Celle qui taquinait Jane un vendredi soir...

Chapitre 1

M : Jane, veux-tu venir ce soir pour regarder un documentaire ou un film ?

M : Post-scriptum : J'ai tes bières préférées donc tu ne peux refuser !

Jane : Yep ! J'arrive ds 5min.

Jane était soulagée d'aller chez Maura pour leur soirée du vendredi. Comme d'habitude, elles enfileraient des habits confortables, un pantalon de yoga pour Maura et un short de sport pour elle, short qu'elle gardait dans un tiroir chez son amie, au cas où. Elles discuteraient sur le canapé en regardant quelque chose à la télé, surement un peu trop sérieux au goût de Jane puisque c'était au tour de la scientifique de choisir le programme, mais elle ne rechignerait pas, ou seulement un peu pour taquiner Maura. Bien sûr il y aurait également un bon vin français pour l'élégant docteur et en ce qui la concernait, une bonne bière. Ces vendredis soir étaient ses préférés. Et ce jour-là, elle en ressentait particulièrement le besoin. Elle avait en effet passé la semaine à résoudre une des affaires les plus tordues qu'elle ait connues : le meurtre d'un zombie. Rien n'avait été normal et même Frankie s'était comporté comme un enfant, en se déguisant et se maquillant, imitant la prétendue démarche des morts-vivants. Être entourée de cadavres animés l'avait rendue folle. Enfin... L'affaire était bouclée et les choses pouvaient enfin redevenir normales. Et cela commençait avec la perspective d'une soirée en compagnie de sa meilleure amie. Avec Maura au moins elle était sure qu'il n'y aurait pas de surprises et que tout serait normal : seulement des faits et de la science ! Les tenues et la nourriture de cette femme blonde qu'elle aimait tant étaient les seules choses excentriques qu'elle pourrait trouver. Et cela lui convenait parfaitement ! Elle sonna et attendit qu'on vienne lui ouvrir, même si elle savait qu'elle pouvait rentrer, cela ne dérangeait pas. Seulement, contrairement à sa mère Angela, elle respectait la vie privée des gens, notamment celle de cette personne si particulière à ses yeux.

La docteur lui ouvrit la porte et le visage de Jane se figea. La médecin légiste en chef de l'Etat du Massachusetts, la personne la plus raisonnable et rationnelle que Jane connaissait s'était transformée en zombie. Elle avait des blessures ouvertes qui suintaient sur la joue droite et descendaient le long de son cou si fin, d'autres sur les deux bras. Elle en était à un stade de décomposition moyen.

«_ Vous ne vous attendiez pas à ça inspecteur, me trompe-je ?

_ Wow Maura ! Me dis pas que t'as rejoint le camp des zombies et de Frankie ! , dit-elle l'air horrifié.

_ Kent a travaillé d'arrache-pied pour améliorer la formule du maquillage et il a fallu de nombreuses tentatives avant de parvenir à une viscosité de la chair aussi parfaite, répondit-elle en laissant entrer Jane. Alors ça te plait ? s'enquit-elle avec un sourire en coin, le sourcil relevé.

_ Naaaan !, protesta Jane, Pourquoi Maur' ? Tu travailles avec des cadavres toute la journée. Tu sais à quel point ils sont repoussants ! Et leur situation est plus que tragique ! Comment tu peux vouloir leur ressembler ??!

Maura semblait légèrement déçue.

_ Eh bien tout d'abord je pensais que cela pouvait être drôle. Pour une fois que je fais quelque chose que tu ne qualifierais pas d' « ennuyant ». De plus, les zombies nous viennent de la culture haïtienne et ils font partie de notre littérature depuis des siècles maintenant, et ils fascinent les gens ! Elle ajouta : Oh et je me suis regardée dans le miroir et je suis satisfaite du résultat ! Quoi que tu en penses Jane, je resplendis ! » Tous les traits de son visage traduisaient « Et-je-sais-que-j'ai-raison ».

_ Ben j'vois pas l'intérêt d'gâcher un visage aussi magnifique que le tien ! répondit la détective avec un ton puéril.

_ Ne serait-ce pas plutôt parce que tu as peur Jane ? demanda l'autre les sourcils froncés.

_ Nan Maura !

_ Même pas un petit peu apeurée ? Disons que j'ai vu la manière dont tu as agi cette semaine... Et à quel point tu semblais mal à l'aise.

_ Maura, j'ai déjà connu des situations bien plus effrayantes dans le passé, tu le sais. Et ça ? ça en fait pas partie !

Le comportement de son amie commençait à l'agacer. Où voulait-elle donc en venir ?

La légiste se rapprocha de sa collègue.

_ Tu en es sure ? Parce qu'il me semble que tu n'es pas dans ton état normal, insista-t-elle.

_ Bon Maura arrête, c'est bon !

Elle commençait sérieusement à perdre patience.

_ Ah ! Admet le ! ça te ... c'est quoi déjà ? Fout les boules ! C'est comme ça que tu dis ? Ce que Frankie dit est donc vrai ! Les zombies te terrorisent !

_ Non pas du tout ! C'est juste que je comprends pas leur succès ! Et de quel droit il ose lui ?! J'étais encore une gamine okay ? c'est normal d'avoir peur à cet âge là ! Tu veux bien aller te laver le visage maintenant ? Je pense qu'on a assez ri !

Mais la légiste ne semblait pas prête à laisser tomber l'affaire. Elle s'approcha encore plus près, Jane était désormais bloquée entre le corps de son amie et le plan de travail de la cuisine.

_ Hmm j'adore voir « Jane la dure à cuire » perdre le contrôle de soi-même juste pour un peu de maquillage...

_ Maura s'il te plaît, implora-t-elle. »

Mais cette dernière avait refermé l'espace qui les séparait. Son visage n'était plus qu'à quelques centimètres de celui de Jane. Son souffle effleurait la joue qui disparaissait sous les boucles brunes.

Elle prononça alors cette phrase avec une voix grave et sensuelle : « Si tu admets ta peur, j'arrête. »

Elle regarda au plus profond des yeux de l'italienne et ce qu'elle vit dans ces pupilles dilatées était un sentiment bien différent de la peur. Ça semblait bien plus fort, bien plus puissant. Elle se pencha alors encore un peu et embrassa les lèvres qui s'offraient à elle. Jane ferma les yeux et lui rendit son baiser.

«_ Maintenant j'ai peur, murmura cette dernière lorsque leurs bouches se quittèrent.

_ Vraiment ? » repondit une voix un peu trop perchée. « Ce n'est que du sirop de mais et de la gélatine...

_ Non Maura, dit-Jane doucement, j'ai peur qu'on vienne juste de bousiller notre amitié avec ce baiser. Qu'est-ce que ça veut dire hein ? Et si on ne souhaite pas aller dans la même direction ? Et si ce qu'il y a entre nous change-

_ Jane, qu'est-ce qui pourrait changer ? On agit déjà comme un vieux couple... Tout le monde le dit.

Jane hocha de la tête en retour mais ne semblait pas entièrement convaincue.

_ Jane regarde-moi. Est-ce que tu m'aimes ?

_ Bien sûr Maura ! Comment tu peux en douter ?

_ Alors tout ira bien, parce que ces sentiments sont réciproques. »

Elle se pencha alors pour embrasser à nouveau Jane.

« Non Maura, je ne peux pas. »

La stupeur et une certaine tristesse pouvaient se lire sur le visage de la coroner en chef.

« Jane com... », sa voix se brisa. « Je sais que c'est nouveau et que ça peut- »

Jane se reprit aussitôt. « Non je veux dire le maquillage, j'peux pas t'embrasser avec cette face de zombie. J'ai fermé mes yeux la première fois et je compte bien les garder ouverts pour pouvoir admirer ton magnifique visage toute la nuit, peu importe ce que l'on fait. Alors va laver ce maquillage de ton corps ! Parce ÇA, ça a rien à voir avec la femme sublime que je désire !

_ Eh bien... peut être que tu pourrais m'aider à m'en débarrasser sous la douche dans ce cas... »