, ça me fais mal. Mais, suis-je vraiment belle ? Car si je le suis, le fait de me dire ça fait de moi une petite pétasse nombriliste qui passe ses journées à se pavaner nue devant le miroir de la salle de bain. Mais si je ne le suis pas, cela fait-il de moi une jeune aveugle entourée de mensonges, ou au contraire une jeune fille qui s'aime telle qu'elle est ? Car est-ce un péché que de se trouver belle ? Est-ce défendu d'avoir envie qu'un homme se retourne pour admirer vos jambes fines s'élancer d'un pas décidé dans la rue ?
J'ai toujours reproché à une amie de ne pas réussir à se trouver belle. Je n'ai jamais compris pourquoi elle ne pouvait pas se trouver jolie car elle l'était. Son élégance et sa finesse d'esprit se reflétaient dans ses paroles et dans ses mouvements, remplis de grâce et de légèreté. Elle avait un charme qui me rendait dingue car il venait du fait qu'elle ignorait la tempête qu'elle pouvait provoquer, seulement en remettant sa mèche d'un geste délicat, derrière son oreille droite.
Mais alors, si la société actuelle met en place des tas de cabinets de psys, de conseillers d'orientation, d'infirmiers dans les lycées ; si la société de consommation nous montre chaque jour, chaque heure de chaque minute de notre vie, des tas de campagnes, d'émissions, d'interviews de stars au corps trop minces et aux lèvres trop pulpeuses qui nous incitent à s'aimer tel que nous sommes, pourquoi je pouvais me reprocher de me trouver jolie ? Quand on y pense, la société elle aussi, est contradictoire.
Puis je m'étais alors rappelée que des centaines de personnes meurent chaque jours dans la Méditerranée, que 1 milliard des habitants de notre planète se soucient de savoir s'ils vont trouver à manger et à boire pour leur famille avec moins de 1$, et qu'ils doivent surement se foutre complètement de savoir s'ils sont beaux ou pas et si c'est grave d'aimer voir son reflet dans un miroir. En moins de 5 minutes je m'étais trouvée jolie, puis détestable et maintenant ridicule... Je m'étais donc demandée si c'était juste, ou non, de trouver le temps de me poser de véritables conflits intérieurs, sachant qu'en 5 min, il peut se passer des tas de choses et que je me foutrais alors bien de mes débats intérieurs qui n'auront donc servis à rien, sauf à gâcher tu temps que j'aurais pu exploiter dans quelque chose de beaucoup plus utile comme l'apprentissage de la littérature anglaise du XVIIIème siècle.
A trop penser, on tombe dans nos propres pièges.
C'est l'adolescence.
Je n'aime pas ce mot, adolescence. J'ai l'impression que c'est un mot qui désigne un groupe de personnes « non-casées ». Pourtant c'est un mot comme les autres, avec des consonnes, des voyelles qui forment des syllabes, qui misent bout-à-bout, donnent un mot avec une définition précise. De plus, adolescence vient du latin « adolescere » qui signifie « grandir » (« C'est dire si c'est pas de la rigolade » comme dirais mon père). Je le sais, je l'ai lu sur Wikipédia le jour où ma mère m'a dit « Çà y est, tu as 14 ans, maintenant t'es une vraie ado ». Elle avait alors passé la main dans mes cheveux courts et avait déposé un baiser de maman sur mon front de « vraie ado ». Je m'en souviens bien car ma mère n'est pas très tactile, pas très maman. Les enfants ce n'est pas son truc, malheureusement pour moi qui suis sa fille. Bref, j'avais cherché sur internet ce qu'était vraiment la maladie de l'adolescence, et j'avais appris sans grand étonnement que c'est « une phase du développement humain physique et mental qui survient généralement entre la puberté et l'âge adulte, et suit la phase de l'enfance. » J'en avais alors retenu que on ne sait pas vraiment quand cela commence, ni quand cela finit et que ce n'est pas vraiment être un enfant, mais que ce n'est pas vraiment être un adulte. J'étais bien avancée pour comprendre ce qui allait m'arriver.
Attention, il ne faut pas comprendre par-là que je suis une petit sotte qui sort d'une grotte, qui ne connait pas un mot simple et qui n'est pas capable de comprendre une définition claire et précise. Mais je ne sais pas... Je suis comme ça. J'aime bien ça moi, les complications.
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Les Complications
General Fiction" Aujourd'hui maman est morte. Ou peut être hier je ne sais pas. " J'aurais aimé commencé un livre comme ça, de manière magistrale et forte, sensationnelle. Avec des mots, qui ont un sens. Brut, direct, efficace. Avec des points qui te font suffoqu...