Black Sun

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L'odeur salée de la mer me chatouille les narines. A l'horizon, le soleil en forme de cercle parfait m'aveugle dans un picotement m'arrachant une ou deux larmes. J'enfonce mes pieds dans le sable épais. Le sable peut être de différentes couleurs, en général brun mais il peut aussi être blanc. Je m'avance sur le sol inégal jusqu'à sentir l'eau froide de la mer me caresser les pieds. L'eau bleue chatouille mes orteils timidement, j'observe le liquide avec fascination. Et dire que cette eau qui me lèche les pieds s'est peut-être retrouvée de l'autre côté du monde à un moment donné, c'est fascinant. Ou alors s'est-elle retrouvée au fin fond de l'océan Pacifique? Que de possibilités et aucun moyen de vérifier quelle hypothèse est la bonne. Au loin sur l'horizon se dessinent des ombres noires, sûrement des bateaux. Des bateaux de toutes sortes; de croisières ou de cargaisons.

J'entends le son des mouettes tourner autour de moi, je les regarde étendre leurs ailes dans une grâce infinie, telle que je l'ai lue un millier de fois dans les livres. Cependant, il y a plus gracieux, les cygnes. J'aimerai plutôt voir l'envol du cygne. Leur long cou s'allonger et leur plumage immaculé se gonfler sous l'effet du vent, leurs ailes s'étendre de part et d'autre de leur corps. Un décollage vers une destination incertaine et inconnue, guidés par le bon gré du vent. J'inspire un bon coup et profite encore des quelques moments qu'il me reste à voir ce magnifique paysage. Doucement mais sûrement, le son que font les mouettes ralentit pour laisser un temps régulier entre chaque cri. Le son se fait plus aigu. Mes yeux bougent sous mes paupières et je les ouvre lentement. Je fixe le plafond noir et réprime un soupir en reprenant conscience des intraveineuses plantées dans mes bras, mais bon, j'ai l'habitude. Des pas se font entendre puis la porte grince.

-Bonjour Julien, bien dormi?

-Très bien! J'ai rêvé que j'étais à la mer. Les quelques fois où je m'y suis rendu, j'ai tenté de ressentir un maximum de choses différentes pour l'imprimer dans ma mémoire. 

-Je suppose que les livres que tu as lu sur la mer t'ont inspiré non?

Je hoche la tête.

-Si ton état s'améliore, nous y retournerons. Promis.

Je souris, enfin une perspective heureuse se présente devant moi.

La femme se déplace et les rideaux grincent quand elle les ouvre. Je porte mon regard sur le mur noir, lui aussi.

-Tu veux sortir pour prendre l'air?

-Non, ça va aller. Je préfère rester ici. Ça ne changera rien de toute façon.

-Comme tu veux, répond la femme dans un soupir.

Je sens une brise me caresser le visage.

-J'ouvre au moins la fenêtre.

Je me mets en position assise et m'étire longuement.

-Tu veux que je t'aide à faire ta toilette? Propose-t-elle en enlevant les intraveineuses de mes bras.

-Non ça ira. J'ai l'habitude.

La porte se ferme dans un timide claquement et je pose les pieds au sol. Le carrelage froid me donne des frissons. J'effectue le chemin habituel, entre dans la salle de bain et entame mon rituel quotidien. Je me lave le visage, me brosse les dents puis les cheveux. Je lève les yeux face au mur face à moi. J'ai les cheveux courts, des yeux verts et une cicatrice de mon arcade à ma tempe droite. Je suis de taille moyenne, je n'ai pas la taille d'un basketteur en gros. Ah oui, j'ai un grain de beauté sur le cou, juste au dessus de ma clavicule. Enfin je pense, c'est comme ça qu'on m'a décrit. Moi je ne sais pas et je ne saurai jamais. Car même en me concentrant pour voir mon reflet, tout ce que je vois, c'est le noir. Où que je pose les yeux, c'est le noir. Même si on me met une lampe torche devant les yeux, je verrai toujours et encore du un noir complet.

Le néant total.

𝕨𝕖𝕥 𝕡𝕖𝕒𝕣𝕝𝕤 𝕠𝕗 𝕍𝕖𝕟𝕦𝕤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant