ERRET

II.

15-09-2003

Quinze jours se sont écoulés depuis la rentrée scolaire du petit Ernest. Quinze jours de joies, de larmes, de nouveautés et d'amusement.

Étrangement et contre toute attente, le petit garçon blond aux yeux azurés s'était avéré pudique et timide, voire très réservé. Au début, même un simple rapprochement le faisait fuir, provoquant un énorme sentiment de mal aise. Il allait se cacher dans un coin de la salle de classe, s'isolant ainsi de toute présence humaine, n'osant pas se mélanger au reste des mômes, qui, pendant de longues heures, pleuraient ou réclamaient continuellement leurs parents dans une litanie sans fin, répétitive et bruyante qui rendait folles les maîtresses qui s'efforçaient à en prendre soin.

Mais, bien vite, sa bonne humeur revit le jour et son grand sourire rayonnait qui exposait toutes ses petites dents de lait toutes blanches et bien entretenues, put enfin réapparaître sur sa petite frimousse adorable qui faisait craquer toute personne qui avait la chance de la croiser.

19-10-05 

Halloween approchait à grands pas, l'automne s'installait doucement, les arbres se dénudaient, laissant une belle couleur orangée vêtir les rues et les parcs, diffusant une ambiance rassurante dans les lieux, malgré les multiples citrouilles et toiles d'araignées posées ici et là. Toute la ville se métamorphosait, les magasins adoptaient de nouvelles tendances, les adolescents semblaient plus excités qu'à l'habitude, contrairement aux adultes qui semblaient beaucoup plus méfiants.

Ce matin-là dans la salle 21C au fond du couloir d'une école, Ernest Ronnock s'amusait à dessiner un petit vampire aux canines pointues, étrangement souriant. Sa maîtresse lui avait demandé de se dessiner, portant son costume d'Halloween, vu que tout le monde se mettait dans l'ambiance. C'était son tout premier Halloween depuis cinq ans; aussi excité qu'une puce, il s'impatientait chaque soir, priant le bon Dieu pour avoir une montagne de bonbons chez lui le soir du trente et un octobre. Nelly lui avait même promis une tournée des maisons en compagnie d'Elizabeth, afin de récolter le maximum de bonbons, qui, bien sûr, ne seraient pas tous consommés d'un coup. Une chose que le petit n'avait pas assimilée !

Assis au fond de la classe sur une chaise, le petit blond discutait avec l'une de ses camarades, une petite brune aux yeux bleus aux nuances grisées. Elle semblait absorbée par son dessin et ne lui répondait qu'une fois sur deux. Ernest aimait visiblement bien la petite Safiya, depuis trois longues années déjà. Il lui trouvait un air de ressemblance avec l'une de ses deux mères. Une chose que la maîtresse ne cautionnait visiblement pas.

«­Maman et Mommy comptent se déguiser en deux sorcières ! Annonça fièrement le môme qui s'approchait de la petite brune afin de lui montrer son dessin qui illustrait sa petite famille.»

Il s'approcha doucement d'elle, venant jeter un coup d'œil par-dessus son épaule. Il y avait quelque chose qui clochait dans son dessin à elle, il n'y avait qu'un homme, qu'une femme et qui semblaient vraiment proches. Curieux, Ernest pointa du doigt le couple, une grimace indéchiffrable sur le visage.

« Qui est-ce ? Demanda l'enfant, les sourcils froncés.

— Papa et maman ! Répondit l'enfant, comme si c'était une évidence.

— Mais... Tu n'as qu'une maman...? Et... et un seul papa ?!»

L'enfant sembla quelque peu effrayée, elle se leva rapidement et courut vers la porte où un homme l'attendait. Elle sauta dans ses bras et lui donna la feuille où son dessin avait été fait. L'homme regarda attentivement la feuille, se mordit la lèvre avant d'embrasser le front de sa fille qui s'était mise à pleurer. C'était tout le temps comme ça, elle ne comprenait pas pourquoi cela lui arrivait. Le père jeta un regard à l'enseignante et lui sourit, un sourire poli qu'elle lui rendit aussi; sauf que le sien était purement hypocrite.