Sabishii (Solitaire)

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Le lycée Sakura devait son nom à la longue allée de cerisiers qui menait à cet établissement privé réservé aux jeunes filles de bonne famille. Fille de l'ambassadeur américain au Japon, il lui fallait le must du must, pour monsieur Wheeler il ne pouvait en être autrement. On disait des japonais mais les américains aussi n'avaient pas leur pareil quand il s'agissait de fierté.

Akane resserra la lanière de son sac sur son épaule et descendit de la voiture, saluant son chauffeur d'un signe de tête. Une rafale de vent l'accueillit d'une pluie de pétales roses et elle se protégea les yeux du bras, quelques mèches rouges échappés de ses tresses formant comme des traînées de sang sur sa chemise blanche. Sans un mot elle se mêla à la foule des lycéennes.

Toutes semblables dans leur uniforme, elles s'interpellaient de leurs voix aiguës, les portes clés en formes d'animaux se balançant le long de leur cartable tandis qu'elles courraient rejoindre leur amies pour leur raconter leur week end ou leur faire découvrir un nouveau boy band dont les chansons sortaient à intervalle régulier des hauts parleur de leurs smartphone dernier cri.

Akane sorti le sien orné d'un ours en strass rose pour commencer à rédiger un texto à l'adresse de son amie Yuki mais s'interrompit en voyant la jeune fille courir dans sa direction.

- Yuk...

Son amie la dépassa, la fouettant de ses tresses brillantes tandis qu'elle rejoignait le groupe des filles populaires qu'elle détestait cordialement un mois plus tôt, jurant qu'elle préférerait avaler milles aiguilles plutôt que de les fréquenter.

Il semblerait que les aiguilles passent plutôt bien avec un peu de soda au melon, songea Akane, peu charitablement.

Son ex-amie quelque peu enveloppée raffolait des boissons au parfum étrange et se les enfilait cul sec comme une alcoolique s'envoyant des shots de whisky.

Il pouvait se passer bien des choses en un mois, on pouvait se retrouver quasi orpheline et lorsqu'on revenait enfin à l'école, découvrir que votre meilleure amie avait été remplacée par son sosie gloussant et superficiel.

Mea Culpa.

Si empêtrée dans son chagrin elle n'avait pas cessé de répondre à ces SMS, qui soit dit en passant, avaient fini par s'espacer de plus en plus jusqu'à disparaître complètement, elle n'en serait pas là. La compassion a ses limites, d'autant plus quand on parle de gamines de seize ans.

Soupirant, Akane rangea son portable et s'achemina vers l'austère bâtiment de style anglais où se déroulaient les cours.

Les Huit Guerriers De ShinkaiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant