Chapitre 8

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Un bruit spongieux et des chocs répétés sur ses hanches le tirent d'un sommeil profond. Ses yeux papillonnent, peinent à se focaliser sur ce qui se trouve au-dessus de lui. Ses pensées se rassemblent, reproduisant le film de ces dernières heures. Le rire cristallin encore. Le bruit humide s'arrête, le poids se déplace sur son ventre. Une odeur de rose, portée par un souffle tiède. La forme qui oblitère sa vision s'approche de plus en plus, des lèvres délicates se posent sur sa bouche en un chaste baiser. Butch l'ignore, cherchant à prendre conscience de son corps. Il attend la douleur, mais ne la détecte nulle part. Il s'est pris un coup de barre en fer sur la tempe, il en est sûr. Il s'en rappelle la morsure, l'impact et la fleur de douleur qui s'était épanouie. Rien. Instinctivement il lève son bras pour toucher la plaie, mais ne peut le soulever que de quelques centimètres. L'autre bras, idem.

- Où comptes-tu t'enfuir mon ange ? Roucoule la voix

Il la regarde, ne voit rien si ce n'est une forme humaine noire et floue. Il ne fait pourtant pas nuit, la lueur d'un feu pas loin repousse les ténèbres ambiante, se contenant juste de faire un écart autour de ça. Le diable le scrute de ses yeux verts. Pas le vert bleu banal du commun des mortels, mais la riche couleur des feuilles en pleins soleil. A bien y regarder, quelques gouttes d'or flottent au milieu. Il voit un sourire félin remplir ces yeux. La chose semble ravie et roule des hanches de contentement. Son propre corps réagit, une montée du sang envoyant un signal à son aine, gonflant son sexe soigneusement fourré dans la chose. Il a bien compris ce qui se passe. Il a suffisamment de fois été à la place du bourreau pour en connaître le jugement. A dire vrai, il n'a jamais trouvé ça particulièrement intéressant. Son corps réagit bien sûr, bandant quand nécessaire, faisant son office à sa demande. Mais pour ce qui est du plaisir ... Disons que ce n'est pas spécialement le genre de choses qui l'intéresse. Il apprécie les corps de femmes, ceux de certains hommes aussi, mais l'intérêt ne dépasse jamais la barrière physique. Le minimum syndical et basta.

Le sourire se ternit et disparaît tout à fait des yeux de la chose. L'orage se lève, faisant tourbillonner les gouttes d'or. Dans un sifflement de rage, elle se relève et s'éloigne, drapée dans sa dignité outrée. Son sexe brutalement mis à l'air libre retombe dans un petit bruit humide, se racornissant rapidement.

- Tu ne me désires pas ! Gronde la chose

Butch hausse un sourcil. Elle est sérieuse ?

Son ignorance a la forme d'un crime de lèse-majesté.

- Tu me déçois mon amour, tu me déçois grandement !

- Où sommes-nous ?

Sa voix roule dans le silence tendu, grondante comme s'il n'avait pas ouvert la bouche depuis un long moment. La chose plisse les yeux, cherchant à le transpercer du poids de son regard. Manque de chance pour elle, il a déjà vu pire. Elle n'aura rien de lui.

- Tu n'as pas peur de moi, pourquoi ?

Il hausse les épaules. Que peut-il répondre à ça ? Qu'il s'en fou ? Qu'il a arrêté d'avoir peur de tout ? Qu'il fait semblant ? Il n'a pas de bonne réponse, du coup il se tait. La prédatrice commence sa ronde autour de lui. Il ne la suit pas des yeux, de toute manière s'il doit se passer quelque chose il ne pourra pas se défendre efficacement. Une petite gifle n'a jamais fait de mal à personne. Avant qu'elle ne sorte de son champ de vision, il note que la forme noire ondule, suit la chose comme un toutou fidèle. Ce qu'il a d'abords prit pour une matière dense ressemble plus à une cape, il ne voit pas de chair dépasser, mais il éloigne de son esprit le vague relent mystique qui a pu lui traverser l'esprit. Si dieu n'existe pas, alors le diable non plus.

Il sent un regard lourd de reproche et de convoitise peser sur lui. Loin de s'en formaliser, il roule des épaules pour les détendre, testant la solidité et la nature des liens par la même occasion. Ses poignets sont fermement maintenus. La texture brûlante et râpeuse et le léger bruit organique le font pencher pour une corde. Pas assez fine pour le retenir indéfiniment, mais assez solide pour le blesser sérieusement. Si elle commence à piquer, sa peau n'est pas encore trop amochée. Ses jambes elles ont plus de jeux, pas libres, mais le petit mouvement n'a pas été entravé.

Une main fraiche se pose sur sa joue, glissant le long de son visage.

- Je sais à quoi tu penses, roucoule la voix, tu regardes comment je t'ai attaché

Sa main quitte son visage, traçant une ligne invisible sur son cou avant de remonter sur son pectoral et y poser sa joue en ronronnant. Elle inspire profondément, semblant de remplir de son odeur. Butch ne bronche pas, ne la regarde même pas. Il ne se sent pas menacé, encore moins par une femme. Ce qui repose sur lui n'a pas l'air d'être du tissu. Il n'y a pas de chaleur particulière, rien qui indique si la chose est nue ou pas. Mais la logique lui fait dire qu'elle n'est vêtue de rien d'autre que d'ombres, après tout il s'est réveillé alors qu'elle le chevauchait. Chose qu'elle semble vouloir refaire s'il en croit la main qui est partie le caresser. Butch retient un sourire. Elle risque d'être déçue.

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Sweet LunacyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant