Préambule

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La limite du ciel, c'est le mot qu'il avait employé pour me parler de cet infiniment petit qui n'était autre que nous deux, nos deux corps allongés sur les tuiles recouvertes d'une fine couche de mousse verdâtre, l'odeur de la cigarette se propageant en un nuage grisâtre autour de nous, et la lueur pâlotte de la lune qui, en cette nuit, semblait bien maladive, un peu comme moi. Elle avait l'air lassé, usé, presque incomprise parmi toutes ces étoiles plus brillantes les unes que les autres, j'étais elle, elle était moi. Et lui, il était le ciel, indomptable et hors de portée, il était ce que l'on voulait, ce que l'on rêvait sans jamais pouvoir l'obtenir, il était encore plus spirituel que tous les astres, les théories, les pensées philosophiques des grands humanistes, il était le fantôme du ciel, et moi, un faisceau de lune totalement brisé, un piano désaccordé.

Je ne suis jamais parvenue à comprendre sa volonté de me suivre dans chacune de mes aventures, tel un acolyte, un second, il m'accompagnait dans mes délires à deux francs cinquante comme il le disait si bien, avec un grand sourire narquois sans jamais me traiter d'enfant, de gamine puérile qui devrait songer à son futur et non plus à son enfance. Il n'était pas très bavard, plutôt silencieux, mais on était comme ça, les mots étaient superflus, gênant, on se contentait d'un regard, d'un simple et innocent regard qui en soit, ne valait pas grand-chose aux yeux des autres, mais nous, on savait lire outre les premiers plans, en dehors des lignes, nous, on voyait plus loin que tous ces idiots, nous, on était l'univers, et les autres, des étoiles sans lumière.

Arthur un prénom constitué de six lettres, trois syllabes, trois voyelles, trois consonnes. Banal ? Certes, mais je ne pourrais jamais m'en défaire de cet assemblage de lettres, formant, une à une, le prénom de celui qui m'a fait découvrir la limite de l'impossible, le concepteur de l'inconcevable, le sang circulant dans mes veines, la démence de ses mains logées au creux de mes reins, Arthur.

Nous n'étions pas franchement similaires, voire complètement différents, oui différents, c'est le terme exact. J'étais celle que l'on ne remarquait pas, effacée, dans un autre monde, l'illuminée de service, la pluie fine que l'on ne distingue même pas en s'aventurant dehors, l'intello pour d'autres. Et lui, il était la tempête du pays imaginaire, le froid lacérant du Pôle Nord, il était celui qui ne passait pas inaperçu, celui qu'à chaque pas on suivait du regard pensant candidement qu'il n'était que le fruit d'un mirage, d'une douce hallucination et que ses pas s'effaceraient en une fraction de seconde, car, il était de loin la personne la plus fascinante que j'aie pu rencontrer en dix-neuf ans d'existence.

The Sky's limitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant