I. Qui est "Kira" ?

1.1K 108 29
                                    

| R Y U Z A K I |

L'affaire Kira a basculé. D'une manière que moi-même, je n'aurais pu l'anticiper. Mes propres sentiments ont faussé les conclusions, mon jugement a perdu de sa valeur. La finalité de l'histoire, que j'ai prié de ne jamais voir, me hante encore aujourd'hui. À cette heure, des années en arrière, jour pour jour, je commettais l'erreur de ma vie.

— Ryuzaki, m'appela Watari au-travers du micro. Mademoiselle Néo demande à vous voir. En privé.

Dans toute enquête, il y a des suspects. Deux personnes sont ressorties du lot, au début. Deux que j'imaginais et parfois, voulais associer à ce tueur sanguinaire. En faire une seule et même image. Le premier était Light Yagami, brillant lycéen que j'ai gardé en première position du commencement jusqu'à la fin. Le second répondait à l'ironique surnom de Néo Mackenzie, hackeuse professionnelle, le pirate informatique le plus recherché du net. Je les présentais chacun au même stade, mais je savais. Au fond de moi, mes tripes hurlaient qu'il ne restait plus qu'à éliminer mon suspect numéro deux du tableau afin de boucler le véritable assassin.

Si c'est ce que mon intuition hurlait, alors pourquoi Néo a-t-elle fini à l'échafaud ?

La détention de Light et Misa avait commencé depuis deux semaines. La cellule d'enquête ainsi que moi-même nous occupions de surveiller grâce aux caméras leurs moindres faits et gestes. Les meurtres de criminels stoppés ne pouvaient que me faire penser que je tenais mes coupables. Pourtant...

— Fais-la attendre dans la chambre réservée au matériel. Je la rejoins, répondis-je.

— En privé ? s'étonna Matsuda.

Je ne répondis rien. Levé du fauteuil sur lequel je me trouvais il y a quelques secondes, mes pas me dirigèrent à l'extérieur, dans le couloir de l'hôtel. Aucune explication logique ne pouvait m'expliquer la présence de mon suspect numéro deux après son blanchissement. Plus intrigué qu'ennuyé, je me suis hâté vers l'ascenseur qui me mena trois étages plus bas. La porte de la fameuse chambre de stockage entrouverte, j'en déduis qu'elle m'attendait déjà à l'intérieur. Ma main poussa le battant afin de révéler une pièce sombre, presque froide. Un unique trait de lumière traversait les rideaux, illuminant le visage que je m'attendais à voir. Elle observait par la fenêtre, ses lunettes tirant sa frange vers l'arrière. Ses yeux d'un bleu sombre semblaient plus expressifs que jamais. Elle portait une tenue simple, un pantalon noir moulant aux nombreuses chaînes accrochées dessus, ainsi que d'un tee-shirt large blanc. Pas différente de d'habitude. Rien ne clochait. Sans rien dire, je fermai la porte derrière moi. J'ai pris place sur un autre fauteuil, jambes repliées contre mon torse. Ma main l'invita à m'imiter.

— Je vais rester debout, me rétorqua-t-elle.

Oh. Quelque chose clochait définitivement. Son regard ne voulait pas rencontrer le mien. Si son apparence physique ne laissait aucun indice, une simple phrase m'indiqua sa nervosité. Bras croisés sur sa poitrine, ses doigts serraient ses bras jusqu'à trembler légèrement.

— Pourquoi voulais-tu me voir seul à seul ? lui demandai-je.

Si l'obscurité de la pièce ne prêtait pas à confusion, j'aurais juré voir une larme dévaler sa joue. Néo retira les lunettes qui tenaient ses cheveux en place. Elle secoua la tête et les déposa sur la table où trônait une lampe de chevet éteinte. Je sentis que son masque se remettait en place. Son pas, presque impatient, la dirigea jusqu'à moi. Sa poigne agrippa les deux accoudoirs du siège. Penchée afin de se retrouver à hauteur et me surplomber par la même occasion, nos yeux s'accrochèrent.

— J'ai un aveu à te faire, Ryuzaki.

— Et quel est cet aveu si important qu'il a dû attendre une conversation privée, Néo ?

Malgré toute l'anxiété que son corps trahissait, un sourire presque confortable se dessina sur ses lèvres. Je me retins de claquer ma langue contre mon palais.

— Tu as arrêté Light et Misa depuis deux semaines. Je viens rectifier le tir, tu tiens les mauvais suspects.

— Ah oui ?

— Il se tient devant toi, stupide détective. Ouvre les yeux.

Mon silence ne fit qu'accentuer sa respiration saccadée. Presque sur le point de perdre tout contrôle. Une goutte de sueur perla de son front.

— Je suis Kira, L. 

[Death Note] Suspect numéro deuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant