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°°COUMBA EN MÉDIA°°

Le début du calvaire



Jamais de ma vie je n'avais vu mon père aussi furieux. Il hurlait par bribes. Il hurlait d'une voix affaiblie par la douleur et la déception. Oui il était déçu, déçu par ma grande soeur mais je ne savais pas pourquoi. J'étais enfermée dans ma chambre avec ma cousine Rama, nous étions toute nerveuses et angoissées. Néanmoins nous ne pouvions nous empêcher de prêter une oreille attentive à ce qui se disait et nous tentions tant bien que mal de déchiffrer les propos de mon père.

_NIAK DIOM ! NIAK KILIFA ! ( SANS DIGNITÉ ! SANS PUDEUR ! ) COMMENT... COMMENT... COMMENT AS-TU OSÉ ? Entendit-on

A ces cris se suivirent des pleurs, sûrement ceux de ma soeur.

Les histoires les plus invraisemblables vinrent alors s'ajouter à la liste des possibles délits que ma soeur aurait commis que j'élaborais dans ma tête.

_OU EST CE SALOPARD ? OU EST-IL ? KOUY BAYAM D****** ? KOUY BAYAM ? ( QUI EST SON PERE SAL*** ? QUI EST SON PERE )

Et là je compris. Oui là j'admettais enfin ce que je m'efforcais de nier depuis tout à l'heure.

Ma soeur était enceinte ! Enceinte sans être mariée, ce qui est considéré comme un très grand pêcher et est banni par nos coutumes et religions.

Mon père continuait de l'insulter tandis que je me jetais sur mon lit pour sangloter. Cette situation était très embarrassante et humiliante. Je ne savais pas comment ma soeur avait pu laisser une telle chose se produire, elle qui était si pieuse, pudique, elle qui me mettait toujours en garde et qui faisait tout pour me protéger. L'aurait-on violer ?

Oh Mon Dieu non non ! SVP non ! Ma soeur ne mérite pas ça ! Personne ne mérite ça !

_________________________

Deux jours étaient passés depuis ce fameux incident. Une ambiance morne et terne régnait à la maison. On eut dit qu'on était en plein deuil. Ma soeur s'était enfermée dans sa chambre pleurant jour et nuit, refusant de sortir et de s'alimenter. Je n'avais même pas eu l'occasion de lui parler ni d'en savoir plus sur son éventuelle grossesse. Mon père partait tôt au travail et revenait tard le soir. Il était toujours aussi énervé.

Nous étions Dimanche aujourd'hui. D'habitude nous prenions tous ensemble le déjeuner en discutant joyeusement mais cette fois-ci mon père et ma soeur étaient absents. Nous mangions très peu et silencieusement, ma mère, la bonne Mame, ma cousine et moi. Tous ces poulets qu'on avait l'habitude de nous disputer et qui à peine 10 minutes après avaient tous rejoignis nos ventres, surpomblaient toujours le plat de yassa.

Après le déjeuner, je partis faire la sieste. Dormir était pour moi le seul moyen d'échapper à mon terrible quotidien vu que je n'avais plus le droit de sortir.

_Khadija ! Khadija ? Ton père veut te parler tout de suite. Me réveilla ma cousine. Il t'attend dans le salon.

Je marmonnais un truc incompréhensible puis me levais. Je me débarbouillais le visage puis regagnais le salon.

Je trouvais sur place ma mère, ma soeur. Je les avais observé hâtivement. Elles avaient toutes les deux la tête baissée. Je choisissais de m'asseoir au côté de ma soeur. Mon père pénétra au même moment dans la pièce et s'installa au côté de ma mère.

_Je suppose que tu es déjà au courant que ta putain de soeur est enceinte. Asséna-t-il brutalement avant d'ajouter :

_Il est donc évident que tu n'es pas à l'abri des moeurs vu que ta GRANDE soeur, celle qui aurait dû te donner le bon exemple, celle en qui nous avions tellement confiance et qui pourtant nous a déçu de la pire des manières a été capable de se donner à un salopard qu'elle connaissait à peine.

Il parlait avec rancœur et amertume ce qui me fit redouter le pire.

_Pour te garder à l'abri de ces moeurs, j'ai décidé de te... marier.

Je ne pus m'empêcher de rire. Un rire sonore, nerveux.

_Pape ? Me marier moi ?

_Tu m'as bien entendu. Tu veux quoi ? QUE JE TE LAISSE GAMBADER TRANQUILLEMENT POUR QUE TU FINISSES COMME TA SOEUR, POUR QUE TU DÉTRUISES TON AVENIR ? TU VAS TE MARIER QUE TU LE VEUILLES OU NON. Tu as de la chance, je t'ai trouvé un bon mari et pas n'importe lequel. C'est un homme bien, droit, fortuné, travailleur qui saura bien prendre soin de toi et tu le connais déjà.

Au fur et à mesure qu'il parlait, mes larmes devinrent de plus en plus abondantes. Ils coulaient et coulaient, ruisselant le long de mon visage. Ma mère et ma soeur pleuraient aussi en ayant toujours la tête baissée et en émettant de temps en temps de petits gémissements.

Lorsque mon père se tut, le silence s'installa, un silence souvent interrompu par les petits bruits qui s'échappaient de nos sanglots. J'essayais de me contrôler pour ne pas lui cracher à la figure tout ce que j'avais dans le coeur.

Jamais de ma vie, je n'avais eu de petit-ami et pourtant ce n'était pas l'occasion qui me manquait. J'avais repoussé tous hommes qui m'aimaient car moi je n'en aimais aucun. Le seul pour lequel j'avais des sentiments c'était le meilleur ami de mon frère. J'attendais patiemment qu'il tombe amoureux de moi et qu'il me déclare sa flamme mais ça n'était jamais arrivé et ça n'arrivera sûrement jamais car il avait fini par se marier il y a environ deux ans. Et je le haissais de tout mon corps et mon âme pour m'avoir trahi et humilié de la sorte. Jamais de la vie, je ne lui pardonnerais cela, Jamais ! Il m'avait fait tellement souffrir que rien que le fait d'entendre son nom ou de penser à lui me dégoutait et me mettait en colère.

Mais je n'avais pas pour autant perdu l'espoir de trouver un jour 'chaussures à mes pieds'. N'y a-t-il pas un célèbre adage affirmant : << A chacun son tour au moulin >> ? J'étais restée célibataire persuadée que mon tour n'était pas encore arrivé et qu'il arriverait bientôt. Oui j'attendais patiemment mon prince charmant malgré ma première déception amoureuse.

Mais aujourd'hui je me rendais compte que je n'irais jamais au moulin, oui je n'aurais jamais la chance de rencontrer MON prince charmant, JAMAIS...

Khadija, condamnéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant