Chapitre 2

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Sol fut réveillée par le chant des oiseaux. Un moment, elle écouta les gazouillis qu'elle entendait à travers la fenêtre de sa chambre, les doux hennissements des chevaux dans le champ de l'autre côté de la maison et les bruits qui provenaient du rez-de-chaussée: une cuillère qu'on tourne dans un bol, une tasse qu'on pose sur la table, un couteau qui frotte contre une tartine grillée. La semi-obscurité qui régnait dans sa chambre ne lui permettait de deviner que des ombres, et le rayon de soleil qui filtrait à travers le volet et le fin rideau blanc piégeait les grains de poussière qui tournoyaient dans l'air. La jeune fille de dix-sept ans les regarda un moment, puis elle repoussa ses couvertures et se leva. Pieds nus, elle sortit dans le couloir sans faire de bruit et descendit l'escalier. Dans la salle à manger, en bas, elle trouva Raquel, une jeune femme aux cheveux bruns et bouclés attachés en queue de cheval, à la peau mate et aux yeux noirs et Iris, sa soeur, un peu plus jeune. Elle avait des cheveux mi-longs entre le châtains clair et le blond foncé et des yeux marron clair. Toutes deux étaient des cousines de Candela, la mère de Sol. Leur frère Juan, directeur de l'école de dressage Rising Sun et du ranch où ils vivaient, devait déjà être aux écuries ou au manège avec les cavaliers de l'école de dressage. Il avait dû se lever tôt, il n'y avait aucune trace de ses couverts sur la table.

Sol s'assit à la table de la salle à manger. Raquel posa un bol devant elle et lui dit:

- Bien dormi ?

La jeune fille haussa les épaules.

- Bof.

- Cauchemar ?

- Ouais.

Iris et Raquel échangèrent un regard. La veille, Sol était encore rentrée très tard et le proviseur de son lycée leur avait appris qu'elle avait encore séché les cours. La jeune fille traînait avec les mauvaises personnes, selon lui. Elle restait dehors tard le soir, faisait beaucoup la fête et passait ses journées à faire Dieu sait quoi. Avec ses longs cheveux bruns et lisses, ses grands yeux noirs, sa peau pâle et son attitude parfois revêche et impulsive, elle impressionnait souvent les gens qui la croisaient. Les gens du lycée et même ceux du village évitaient de lui chercher des problèmes. Elle était assez sombre, secrète, elle ne parlait pas beaucoup. Il était difficile de savoir ce qu'elle pensait et ce que cachaient ses grands yeux maquillés de noir. Seule Lily, la fille d'Inès, n'avait pas peur d'elle; avec elle, Sol était gentille. Elle l'emmenait même en promenade à cheval. Car l'adolescente était très bonne cavalière. Raquel, Juan et Iris essayaient d'ailleurs de l'encourager à se concentrer plus sur cette facette de sa personnalité que sur son côté sombre. Mais Sol refusait de les écouter. Iris, qui était psychologue, était pourtant certaine que la jeune fille avait un bon fond. Seulement, la perte de ses parents quand elle avait sept ans et le manque de repères l'avaient perturbée, et elle avait mal tourné. Voilà ce que Sol pouvait lire en ce moment-même dans les yeux des deux cousines de sa mère. Elle repoussa brusquement sa chaise et se leva.

- Faut que j'aille en ville.

- Sol... dit Iris en essayant de la retenir par le bras.

- Lâche-moi ! dit l'adolescente en se dégageant brusquement. Mes amis m'attendent. À tout à l'heure.

La jeune fille monta l'escalier en courant et redescendit quelques minutes plus tard, vêtue comme à son habitude de noir et de gris, maquillée et son sac à main - noir - à l'épaule. Les deux jeunes femmes la regardèrent sortir de la maison sans bouger. La porte-fenêtre claqua derrière elle, et Raquel soupira. Elle se leva et saisit sa tasse.

- Cette gamine est impossible. Aussi têtue que sa mère.

- Ça n'est pas facile pour elle.

- Non, bien sûr, mais regarde-la ! On dirait un vampire, ou un truc dans le genre. Je ne crois pas que ce soit nous qui l'ayons poussée à devenir comme ça. Elle pourrait se trouver d'autres occupations que traîner avec ses amies à la tombée de la nuit pour terroriser la ville. Un de ces jours, elles vont se faire choper par les flics et ça sera entièrement de leur faute. Il faut qu'on l'arrête avant que ça ne finisse mal.

Seras-tu làOù les histoires vivent. Découvrez maintenant