AU TRAVERS DES SENTIMENTS

❝ 01 ❞

Il y avait ce battement régulier au fond de lui, toujours le même, toujours là, peu importait les évènements. Et parfois il arrivait que ce même battement se dérègle, devienne légèrement plus rapide, plus désordonné, parfois même il arrivait que ce battement ne marche plus comme il faut. Il lui arrivait de louper quelques secondes dans sa course qui se terminait toujours effrénée. Le châtain clair ne comprenait pas pourquoi, lui qui était toujours aussi insensible. Il ne pouvait que subir cette montée subite du rythme de ses battements.

Il ne savait pas vraiment depuis quand il arrivait que son rythme cardiaque s'accélère, il n'en comprenait pas les raisons, n'en connaissait pas les causes ni les conséquences. Cela durait peut-être depuis son entrée en terminale au lycée, peut-être un peu plus tard. Au fond il s'en moquait bien. Après tout, ça allait partir comme c'était venu.

Il soupira très légèrement et se leva, faisant à peine grincer sa chaise sur le parquet de la salle de cours. Ses yeux noisettes, voire bruns, se perdirent à travers la fenêtre quelques secondes. Il faisait chaud dehors, mais c'était une douce chaleur plutôt agréable, différente de celle de l'été qui étouffait et faisait coller les vêtements à la peau. Le printemps était la saison préférée de Jimin, ou plutôt la seule qu'il aimait. Les douces couleurs des fleurs qui reprenaient vie ainsi que les délicates odeurs de l'été le mettaient à l'aise, il s'y sentait nettement mieux qu'en été.

Tranquillement et toujours dans un silence des plus religieux, le blond foncé mit son sac sur ses épaules et traversa la classe comme une ombre, essuyant quelques regards envieux des filles et incompris des garçons. Personne ne pouvait comprendre un marginal comme lui. Il ne loupa pas les divers commentaires, tantôt des « il est tellement mignon et mystérieux », tantôt des « quel mec étrange ». Il les entendait mais ne réagissait pas, il ne ressentait rien qui le poussait à réagir. Après tout les gens croyais ce qu'ils voulaient.

Il allait sortir de la pièce lorsqu'il sentit un regard sur lui, un regard brûlant, chaud, qui lui donnait des légers frissons. Tournant la tête pour capter ce regard, il découvrit un brun à l'air heureux, un de ces mêmes idiots qui n'avaient aucun problème dans la vie. Un de ces garçons qui n'avaient aucun mal à s'entendre bien avec les gens, qui étaient gentils, attentionnés, aimés de tout le monde et qui prenaient soin de leur copine lorsqu'ils en avaient une. Tout son contraire finalement.

Badoum, badoum. Tiens, encore cette accélération, son cœur battait plus vite. Il n'arrivait pas à mettre de mots sur ce phénomène, sur ce qu'il ressentait, il n'y connaissait rien. Il n'aimait pas attirer les regards et avoir l'attention sur lui simplement à cause de son incapacité, il voulait rester discret et que personne ne le remarque. Et ce regard était d'autant plus désagréable car il était terriblement sérieux, intense, contrastant avec l'habituelle joie qui transparaissait dans les prunelles brunes.

Il lâcha un soupir presque imperceptible et décida de quitter la classe, passant au dessus de cet étrange phénomène en lui. Et même s'il était habitué à ne rien ressentir, à ne rien éprouver, il était légèrement déçu de voir que même ce regard, bien que franchement ennuyant, n'avait provoqué aucune réaction inhabituelle en lui si ce n'était cette accélération. Enfin, pouvait-il vraiment dire qu'il était déçu ? Il était juste habitué.

D'un pas presque nonchalant, il se dirigea lentement vers le toit du bâtiment, grimpant une à une les marches de l'escalier, perdu dans ses pensées. Jimin trouvait un certain réconfort, une sorte d'apaisement en allant se nicher dans les hauteurs malgré les interdictions. Il s'y sentait bien, comme libéré et dans un silence dont il pensait ne jamais assez profiter. Ainsi, il pouvait observer tout ce qui l'entourait, profitant des cerisiers en fleur qui se découpaient dans le paysage scolaire et de la douce brise qui venait s'engouffrer dans ses mèches châtains clair.