Elle avait les cheveux longs et les yeux verts. Une cascade brune qui se déversait jusque dans le bas de son dos et qui finissait en de petites boucles gracieuses qu'elle emmêlait dans ses doigts fins. Elle avait les yeux d'une femme qui sort le soir, qui rit autour d'un verre de vin rouge, qui dort nue, qui ne met pas de maquillage, qui fume à table et qui écrit des lettres à l'encre bleue. Elle avait les yeux verts, comme les lentilles d'eau qui se répandent dans les mares. Ou comme les feuilles du cerisier. Je ne sais plus, je ne sais pas.
Elle avait le sourire du crépuscule et des lèvres de rosée du matin. Elle avait des traits fins, des gestes gracieux, et des fleurs dans les cheveux. Elle avait des diamants dans les yeux et des étoiles dans son rire. Ou l'inverse. Je ne sais plus, je ne sais pas.
Elle portait des pantalons larges, et des robes à fleurs. Elle aimait peindre et jouer du piano. Elle aimait modifier les formes et les couleurs, transposer sur la toile son univers imaginaire si beau et si pure. Son univers non-imaginaire. Ou pas. Peut-être avait-elle rêvé. Peut-être avait-elle dormit pendant 17ans.
Elle aimait regarder les chevaux voler dans son imagination et les vagues vertes que semait le vent sur la plaine. Elle aimait sentir les grains de sable s'échapper entre ses orteils quand la mer se retirait et courir après les vagues. Elle aimait le monde, la vie, les gens, et même les journalistes qui racontent n'importe quoi. Elle aimait l'aquarelle. Celle qu'elle dessinait dans son esprit de femme libre et heureuse. Elle volait. Elle était libre. Loin au-dessus des hommes vulgaires et des femmes jalouses, loin au-dessus des paroles de son banquier et de la ménopause de sa mère.
C'était Daisy dans Gatzby le Magnifique, c'était Laure Richis dans Le Parfum, c'était Dea dans L'Homme qui rit, c'était Eléa dans La nuit des temps. C'était Brigitte Bardot, Romy Schneider, Jean Seberg, Audrey Hepburn et Jeanne Moreau. Mais c'était aussi George Sand, Calamity Jane, Néfertiti, Thelma et Louise, Olympe de Gouges, Janis Joplin, Frida Kahlo, Grace Kelly, Rosa Parks, Simone Veil, Lucie Aubrac et Marguerite Yourcenar.
C'était toutes les femmes du monde dans une seule.
C'était la liberté, la joie, la vie, l'espérance, l'insouciance.
C'était une femme amoureuse.
C'était ma mère.
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Les Complications
Beletrie" Aujourd'hui maman est morte. Ou peut être hier je ne sais pas. " J'aurais aimé commencé un livre comme ça, de manière magistrale et forte, sensationnelle. Avec des mots, qui ont un sens. Brut, direct, efficace. Avec des points qui te font suffoqu...