Ce qui s'était passé la veille lui revenait en mémoire. C'était même délibérément qu'elle s'efforçait de revivre cette scène en imagination, caresse par caresse, pour en revivre tout le plaisir. Elle trouvait même plus de volupté à s'en souvenir qu'elle n'en avait éprouvé la veille en la vivant.
Elle était si heureuse ce matin. Hier soir quand il était parti, elle s'était couchée et s'était endormie comme une masse, ne pensant à rien. Mais ce matin elle ressentait les effets de cet amour et de cette tendresse.
Après ces manifestations d'affection, tout son être se portait vers Paul, elle l'aimait passionnément, et lui aussi. Elle aurait voulu être prêt de lui à cet instant. Elle lui donnait des petits noms tendres et affectueux dans sa tête quand elle pensait à lui. Il lui manquait.
N'y tenant plus, et voulant lui montrer cette joie dont il était la cause, elle se décida à lui envoyer un message. Très simple, mais tellement mignon : "Mon amour, merci. Hâte de te revoir." Elle ne voulait pas exagérer, ils ne se connaissaient pas beaucoup encore. Mais elle voulait qu'il entrevoie tout cet amour et ce bonheur dont il était la cause.
Elle attendit qu'il réponde, un peu anxieuse. Il devait dormir encore. Elle attendit, attendit. Elle n'arrivait pas à penser à son travail, à ses occupations habituelles. Elle était trop distraite.
Alors elle vit, et fut envahie d'une vague de déception, de tristesse, d'incompréhension et de colère tout à la fois. Il avait bien lu son message, il a y une demi-heure même, mais n'avait rien daigné y répondre. Sa joie s'éteignit et son amour pour lui désormais fut une douleur poignante dont elle comprit qu'elle aurait à souffrir bien longtemps.
Qu'avait-elle imaginé ? Il ne l'aimait pas bien sûr. Et puis sur quels faits s'était-elle appuyé pour croire en cet amour ? Des baisers, des caresses...Évidemment, cela prenait tout son sens désormais : il avait juste eu envie à ce moment de pécho une meuf et elle s'était trouvée là avec lui. Une meuf de plus dans sa vie c'était tout. Et elle n'était même pas sa petite amie, qu'est-ce qu'elle allait encore s'imaginer. Rien, elle n'était rien pour lui. Pourquoi l'avait-elle placé si haut dans son estime et dans son cœur ? Elle aurait dû se méfier ! Elle s'était condamnée à souffrir longtemps du dédain de ce mec, par imprudence, par naïveté ! Elle qui déclamait contre l'amour, elle avait rendu les armes bien trop vite. Hélas, elle avait raison jadis quand elle disait que l'amour était égoïste, qu'elle n'y croyait pas.
Elle s'écroula sur son lit, en pleurs. Elle le haït à ce moment. Et pourtant même dans cet accès de haine, c'était de lui qu'elle aurait voulu recevoir une consolation. C'était en ses bras qu'elle aurait voulu être serrée. Elle compris alors l'étendue de cet amour insensé. Elle vit son pouvoir de destruction sur elle, sur sa sensibilité. Et elle se jura d'oublier Paul, tout en désespérant d'y arriver jamais et de ne plus souffrir.

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Nos coeurs alarmés
RomanceEleanor arrive à Paris, elle croit avoir des rêves, des projets même, des occupations précises. Pourtant elle sent l'inanité de son existence, sa solitude, ses doutes. Puis elle rencontre Paul, et pense que tout va changer. Oui tout change, mais est...