Annexe_1

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Sous le ciel d'ambre, les doux brins de soleil piquent mon visage de taches de lumière. La molle agitation des feuilles, des branches, des arbres, le ruban pimprenelle cintrant l'horizon, aucun doute possible, l'heure est déjà passée. Pourtant, je reste assis. L'attente est longue. Frissons. Je descends d'une branche, puis remonte. Il fait meilleur dans ce creux. Le temps passe, mon espoir trépasse. Cela fait tant de jours que j'espère l'avoir, l'occasion de l'observer. Je me résous à rentrer. Mais soudain un bruit, un bruit si étrange, qu'étrange en devient banal. Une ombre s'avance.

Elle est là, droite et fière telle une Vénus de marbre. Elle fait un pas puis s'arrête. Sa foulée est légère mais frémissent les feuilles mortes. Elle se tient toujours là, immobile. Silence de mort. Elle refait quelques pas, disparaissant de ma vue. Je change de branche. La revoilà. La lumière semble différente autour d'elle, comme si elle était elle-même source d'une douce lueur. Son corps est long, fluide et filiforme. Son air indifférent, son allure de fer, je suis hypnotisé. Un regard vers le ciel, il fait si sombre, l'obscurité m'a rattrapé. Mais où est elle passée ? Je me laisse tomber et retrouve la terre sous mes pieds nus. Crépitements. Sur mon épaule, le poids de l'univers s'affaisse alors. Volte-face. Face à moi, la créature de mes songes.

Indéfinissable. Tous les mots ne seraient pas assez nombreux pour donner d'elle l'image la plus réaliste. Une impression de beauté et de puissance se dégage d'elle. Chimère des plus magiques, harmonieux mélange de milles merveilles de ce monde. Sa tête semble avoir été coulée dans le moule de la monture de Diane, frappante ressemblance. Ses grandes oreilles sont coupées en fines lamelles aux extrémités. Un museau rond et brillant surmonte sa bouche tel une perle noire. Jamais, ô grand jamais, je n'ai rencontré une créature dotée d'une si étrange bouche. Elle est munie de lèvres, comme les hommes, mais la supérieure est coupée jusqu'à rejoindre le nez, comme un animal. Je recule d'un pas, intimidé par tant de grandeur. Un énigmatique sourire se dessine. Quel éclat ! J'en suis ébloui. Ses dents sont semblables à celles des hommes, quelle est donc l'origine de cette atypique créature ? L'ensemble du corps est recouvert d'un soyeux pelage de différentes couleurs: la tête est d'un rouge vif, le buste d'un blanc crémeux, et le reste du corps d'un brun noisette. L'ensemble rappelle la douceur molletonnée de l'agneau. Contrairement à celles de l'arrière, ses pattes avant possèdent de terribles serres, tel Zeus. Sur le sommet de son crâne, d'incroyablement grands bois, semblent aussi solides que le roc.

Pris d'une soudaine confiance en moi, je tends une main. Sa tête vient à ma rencontre. Je m'accroche, me prépare, et me lance. Me voila assis dans le creux de son dos. Aucun signe de mécontentement. Elle avance. Nous quittons cet environnement bien connu, partons pour explorer ces contrées disparues. Nous traversons des terres dont je ne soupçonne même pas l'existence. Mondes de cristal, d'or et d'argent se succèdent, la beauté des derniers égalant celle des premiers. Le temps semble s'être arrêté, nous sommes les seuls vivants sous le ciel, défiant les dieux de notre audace. Un aura de bonheur m'enveloppe, un doux coton engourdit tout mon corps. Le claquement continu des sabots accompagne le balancement du trot, comme l'enfant bercé par sa mère, je sombre dans un état de profond bien-être.

Remarquant probablement ma douce léthargie, elle adapte son allure. Lançant un regard vers le ciel, ses majestueuses plumes s'ouvrent. Elle prend soudain de la vitesse. Nous nous éloignons des soucis terrestres. Un long frisson court le long de mon échine. Le disque d'argent luit toujours au milieu de l'immensité étoilée. Sous moi, mille et une lumières flamboient, monde si insignifiant défilant à vive allure. Tout est si beau lorsque tout est recouvert du lourd manteau de la nuit. Nous sommes pris dans un tourbillon d'étincelles et de feu follets. Rasant la voûte céleste, elle effectue une effroyable vrille. Elle s'agite, comme se débattant avec l'inconnu. Le rouge de me veines se glace instantanément. Une force s'abat sur moi et m'attire inévitablement vers le bas. Je chute. Le dessus ne connaît plus de dessous, le haut n'a plus son bas. Le dernier grain de mon sablier va rejoindre les autres. Le sol.

Il fait noir. J'ouvre un œil. Un deuxième. Où suis-je ? Je suis de retour dans mon arbre, adossé à une branche, où je me trouvais avant cette rencontre inespérée. La lumière du soleil est toujours filtrée par les branches. Aucun signe de ma Muse. Aurais-je juste rêvé ?

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Bonjour, cette première annexe n'est autre qu'un de mes DM de français de première, j'avais beaucoup aimé l'écrire et je me disais qu'il avait sa place ici ^^

Miettes de poésieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant