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Le docteur Lecter était installé à son bureau, il rangeait ses derniers papiers lorsque quelqu'un toqua à la porte. Il était 8 heures 15. Cela devait être Mathilde. Il boutonna les dernier boutons de sa chemise, enfila sa veste noire en flanelle et se dirigea vers la porte. 

Le docteur Lecter avait un style et une classe évidente dans n'importe quel complet. Qu'ils soient en flanelle, en tweed, bleu ou gris, accompagné d'un petit veston ou non, son corps était taillé pour les costumes. De larges épaules et un corps élancé. Une mâchoire saillante et de grandes mains masculines. Il incarnait une virilité sans fausses notes. 

En ouvrant la porte il retrouvait la  jeune fille qu'il avait vu la semaine passée. Belle, grande, mince, les cheveux retenu en demi-queue qui laissait ses ondulations retomber en cascade sur ses épaules. Elle était habillée sobrement. Un jeans brut, retroussé aux chevilles et un gros pull en laine grise. Elle était debout, statique. Sans un mot elle contourna le Docteur Lecter et entra dans la pièce. Le mot silence était décidément celui qui lui allait le mieux.

- Si vous voulez bien vous installer., proposa Lecter en refermant la porte derrière elle. Ne perdons pas de temps vous avez déjà 15 minutes de retard. 

Mathilde s'installa sur le divan. Lecter dans le fauteuil en face. Une table basse en chêne noir les séparaient. Lecter attendait que Mathilde veuille bien s'exprimer. Celle-ci s'humidifiait donc les lèvres avant de demander:

- De quoi voulez vous que je vous parle?

- Je n'en sais rien. De ce que vous voulez. En général les patients ne veulent pas perdre de temps, il veulent payer le moins de séance que possible. Ils me racontent donc tout ce qui leur pose soucis sans un quelconque ordre chronologique. 

Mathilde hocha la tête. Son regard était dirigé vers le sol. Les mains jointes près de sa bouche et ses coudes sur les genoux, elle se redressa:

- Il y a deux semaines  ma petite soeur avait son cours de danse. Ma mère et mon beau-père travaillaient. Je l'ai donc accompagné à pieds. Son cours est à 15 minutes de chez nous. Cela ne me posait pas de problèmes. Il tombait quelques gouttes de pluie mais ce n'était pas méchant. 

Mathilde se frotta les mains avant de continuer:

- Son cours dure 1 heure, plus ou moins. Je me suis dis que je n'avais qu'à me promener un peu dans le parc d'à coté et le temps passerai vite. Alors j'y suis allée. J'ai fait le tour du parc en marchant tranquillement. Il était vide. Il y avait seulement deux ou trois jogger que j'ai croisé. C'était surement ce temps sombre et pluvieux qui avait fait fuir les promeneurs... A la fin je me suis assise sur un banc sous un auvent. Il dominait la rivière en contre bas. La pluie s'était calmée et le soleil commençait à revenir... Mais quand j'ai regardé mon portable il me restait encore vingt minutes à patienter. 

Elle se stoppa et leva les yeux vers Lecter. Elle ne savait pas vraiment s'il l'écoutait, mais à priori oui. Ses yeux noisettes étaient rivés vers elle. Il était silencieux. Sa main était accrochée à son menton et son idex frottait le dessous de son nez. Il la laissait parler. Mathilde s'éclaircissa la gorge et repris:

- Je me suis alors dis que j'avais le temps de descendre voir la rivière de plus près...  Après quelques secondes d'hésitation j'y suis allée. J'ai descendu les marches qui donnaient sur les rives cimentées et j'ai repris une promenade jusqu'aux prochains escaliers... Le temps redevenait sombre. Mais peu importe. Je  m'étais rapprochée pour marcher plus près de l'eau, j'aimais ça... La rivière était grise. On ne voyait rien à travers, ni poissons, ni algues; juste mon reflet. La petite brise qui soufflait faisait des ondulations à sa surface. Des petites vagues venaient claquer sur les parois. Le spectacle était aussi joli que le son. Je voulais voir ça encore de plus près. Je voulais sentir l'odeur et toucher cette eau glacée. Je savais que j'allais aimer. J'ai toujours aimé...

MathildeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant