Chapitre 7

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Instinctivement, elle tenta de se dégager, mais il la maintenait fermement et elle n'y parvint pas.

- Tu te drogues ?

La question, inattendue dans la bouche de ce presque inconnu, figea Shannon. Elle le fixa, les yeux écarquillés. Comment pouvait-il...

- Réponds à la question, ordonna-t-il en resserrant sa prise.

- Je... Non.

Ses traits se durcirent. Il ramena brutalement le bras de la jeune fille et lui retroussa la manche, dévoilant son avant-bras si maigre qu'on voyait chacune de ses veines, et ses tendons qui ressortaient, tendus comme des ressorts sur sa peau blafarde. Peau qui arborait des marques de piqûres bien visibles.

- Bien sûr que tu te drogues. Laisse-moi deviner : héroïne ?

Elle cessa de lutter et le regarda droit dans les yeux tandis que sa peur reprenait le dessus. Les yeux du garçon, dorés comme ceux des lions, changèrent d'expression pour devenir doux et inquiets.

- Tu as peur, constata-t-il. Il – ou elle – te fait du chantage ?

- Comment...

Elle avait laissé échapper le mot et se mordit la lèvre. Le visage de Dajan se ferma un peu plus.

- C'est bien ça, donc.

Shannon resta silencieuse, espérant qu'il la lâche afin qu'elle puisse s'en aller. Il ne le fit pas, l'observant attentivement. Après plusieurs minutes d'un silence inconfortable, il se décida à parler.

- Je vais te raconter un truc. Tu promets de ne pas t'enfuir si je te lâche ?

Il savait ce qu'elle voulait faire... La rouquine chassa cette pensée de son esprit et acquiesça. Il la libéra et elle s'assit de nouveau, attentive.

- Tu dois être en train de te demander comment j'ai deviné. Je vais te raconter une histoire. C'était une fille de ton âge, à peu près. Elle s'appelait Kim et c'était une ado normale, avec ses doutes, ses questions, et ses problèmes. Elle était très gentille, toujours gaie, serviable, un vrai ange. Un soir, elle n'est pas rentrée. Elle avait prévenu chez elle qu'elle allait chez une amie, mais lorsqu'elle est revenue le lendemain, elle avait changé. Ses parents ne s'en sont pas aperçus tout de suite. A partir de ce soir-là, Kim fut de moins en moins présente à la maison ; elle partait tôt, rentrait tard, et se cloîtrait dans sa chambre. Elle fermait la porte à clé, sa famille ne savait pas ce qu'elle y faisait.

Dajan marqua une pause. Son regard se perdit dans le vide.

- Ses parents ne comprenaient pas son comportement. Elle était devenue agressive, faisait des crises de nerfs, elle qui avait toujours été calme. Elle maigrissait à vue d'œil. Elle était instable, aussi : tantôt triste, tantôt furieuse, tantôt morte de rire sans aucune raison. Puis elle disparut des nuits entières, ne rentrant qu'au petit matin ou le lendemain soir. Ses habits étaient en désordre, souvent déchirés et froissés.

Shannon était captivée par l'histoire. La voix grave de Dajan la transportait dans la peau de cette inconnue qui semblait avoir eu les mêmes problèmes qu'elle.

- Un jour où Kim était absente, sa mère entra dans sa chambre pour faire un peu de ménage. En changeant les draps du lit, elle remarqua une bosse bizarre sous l'oreiller. En y regardant de plus près, elle découvrit une seringue, un sachet... et de la poudre. La pauvre femme tomba des nues. Son mari, alerté par son cri, accourut, vit le matériel à terre et son épouse qui pleurait. Il comprit tout de suite.

Il fit de nouveau une pause. Sa voix devint hachée.

- Je ne savais pas ce que c'était. Mais mes parents ont aussitôt appelé la police. Quand ma sœur est rentrée, au milieu de la nuit, mes parents l'attendaient en compagnie d'un officier. Ils lui posèrent des questions, elle nia tout en bloc, jusqu'à ce qu'on lui demande ce qui l'empêchait d'avouer la vérité. Je ne dormais pas, j'ai entendu ses pleurs jusque dans ma chambre.

Amour adolescentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant